CAMPANIE
Les « Renaissances »
Il semble que cette histoire si fragmentée ait empêché la Campanie d'être créatrice. Jusqu'au xviie siècle, ce sont des artistes étrangers ou venus d'autres régions de l'Italie qui vont déterminer sa physionomie.
Aux xiiie et xive siècles, les Français règnent en maîtres sur l'architecture (dôme d'Aversa, abside de San Lorenzo à Naples, plan provençal de Santa Chiara). Les Anjou invitent les représentants les plus qualifiés de la peinture de leur temps : Simone Martini, Giotto, le Romain Cavallini (fresques de Santa Maria Donnaregina) ; les sculpteurs sont généralement toscans.
La Renaissance, marquée politiquement par l'avènement des Aragonais, 1442-1503, qui ont profité des luttes dynastiques des Anjou, va-t-elle changer cet état de choses ? Il n'en est rien. Alors que le Quattrocento est pour l'Italie du Nord et l'Italie centrale le temps des grandes créations, Naples reste à l'écart : le Château-Neuf fut construit par un artiste français et décoré d'une frise qui est l'œuvre de F. Laurana, venu de Dalmatie. Les liens de Naples et de Florence se multiplient : on copie des ouvrages florentins et Benedetto da Maiano travaille au décor de l'église Sainte-Anne-des-Lombards. Le seul artiste vraiment napolitain, Colantonio, s'inspire des peintres flamands, et par lui s'établissent des rapports inattendus entre les écoles du Nord et la peinture méridionale. Encore une fois, Naples accueille, diffuse, mais ne crée pas.
Les gouvernements se succèdent ; des Aragons, le royaume de Naples passe aux Espagnols. En 1738, les Bourbons deviennent rois de Naples et de Sicile et le resteront (hormis les parenthèses jacobine et napoléonienne) jusqu'à l'unité de l'Italie. Naples, capitale, concentre les activités artistiques de la Campanie. La vraie « Renaissance méridionale », c'est celle du xviie et du xviiie siècle : Caravage venu de Rome va susciter les forces qui animeront les artistes de Naples. Le musée de Capodimonte, les innombrables églises témoignent de la vitalité de l'école napolitaine. Mais, pour découvrir les fastes de la peinture baroque, il suffirait presque d'aller, sur la colline du Vomero, à la chartreuse de Saint-Martin : le réalisme de Caravage, ses violentes oppositions d'ombre et de lumière sont imités par son disciple direct, Caracciolo, et par l'Espagnol Ribera. Plus sentimentaux, plus proches d'un Guido Reni, voici Stanzioni et B. Cavallino. L'art de Mattia Preti s'inspire de Lanfranco et du Guerchin et est influencé par le colorisme vénitien. Mais la peinture baroque trouve sa plus haute expression dans la chapelle du Trésor : dans la Gloire de Judith, Luca Giordano déploie la technique, le sens de la décoration et l'imagination sans limites qui le caractérisent, et qui sont répandus avec abondance dans tant d'églises de Naples.
Bien entendu, toute la peinture napolitaine n'est pas là. Il faudrait citer encore les paysages romantiques d'un Salvator Rosa et d'extraordinaires natures mortes : fleurs et fruits d'un Porpora et d'un Ruoppolo ; poissons aux écailles dorées et bleues d'un Recco.
L'architecture ne reste pas en arrière : Cosimo Fanzago, Solimena, Vaccaro transforment palais, cloîtres et églises. San Felice joue avec les décors de théâtre, les perspectives illusionnistes et anime des grâces du rococo les villas vésuviennes qui n'ont plus guère que le charme des ruines. Fuga a plus de force, et, avec l'hospice des Pauvres, il crée l'architecture fonctionnelle de demain. La simplicité et l'austérité de ses conceptions en font presque un néo-classique. À L. Vanvitelli, l'autre personnalité marquante de cette fin du siècle, Ferdinand IV de Bourbon confiera la construction de la résidence royale. Versailles un peu démesuré,[...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Noëlle de LA BLANCHARDIÈRE : conservateur de la bibliothèque de l'École française de Rome
Classification
Médias
Autres références
-
BRONZES ANTIQUES
- Écrit par Claude ROLLEY
- 5 573 mots
- 7 médias
-
CAPOUE
- Écrit par Encyclopædia Universalis
- 412 mots
Durant l'Antiquité, Capoue (Capua) était la ville principale de la région de Campanie, en Italie. Elle était située à 26 kilomètres au nord de Neapolis (Naples), sur le site de l'actuelle Santa Maria Capua Vetere. La ville moderne de Capoue, proche, était alors appelée Casilinum. L'antique...
-
DISSOLUTION DE LA LIGUE LATINE
- Écrit par Xavier LAPRAY
- 239 mots
La dissolution de la Ligue latine marque la fin de la guerre des Latins contre Rome et aboutit à la mainmise définitive de cette dernière sur le Latium. Le conflit a pour origine l'expansion romaine dans le Latium et en Campanie (Rome s'est entendue à cette fin avec les Samnites, puissant...
-
GRÈCE ANTIQUE (Histoire) - La Grande-Grèce
- Écrit par Claude MOSSÉ
- 3 360 mots
Le nom de Grande-Grèce apparaît pour la première fois dans l'œuvre de l'historien Polybe. Mais il est probable que les Grecs l'employèrent dès une époque plus ancienne pour désigner la partie méridionale de la péninsule italienne, où, depuis le milieu du viiie siècle, les...
- Afficher les 9 références