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UNIGENITUS BULLE (1713)

La publication de la bulle Unigenitus (1713) forme l'épisode principal de l'histoire du second jansénisme, lié à l'œuvre et à l'action de Pasquier Quesnel. Le rôle de ce dernier comme chef du parti janséniste, découvert lors de son arrestation à Bruxelles en 1703, détermine les adversaires du mouvement — Louis XIV et Mme de Maintenon, les Jésuites et leurs partisans, tel Fénelon — à susciter une condamnation contre l'ancien ami d'Arnauld. L'ouvrage de Quesnel qui se trouve visé est son Nouveau Testament en français avec des réflexions morales sur chaque verset (plus souvent cité sous le titre de Réflexions morales), publié sous une première forme en 1671, plusieurs fois grossi et réédité par la suite. Cet ouvrage à grand succès a été loué par plusieurs prélats et attaqué par d'autres.

La bulle ou constitution Unigenitus, que Louis XIV avait sollicitée du pape Clément XI, condamne cent une propositions extraites de cet ouvrage et citées mot à mot pour éviter toute tactique de défense reprenant la distinction du droit et du fait. Elles peuvent se ranger sous divers chefs : la grâce (sa nécessité pour toute bonne œuvre, son efficacité souveraine, la prédestination gratuite), la morale (l'amour de Dieu seul principe du bien), la pénitence (la crainte du châtiment ne saurait suffire à la fonder), l'Église (tout fidèle en est membre à part entière pourvu qu'il soit sanctifié), la lecture de l'Écriture sainte (recommandée à tous, même au simple peuple). La doctrine de la grâce n'est donc pas seule visée, mais aussi l'esprit gallican et richériste, favorable à une constitution démocratique de l'Église.

Si la bulle monte en épingle certaines audaces de langage de Quesnel, il eût été possible de les corriger par d'autres citations ; d'ailleurs, nombre de propositions, tout au plus « suspectes » ou « malsonnantes », ne sauraient passer pour proprement hérétiques. Un tel traitement explique le malaise qui, contrairement à l'attente de Louis XIV, accueille la publication du texte, provoquant l'opposition d'assez nombreux évêques et celle du Parlement. L'archevêque de Paris, Noailles, qui avait approuvé les Réflexions morales, est le premier chef des opposants : il veut réclamer de Rome une explication de la bulle et encourt ainsi la disgrâce du roi.

En 1717, sous la Régence, une tendance plus dure apparaît, celle des quatre évêques qui font appel de la bulle à un concile général. Noailles prend plusieurs fois leur défense, puis il finit par se soumettre (1728). Les polémiques entre acceptants et appelants, les persécutions contre ceux-ci (exil de l'évêque Soanen en 1727), le rôle du Parlement dans leur défense achèvent de constituer un nouveau parti janséniste, où l'esprit d'opposition politique l'emporte sur les affirmations doctrinales et le gallicanisme sur l'augustinisme. Ce parti s'affaiblit après 1730. Le dernier évêque appelant, Caylus, évêque d'Auxerre, meurt en 1754.

Dans la seconde moitié du xviiie siècle, les controverses sur la bulle Unigenitus cessent d'appartenir à l'actualité.

— Jean MESNARD

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Écrit par

  • : agrégé de l'Université, docteur ès lettres, professeur de littérature française à l'université de Paris-IV-Sorbonne

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