CALORIQUE
Ancien nom de la chaleur considérée comme un fluide pondérable dérivant du feu platonicien. Passant à travers les parois des vases (à cause de l'acuité de ses arêtes et de ses sommets pointus), il provoquait, d'une part, la dilatation des corps (en s'insinuant entre leurs propres particules qu'il éloignait les unes des autres) et, d'autre part, une augmentation de poids. Lavoisier, qui n'a pu ni l'isoler ni le soumettre à l'épreuve de sa balance, le considère comme un élément (ainsi que la lumière) ; il détermine sa quantité à l'aide de la quantité de glace qu'il est capable de fondre (future calorimétrie). Tout changement d'état (solide-liquide-gaz) s'effectue par absorption ou perte de calorique. Lavoisier concevait même qu'un refroidissement suffisant de l'atmosphère pourrait conduire à la liquéfaction du principe oxygine (oxygène) débarrassé de toute trace de calorique.
Le chimiste écossais J. Black (1728-1799) remarque pour la première fois que la fusion de la glace, qui se fait par absorption de calorique, n'est accompagnée d'aucun changement de température ; il en conclut que le calorique, en se combinant avec la glace, perd son individualité (1761). Ainsi se dégage peu à peu la notion de chaleur latente et de chaleur spécifique. C'est le chimiste suisse Deluc qui a signalé les résultats de Black à Lavoisier et Laplace bien des années plus tard.
Le calorique reste donc un élément subtil et impondérable (comme l'électricité ou le magnétisme) jusqu'à la fin du xviiie siècle, lorsque B. Thompson (1798) suggère qu'il peut y avoir une relation entre le travail mécanique et la chaleur produite pendant les forages, mais Sadi Carnot, dans ses Réflexions sur la puissance motrice du feu, le considère encore comme un corps indestructible. Ce n'est qu'au milieu du xixe siècle, à la suite des expériences de J. R. Mayer (1842-1845) et de J. B. Joule (1840-1849), et de la détermination de la valeur de J, l'équivalent mécanique de la calorie, que le calorique changera de camp pour être reconnu comme l'une des multiples formes de l'énergie.
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Écrit par
- Georges KAYAS : maître de recherche au CNRS, physique corpusculaire
Classification
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