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BURUNDI

Nom officiel République du Burundi
Chef de l'État Evariste Ndayishimiye - depuis le 18 juin 2020
Chef du gouvernement Gervais Ndirakobuca - depuis le 7 septembre 2022
Capitale Gitega
Langue officielle Kirundi , Français
Population 13 689 450 habitants (2023)
    Superficie 27 830 km²

      Article modifié le

      Le Burundi, petit pays (27 834 km2) situé au cœur de l'Afrique des Grands Lacs, semble ne pas pouvoir échapper aux crises politiques, devenues chroniques depuis l'indépendance en 1962 et de nature à annihiler tout développement. Cette histoire du temps présent dramatique tranche avec les impressions de sérénité et d'équilibre qu'inspirent les paysages hospitaliers, les collines verdoyantes jardinées par une population dense et majoritairement rurale (88,8 % en 2014), un habitat dispersé et une urbanisation encore modérée.

      Burundi : carte physique - crédits : Encyclopædia Universalis France

      Burundi : carte physique

      Burundi : drapeau - crédits : Encyclopædia Universalis France

      Burundi : drapeau

      Géographie : la Suisse de l'Afrique entre crise et paix

      Récolte du thé au Burundi - crédits : Bruno De Hogues/ The Image Bank/ Getty Images

      Récolte du thé au Burundi

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      En premier lieu, le pays présente des atouts naturels et géographiques qui ont entretenu une image positive ; celle-ci s'attache aussi au Rwanda voisin, avec lequel il a de nombreux points communs. Ces hautes terres tropicales tempérées par l'altitude bénéficient d'une pluviosité abondante (de deux saisons de pluie) qui permet une agriculture intensive, associant plantes endogènes (éleusine, sorgho) et exogènes, notamment américaines et asiatiques (maïs, haricot, patate douce, manioc, banane) et une économie de plantation performante introduite durant la colonisation (café, coton) et lors des indépendances (thé). Cette niche écologique est demeurée à l'écart des grandes endémies et calamités africaines (esclavage), ce qui explique le développement historique d'un foyer démographique et les densités élevées par rapport au reste de l'Afrique. Malgré sa faible taille et son enclavement, le pays a su tirer avantage de cette situation intermédiaire entre Afrique centrale et Afrique orientale, entre Afrique anglophone et Afrique francophone, tant pour les échanges économiques, humains ou culturels que dans les équilibres géopolitiques. Enfin, il possède des potentiels de développement dans ses dépressions périphériques et dans ses réseaux hydrographiques (Nil et lac Tanganyika) qu'il partage avec ses voisins congolais et tanzanien.

      En second lieu, la société burundaise, essentiellement paysanne, possède une histoire originale, une construction nationale de plus de trois siècles et une culture homogène fondée sur une langue bantou, le kirundi, qui entretient des pratiques culturelles et des valeurs rurales fortes ; ceci ne l'a pas empêchée d'accéder à une certaine modernité véhiculée par les nombreux cadres politico-administratifs et cléricaux (plus de 80 % de la population est christianisée, la majorité étant catholique et une forte minorité protestante), grâce à une alphabétisation élevée et en progression constante (85 % des 15-65 ans en 2013) et, depuis peu, en raison d’une certaine globalisation permise par la téléphonie mobile, le développement d’Internet dans les villes et la présence des médias.

      Pourtant, ce décor est celui d'un drame. Depuis l’indépendance, le pays connaît des violences politiques qui ont atteint un paroxysme en 1972 et, en octobre 1993, un nouveau seuil de gravité : le pays s'est alors enfoncé dans une guerre civile qui a fait plus de 300 000 victimes et, de 1994 à 2002, près de deux millions de déplacés intérieurs et de réfugiés. L’accord signé à Arusha (Tanzanie) dès 2000, le retour de la paix et l’alternance démocratique étaient les garants de la pacification et de la reconstruction du pays. Mais cette période prend fin avec la nouvelle crise politique qui éclate lors des élections générales de juillet 2015.

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      Cette instabilité politique remet en cause les quelques progrès enregistrés entre les crises. Elle pénalise autant l'économie d'autosubsistance paysanne, hier autosuffisante et devenue déficitaire, que le secteur moderne agro-industriel ou celui des services concentrés à Bujumbura, la capitale économique du pays, qui en fut la capitale politique de 1962 à 2018, avant de céder le rôle à Gitega, ville plus centrale. Il en est de même des infrastructures et équipements publics . Ainsi, le revenu annuel par habitant a chuté de 210 à 80 dollars américain de 1992 à 2001 pour remonter ensuite à 170 dollars américains en 2008 puis 270 en 2014. Cette hausse révèle une croissance économique bien réelle mais vulnérable et restée inférieure à celle des pays voisins de la Communauté est-africaine (que le Burundi rejoint en 2007), y compris du Rwanda. En outre, la société sort fragilisée par ces décennies de conflit : tous les indicateurs sociaux en témoignent, comme l'espérance de vie, la pauvreté (81 % de la population vivaient en dessous du seuil de pauvreté pour la période 2007-2011) ou les taux de mortalité. À cela s’ajoutent les séquelles du sous-développement, les blocages structurels, tels l'enclavement territorial que l’intégration économique et les projets régionaux de corridors est-africains espèrent lever, la réduction des revenus d'exportation (tirés du café et compensés en partie par le thé) et un endettement croissant. Ces difficultés sont amplifiées par des problèmes démographiques singuliers. Ce qui était hier un couple vertueux, la croissance démographique et l’agriculture intensive, est devenu pénalisant : la population et la densité atteignent 12,7 millions d'habitants et 399 hab./km2 en 2019, tant et si bien que la taille moyenne des exploitations familiales voisine le demi-hectare – bien inférieur au seuil d'autosuffisance – alors que les migrations régionales restent impossibles et que la question de la réinstallation des réfugiés se pose à chaque sortie de crise. Dans ces conditions, l'engagement des acteurs internationaux devient crucial dans un pays dont le budget dépend pour moitié des financements extérieurs. Toutefois, l’aide internationale, de plus en plus humanitaire, tend à diminuer dans un contexte politique trop instable.

      Pour autant les principaux défis du pays résident dans la gestion et l’acceptation d'une histoire douloureuse associée aux déchirements génocidaires passés et encore présents dans les mémoires, dans la réconciliation politique et le dépassement des identités exclusives. En effet, l'enchaînement des crises a mobilisé, outre les élites, les populations, et a alimenté les intégrismes ethniques tant hutu que tutsi , cultivant chez les Hutu, qui représentent 85 % de la population, le sentiment d'être exclus et humiliés par un pouvoir que les Tutsi, en réalité certains sous-groupes et lignages, monopoliseraient depuis la période précoloniale, tandis que les Tutsi, 14 % de la population, au regard de l’histoire du Burundi et du Rwanda, craignent pour leur sécurité. Ces déchirements génocidaires, qui ont connu des paroxysmes lors des « événements de 1972 » puis de la guerre civile de 1993-2002, ne seraient donc que l'aboutissement d'un mouvement dialectique de violence, de brutalisation et d'ethnicisation de la société sur fond de sous-développement et de décolonisation mal préparée, tandis que l'intensité du drame paraît résulter d'une accumulation d'exclusions, de peurs et de haines que chaque crise réveillerait, d'une façon plus aiguë, en une crise identitaire. Toutefois, la décennie 2005-2015 modifie la donne. En effet, le pouvoir politique reste aux mains d’un président hutu alors que la Constitution et les accords d’Arusha proclament un partage du pouvoir autant dans la vie politique que dans les institutions dont l’armée. Par ailleurs, la société expérimente des relations inter-ethniques dépassionnées.

      L’histoire en cours va-t-elle échapper à cette double fatalité de la récurrence des crises et du repli identitaire ? Pour répondre à cette question, il faut savoir prendre en compte les environnements historiques, culturels et socio-économiques, et questionner les passés et le présent.

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      Écrit par

      • : professeur émérite d'histoire, université de Pau et des pays de l'Adour
      • Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

      Classification

      Médias

      Burundi : carte physique - crédits : Encyclopædia Universalis France

      Burundi : carte physique

      Burundi : drapeau - crédits : Encyclopædia Universalis France

      Burundi : drapeau

      Récolte du thé au Burundi - crédits : Bruno De Hogues/ The Image Bank/ Getty Images

      Récolte du thé au Burundi

      Autres références

      • BURUNDI, chronologie contemporaine

        • Écrit par Universalis
      • BANTOU

        • Écrit par
        • 8 112 mots
        • 4 médias
        ...d'importance différente se sont développés au cours des cinq derniers siècles. Le Rwanda, qui avait deux millions d'habitants au début du xxe siècle, ou le Burundi contrastent par leur taille avec les petits royaumes de Bunyoro (quelque cent mille habitants) ou d'Ankole en Ouganda. Au Rwanda, le contrôle...
      • BUJUMBURA

        • Écrit par et
        • 567 mots
        • 1 média

        Capitale du Burundi de l’indépendance à 2018, Bujumbura, l'ancienne Usumbura, située à l'extrémité nord-est du lac Tanganyika (775 m d'altitude), se trouve en situation excentrée sur le territoire burundais. Les Pères blancs, suivis par les militaires allemands, s'y installent en 1897, près du grand...

      • ESPACE RURAL

        • Écrit par
        • 7 337 mots
        • 8 médias
        ...largement spécialisés dans la production de denrées alimentaires autoconsommées (agriculture vivrière) et portant de fortes densités de population rurale. Au Burundi, en synergie avec une forte croissance démographique, des rotations de cultures de plus en plus complexes ont été mises en place par les agriculteurs,...
      • GITEGA

        • Écrit par
        • 505 mots
        • 1 média

        Gitega est redevenue la capitale politique du Burundi en 2018, remplaçant ainsi Bujumbura. Située à 1 504 mètres d’altitude dans les collines du Kirimiro, en position de carrefour au centre du pays, elle comptait 131 960 habitants en 2020. Elle est la deuxième ville du pays, après Bujumbura, qui reste...

      • Afficher les 9 références

      Voir aussi