LATOUR BRUNO (1947-2022)
Une ambition : définir « ce qui compte » dans les sciences de la société
L’ambition théorique de Latour était de transformer radicalement les sciences de la société en passant par de multiples médiations : instruments de certifications scientifiques, paroles politiques et démonstrations publiques. Sa recomposition vise à définir ce qui compte dans les « sciences sociales ». Il produit ainsi des opéras sociologiques et des expériences artistiques de pensée avec le théâtre pour médium, afin de donner une représentation sensorielle à des situations considérées comme irréductibles aux formalisations théoriques. « Connecter l'écologie politique avec une énergie venue des arts » : cette phrase extraite du projet Gaia Global Circus résume bien l’entreprise de recomposition radicale des sciences sociales. L’« artification » du monde domine les dernières années de sa vie, et l’amène à développer des activités curatoriales avec des artistes tels que Peter Weibel et Martin Guinard. Il fut commissaire de plusieurs expositions marquantes dédiées aux « politiques de la Terre ». Les dernières eurent lieu en 2020, au ZKM, à Karlsruhe, et à la Biennale des arts de Taipei.
Sa reconnaissance mondiale est incontestable. Docteur honoris causa de plusieurs universités (Lund, Lausanne, Montréal, Göteborg, Warwick, Munich, Édimbourg et Louvain), il est récipiendaire de nombreux prix, dont le prix Bernal décerné par la Society for Social Studies of Science(1992), le Holberg Memorial Prize(2013) et le Kyoto Prize (2021).
Bruno Latour s’est éteint le 9 octobre 2022 à Paris.
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Écrit par
- Virginie TOURNAY : directrice de recherche au CNRS, Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof)
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Média
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