CALLIMAQUE (env. 310-env. 243 av. J.-C.)
Callimaque laissa une œuvre immense, tant en prose qu'en vers, dont la tradition manuscrite nous a gardé intacts seulement six Hymnes et une soixantaine d'Épigrammes ; mais les trouvailles papyrologiques nous ont permis de mieux nous représenter la totalité de cette œuvre. Aristocrate cyrénéen, il resta toujours fier de ses origines et très attaché à sa patrie, même s'il passa une grande partie de sa vie à Alexandrie. Selon une biographie laissée par les Anciens, il vécut d'abord modestement dans un des faubourgs de la ville avant d'être présenté à la Cour des souverains lagides. Il connut alors la gloire à la fois comme ami des rois Ptolémées et comme chef d'école dans le grand renouvellement littéraire de cette époque.
Le poète
De son aveu même, Callimaque affirma très jeune sa vocation poétique. Réagissant contre la décadence où sombrait la poésie, il s'efforça de renouveler la langue et la technique du vers. Son œuvre marque une étape dans l'évolution de l'hexamètre dactylique et de plusieurs genres, élégie et épigramme ; son style, à la fois savant et élégant, s'inspire des poètes archaïques, Hésiode et Pindare. Mais, par-delà les genres, ce qui fait l'originalité de Callimaque et de certains de ses contemporains comme Théocrite et Hérondas est dans l'apparition et la définition du poème en soi, indépendamment de tout genre précis, et du même coup l'apparition du recueil de poèmes. La tradition antique rend bien compte de ces transformations : elle oppose à Homère et à ses successeurs les poètes nouveaux, les neoteroi ; Callimaque lui-même est l'auteur le plus souvent cité après Homère, ce qui est significatif.
Son influence fut donc déterminante, notamment sur la poésie latine (le mouvement des poetae novi précisément) ; de même celle de Théocrite pour une source d'inspiration plus particulière, la bucolique (Églogues de Virgile). Ce grand mouvement poétique eut principalement Alexandrie pour cadre. Aussi le désigne-t-on assez souvent du nom d'alexandrinisme. Le terme n'est pas adéquat pour deux raisons : d'autres poètes participèrent à ce mouvement, qui n'étaient pas Alexandrins (Aratos, par exemple) ; l'alexandrinisme désigne une forme de poésie raffinée, artificielle, savante. Certes, cet aspect-là n'était pas absent ; mais il était loin d'être le seul. Aussi emploie-t-on plus volontiers aujourd'hui les mots de poésie hellénistique, en fonction du cadre chronologique où elle se situe.
Callimaque est resté aux yeux de la postérité le maître de l'épigramme. Cette poésie courte permet une grande variété : élégies personnelles en raccourci, jeux de lettré, critique littéraire, thèmes érotiques, thèmes satiriques. Mais l'épigramme est aussi une poésie de circonstance : poésie funéraire ou votive ; bien des pièces de Callimaque sont comparables aux inscriptions métriques des stèles funéraires découvertes par l'archéologie. Les Hymnes appartiennent à un genre hérité de celui des Hymnes homériques : deux sont écrits en dorien, alors que la langue traditionnelle est l'ionien épique ; l'un a pour mètre le distique élégiaque, alors que le mètre habituel est l'hexamètre dactylique, mètre de l'épopée. Plusieurs, par l'évocation précise des réalités cultuelles, rappellent le mime. Ce genre traditionnel est ainsi renouvelé et enrichi. La question de la destination de ces hymnes est encore débattue. Même si certains critiques leur refusent une destination immédiate dans le cadre des fêtes religieuses, on admet généralement leur grand intérêt pour la connaissance de la réalité cultuelle et de la religiosité de l'époque. Certains, notamment I, II et IV, apportent de plus un témoignage sur l'idéologie politico-religieuse des souverains hellénistiques.[...]
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Écrit par
- Claude MEILLIER : professeur à l'université de Lille-III
Classification
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