CACHEMIRE ou KASHMIR
Une terre convoitée
Terre hindoue et bouddhiste depuis l'époque de l'empereur Aśoka (iiie siècle av. J.-C.), le Cachemire, qui fut parfois indépendant, se convertit presque totalement à l'islam à compter du xive siècle. Il tombe sous la coupe de différents maîtres : Mogols au xvie siècle, Afghans au xviiie, Sikhs puis Britanniques au xixe. En fait, le Cachemire musulman conserve, à l'époque coloniale, une certaine autonomie sous l'autorité de son souverain hindou jusqu'en 1947, date de l'indépendance de l' Inde et du Pakistan. Le raid de tribus pathanes venues du Pakistan oblige le maharajah à demander officiellement le rattachement à l'Inde, en octobre 1947. Toutefois un gouvernement de l'« Azad Cachemire » (Cachemire libre) se constitue simultanément dans les zones occupées par le Pakistan. Un cessez-le-feu, signé sous les auspices de l' O.N.U. le 1er janvier 1949, met fin aux combats sporadiques entre troupes indiennes et pakistanaises. Les Pakistanais contrôlent alors tout le Nord et une étroite bande à l'ouest, soit plus du tiers de l'État princier et environ un million d'habitants. De leur côté, les Indiens conservent la maîtrise de la vallée de la Jhelum avec la capitale Srīnagar, le Jammu et le Ladakh, c'est-à-dire presque les deux tiers du Cachemire et environ trois millions d'habitants.
En dépit des insistances pakistanaises, le référendum, promis en 1947 par l'Inde pour permettre un libre choix aux Kashmiris, n'a jamais eu lieu. Le Cachemire empêche toute normalisation des relations entre les deux pays voisins. Il provoque le conflit d'août-septembre 1965 dont l'épilogue, la conférence de Tachkent, en janvier 1966, ne résout rien. La nouvelle guerre indo-pakistanaise de décembre 1971, déclenchée par la révolte des Bengalis, connaît des prolongements au Cachemire mais ne modifie pas, dans cette région, le statu quo ante. L'accord de Simla, conclu le 2 juillet 1972, traduit le souhait des deux parties de trouver une solution pacifique et sans intervention extérieure.
Pour faire valoir leurs points de vue, les protagonistes recherchent des appuis internationaux. Depuis son désengagement, la Grande-Bretagne observe une stricte neutralité. La Chine a achevé, à l'insu de tous, en 1957, une route reliant le Sinkiang au Tibet, à travers l'Aksai Chin, partie orientale du Ladakh, considérée comme indienne par New Delhi. L'implantation chinoise dans cette région, consolidée à l'issue du conflit sino-indien de 1962, s'étend sur 37 555 kilomètres carrés. Grâce à un traité frontalier signé avec le Pakistan, en mars 1963, mais dénoncé par l'Inde, la Chine a, en plus, acquis 5 180 kilomètres carrés dans le Karakorum. Elle a achevé en 1978 la construction d'une route reliant le Sinkiang au Pendjab. Ainsi, la présence et l'influence chinoises, ressenties comme une menace par l'Inde, semblent un fait acquis qui donne une dimension nouvelle au problème du Cachemire. Les États-Unis apparaissent plutôt favorables à la thèse pakistanaise. Moscou, au contraire, appuie l'Inde, contrepoids possible en Asie à la puissance chinoise depuis 1955.
La ligne de cessez-le-feu pourrait, moyennant certains aménagements (l'un a d'ailleurs eu lieu en décembre 1972), être acceptée comme frontière internationale. Son étanchéité, depuis 1949, contribue à rendre dissemblables les « deux Cachemires ». L'évolution du Pakistan (éclatement de 1971 avec la sécession du Bangladesh, exécution de Ali Bhutto en 1979, décès troublant du général Zia en 1988...) déçoit les habitants de la vallée de la Jhelum qui bénéficient d'une relative autonomie au sein d'une Inde non théocratique. Par ailleurs, les autorités d'Islamabad admettent tacitement le partage puisqu'elles considèrent[...]
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Écrit par
- François DURAND-DASTÈS : professeur à l'université de Paris-VII-Denis-Diderot
- Alain LAMBALLE : lieutenant-colonel d'infanterie, docteur de troisième cycle en sociologie politique
- Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
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