BUCER ou BUTZER MARTIN KUHHORN dit (1491-1551)
Le principal réformateur et chef de l'Église strasbourgeoise a eu des débuts modestes. Né à Sélestat, Bucer y fait ses humanités avant d'entrer dans l'ordre des Dominicains, où il poursuit pendant dix ans des études de théologie scolastique. À l'université de Heidelberg, il apprend à connaître l'humanisme d'Érasme et rencontre Luther (1518), dont il devient un disciple ardent. Délié de ses vœux monastiques, il rejoint les nobles humanistes groupés autour de Hütten. Après l'échec de leur révolte, il gagne à la Réforme la ville de Wissembourg, puis il s'installe à Strasbourg, où il organise des cours bibliques. Un an plus tard, il est choisi comme pasteur de la paroisse Sainte-Aurélie et publie ses premiers écrits. Bucer devient rapidement le porte-parole de l'Église strasbourgeoise et s'impose comme un des principaux théologiens d'Allemagne du Sud, particulièrement à l'occasion des conflits sur la cène et des conflits avec les anabaptistes : il a réussi à persuader les magistrats d'intervenir contre ceux-ci. Par des contacts nombreux et par des études historiques approfondies, il a acquis la conviction que le pluralisme dans les formes et les moyens est une source de richesse, d'où son souci de la conciliation. Entre les conceptions luthériennes et les conceptions zwingliennes il est l'homme d'une voie moyenne influencée par l'humanisme, qui s'exprime dans la Confession dite Tétrapolitaine remise à Charles Quint lors de la Diète de 1530. Animé par un esprit pratique, il est plus préoccupé de réalisations que de théories. Soucieux d'une véritable discipline paroissiale, il introduit la fonction de kirchenpfleger pour le service de l'église de rétablir et tente la confirmation. Par opposition aux enthousiastes, Bucer insiste de plus en plus sur la Parole, les sacrements et le ministère. En 1533, il obtient la convocation d'un synode qui élabore, sous son impulsion, une ordonnance ecclésiastique qui fixe les structures ecclésiastiques, en particulier le Convent, dont il assure la présidence jusqu'à l'Intérim d'Augsbourg. S'il souligne le rôle du magistrat, autorisé, comme gardien des tables de la Loi, à légiférer en matière ecclésiastique et à contrôler l'administration de l'Église, il tient néanmoins à ce que l'autorité civile et le ministère de la Parole soient « deux fonctions qu'il ne faut jamais confondre ». À l'extérieur, Bucer s'est préoccupé de rétablir l'unité doctrinale entre les protestants, d'où sa participation à tous les colloques importants, dont celui de Marburg (1529), et à la plupart des Diètes. En 1536, il parvient à un accord avec Luther sur la cène (Concorde de Wittenberg), amorce d'une unification du protestantisme allemand aux dépens de l'influence suisse. Il a exercé une grande influence en Allemagne du Sud, où de nombreuses villes l'ont pris comme conseiller pour leur organisation ecclésiastique. Son rôle est aussi considérable en Hesse, où il participe à l'élaboration de l'ordonnance de 1539, qui introduit le système presbytéral et la confirmation, et à des entretiens avec des anabaptistes. Lors des colloques réunis par Charles Quint en 1540-1541, Bucer se trouve au centre des tentatives pour un accord sur les points fondamentaux. En 1543, il se rend à Cologne pour organiser l'Église protestante lors de la vaine tentative de l'Électeur pour gagner le territoire à la Réforme. Il a acquis une renommée internationale et sa correspondance s'étend à toute l'Europe. Mais ce médiateur refuse l'Intérim, ce qui contraint le magistrat, sous la pression de Charles Quint, à l'exiler en 1549 : on lui offre un poste à Wittenberg, à Genève et à Copenhague, mais il se rend en Angleterre,[...]
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Écrit par
- Bernard VOGLER : docteur ès lettres, professeur d'histoire de l'Alsace à l'université de Strasbourg-II
Classification
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