CALCUTTA ou KOLKATA
Agglomération la plus peuplée de l'Union indienne jusqu'en 1971, quand elle est devancée par Bombay, Calcutta, avec 13,2 millions d’habitants au recensement de 2001, n'occupe plus que le troisième rang, le Grand Delhi la devançant à son tour. Comptoir colonial type, qui a ajouté à ses activités portuaires une fonction industrielle et un rôle de direction économique, elle connaît des difficultés graves, dont certaines sont le reflet des problèmes d'ensemble de l'Inde, mais dont beaucoup d'autres lui sont spécifiques. Pôle de la misère aux conditions de vie effroyables, elle est par excellence le lieu où s'affirme le contraste entre richesse et pauvreté si souvent dénoncé en Inde .
Le triomphe de la situation sur le site
Calcutta est située sur l'un des nombreux effluents qui forment le delta du Gange, la Hooghly, à 150 km de la mer. Elle se trouve ainsi au débouché de l'une des régions les plus peuplées et les plus anciennement actives du monde indien. Pour établir des relations avec les parties les plus actives de l'empire moghol, toutes les puissances européennes durent installer des comptoirs le long de laHooghly, à commencer par les Portugais dès le début du xvie siècle, bientôt suivis par les Hollandais, les Français (à Chandernagor, qu'ils ne quittèrent qu'en 1949) et, bien sûr, les Britanniques. Ceux-ci ayant éliminé peu à peu tous leurs concurrents, c'est leur comptoir, situé près du petit village de Kalikata, qui fixa l'embryon de ce qui allait devenir l'énorme agglomération contemporaine. La première factorerie anglaise fut fondée par Job Charnock en 1690, pour le compte de la Compagnie des Indes orientales, et très vite dotée d'un fort, nommé Fort William en l'honneur de Guillaume III. L'essor véritable de Calcutta date cependant de la bataille de Plassey (1757) qui assura la domination anglaise sur le Bengale et ouvrit la plaine du Gange aux entreprises britanniques.
À partir de cette date, un jeu d'interactions réciproques entre le comptoir et son arrière-pays assura la croissance de la ville et de son agglomération. La recherche de nouvelles sources de trafic pour le port conduisit au développement de la culture de l'indigo, puis du jute, dans les campagnes bengalies (d'abord exporté brut, celui-ci fut ensuite en partie traité à Calcutta) ; la présence de mines de fer et de charbon dans le nord-est de la péninsule indienne permit à des entrepreneurs britanniques, puis indiens, de développer des industries métallurgiques, qui entraînèrent ensuite la création d'autres branches industrielles, comme la chimie lourde. À ces activités s'ajouta un rôle de direction économique. La ville fut en particulier le lieu privilégié d'implantation des managing agencies, sociétés de gérance ayant de surcroît des activités bancaires qui furent un des agents les plus actifs de l'investissement colonial. Enfin, de 1843 à 1912, Calcutta fut la capitale politique de l'Inde anglaise ; le vice-roi des Indes y séjourna de 1857 à 1912.
Ce rôle éminent, dû à une croissance cumulative à partir d'une première installation dans une situation exceptionnelle, fut acquis malgré un site médiocre. La Hooghly n'est bordée que de levées alluviales modestes, qui cèdent rapidement la place aux marécages du delta ; il fallut bien s'en accommoder, malgré le lourd tribut payé à la malaria et aux « fièvres ». Port éloigné de la mer, sur un effluent qui s'envase, Calcutta est mal adapté aux conditions de la navigation moderne. Ce site médiocre, où la construction même d'un métro souterrain dans les formations alluviales a posé de graves problèmes techniques, est un des éléments des difficultés actuelles de la ville.
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Écrit par
- François DURAND-DASTÈS : professeur à l'université de Paris-VII-Denis-Diderot
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Médias
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