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BRUTALISME, architecture

Éthique ou esthétique ?

Ces architectes ne cessèrent d'affirmer un souci éthique plus qu'esthétique. Alison et Peter Smithson affirmaient : « Le brutalisme essaye de prendre en compte une société de production de masse, et d'arracher une rugueuse poésie des forces confuses et puissantes qui sont à l'œuvre. Jusqu'à maintenant le brutalisme a été envisagé stylistiquement alors que son essence est éthique. » Au rationalisme abstrait et idéal de l'avant-guerre, ils préféraient un nouveau fonctionnalisme qui non seulement acceptait les situations réelles, mais encore jouait de leurs contradictions. Ils rêvaient un monde de flux et de transformations où ils auraient eu leur part. Sur de nombreux points, ils affectaient des attitudes radicales. En 1966 parut à Londres un ouvrage de l'historien de l'architecture Reyner Bauham sur le brutalisme, faisant de celui-ci le théoricien malgré lui de la génération des brutalistes.

Dans le projet de Golden Lane (1952) ou l'ensemble de Robin Hood (1966), les Smithson conçurent des coursives qui leur paraissaient devoir remplir les diverses fonctions psychosociologiques de la rue, lieu des échanges et des contacts. Dans leur projet pour Berlin-Hauptstadt (1958), puis dans celui de Koweït (1969), ils proposèrent des réseaux de circulation piétonne libérés du sol traditionnel et multipliant passerelles et escalators. Le problème de la circulation est une des marques essentielles de l'urbanisme brutaliste tel que le conçurent des architectes comme Van Eyck, Candilis, les Smithson ou Bakema. Ils constituèrent l'équipe « Team ten », chargée par ses aînés de préparer le Xe C.I.A.M. (Congrès international de l'architecture moderne) de 1956, congrès qui témoignera de l'éclatement du mouvement moderne. Rejetant les « catégories trop schématiques de la charte d'Athènes : approvisionnement en soleil, lumière, air et espace vert », ils élaborèrent un modèle nouveau, la « grappe » ou « cluster », agrégat complexe se développant sur un jeu de trames, de mailles et de réseaux (comme le fait Candilis à Toulouse-Le Mirail, 1961) et prenant parfois exemple sur certains tissus urbains du monde méditerranéen.

Par des polémiques constantes, des articles nombreux, notamment dans la revue Architectural Design, les brutalistes eurent une profonde influence sur les architectes des années 1960. Ils tentèrent, non sans confusion, de rétablir l'architecture dans la pureté doctrinale que lui avaient conférée les avant-gardes du mouvement moderne.

— François CHASLIN

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Neue Staatsgalerie (Stuttgart), architecte: J. Stirling - crédits : AKG-images

Neue Staatsgalerie (Stuttgart), architecte: J. Stirling

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