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SAINT-SAËNS CAMILLE (1835-1921)

Explorer les formes musicales

Pianiste et organiste virtuose, Saint-Saëns n’a écrit pour ces instruments que des pièces de petite forme qui restent peu jouées. S’en détachent toutefois le cycle pour deux pianos Variations sur un thème de Beethoven op. 35 (1874) à partir du trio du menuet de la Sonate no 3 op. 31, et les cycles d’Études (op. 111 et 135) écrits dans ses dernières années. D’une autre importance, en revanche, sont ses cinq concertos pour piano. Le Concerto no 2 en sol mineur (1868) est le plus joué ; il a été créé sous la direction d’Anton Rubinstein avec qui s’est établie une relation d’admiration réciproque ; le Concerto no 3 en mi bémol majeur (1869) a été jugé « prodigieusement inégal » par Alfred Cortot ; après le très intense no 4 en ut mineur (1875), le no 5 en fa majeur, l’Égyptien (1896), écrit à Louxor, contient, selon son auteur, un chant nubien cité dans l’Andante. De ses trois concertos pour violon, le no 3 en si mineur (1880) est le seul à avoir survécu. Il faut y ajouter deux pièces qui restent très appréciées des violonistes, le juvénile Introduction et Rondo capriccioso (1863), enchaînant lyrisme et verve spirituelle, et la Havanaise (1887), tour à tour langoureuse et vertigineuse. Pour violoncelle, le Concerto no 1 en la mineur (1873) connaît toujours les faveurs des virtuoses, bien plus que le no 2 en ré mineur (1902).

En 1886, Saint-Saëns écrit en hommage à Liszt une de ses œuvres les plus marquantes, sa Symphonie no 3, pour orchestre op. 78, dite « avec orgue ». En quatre mouvements : Adagio-Allegro moderato,Poco Adagio, Scherzo, Finale, elle fait intervenir l’orgue dans le second mouvement et le Finale, et un piano à quatre mains dans les deux derniers, un effectif jamais encore rassemblé. Cette œuvre magistrale est traversée par un thème cyclique dont l’incipit s’inspire de celui du Dies irae. Contemporaine de celle de Lalo et de la Symphonie cévenole de Vincent D’Indy (1886), annonçant Franck (1888), Chausson (1891) et Dukas (1897), elle inaugure le renouveau de la symphonie française.

C’est de la même année 1886 que date le célèbre Carnaval des animaux, « fantaisie zoologique » jouée dans le cadre privé, et dont l’auteur avait interdit toute exécution publique de son vivant. Seul fut publié Le Cygne, belle page de violoncelle. Les quatorze pièces composant le cycle, débutant avec Introduction et Marche royale du lion, tournent en dérision compositeurs et œuvres célèbres, telles qu’Orphée aux enfers d’Offenbach dans les Tortues, la Danse des sylphes de Berlioz dans L’Éléphant, et Saint-Saëns lui-même dans les Fossiles où sa Danse macabre côtoie J’ai du bon tabac, Ah vous dirai-je maman et l’air de Rosine du Barbier de Séville. Au passage, les Pianistes, des « animaux » comme les autres, s’escriment dans des exercices de débutants…

Comme Franck et Lalo, mais bien plus abondamment encore, Saint-Saëns a pratiqué la musique de chambre, s’y appliquant dès les années 1860 (Quintette pour piano et cordes op. 14, Suite pour violoncelle et piano op. 16). Des œuvres pour des effectifs divers jalonnent sa vie, aussi bien des formations courantes (sonates pour piano et violon, piano et violoncelle, trios, quatuor avec piano, quatuors à cordes) que pour des combinaisons moins habituelles, comme l’humoristique Septuor pour trompette, piano et cordes op. 65 ou les trois sonates écrites respectivement pour hautbois, clarinette, basson et piano op. 166, 167, 168, composées en 1921 et qui constituent son testament musical. Comme Mendelssohn, Schumann, puis Brahms et Dvořák, c’est par la musique de chambre que s’identifient les compositeurs du xixe siècle soucieux de prolonger l’héritage classique.

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Écrit par

  • : docteur en musicologie, maître de conférences à l'université d'Évry, retraité

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Saint-Saëns - crédits : Rischgitz/ Getty Images

Saint-Saëns

<em>Samson et Dalila</em>, G. Moreau - crédits : Heritage Images/Fine Art Images/ Akg-images

Samson et Dalila, G. Moreau

<em>L’Assassinat du duc de Guise</em>, C. Le Bargy et A. Calmettes - crédits : Affiche de Maxime Desthomas, 1908 - Collection Fondation Pathé

L’Assassinat du duc de Guise, C. Le Bargy et A. Calmettes

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