Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

CANADA Espace et société

Capitale Ottawa
Langue officielle Français , Anglais
Population 40 097 761 habitants (2023)
    Superficie 9 984 670 km²

      Article modifié le

      Entre centre et périphérie

      L’écoumène se densifie progressivement d’abord au rythme de l’industrialisation et, dans un second temps, de la tertiarisation de l’économie canadienne. Une opposition se dessine entre l’axe Saint-Laurent–Grands Lacs et le reste du pays. Le fossé se creuse davantage avec la métropolisation. Le développement d’un réseau pancanadien de villes vient cependant rééquilibrer la géographie du Canada. L’influence de Montréal, de Toronto et de Vancouver, où vit un Canadien sur trois, mais aussi de Québec, d’Ottawa, de Winnipeg, de Calgary et d’Edmonton se fait sentir bien au-delà de leur hinterland respectif. D’autres lieux émergent, en raison de leurs capacités uniques à prendre leur place dans l’espace économique mondial. Le tourisme se révèle ainsi être une importante source de croissance et de diversification économique. La région atlantique en bénéficie plus particulièrement.

      De la fabrication aux services

      L’exportation de la fourrure, puis du bois et du blé favorise assez tôt l’essor d’une économie domestique, avec le développement d’une industrie locale, d’institutions financières et la consolidation des réseaux commerciaux. Plusieurs petites villes industrielles voient le jour dans le sud de l’Ontario et autour de Montréal. Au tournant des années 1880, une vingtaine de villes de l’axe Saint-Laurent–Grands Lacs, parmi lesquelles Montréal et Toronto, mais aussi Québec, Ottawa, Hamilton et London, ont déjà une production manufacturière qui dépasse le million de dollars. L’ouverture de l’Ouest canadien, qui offre un marché inespéré pour leurs produits, consacre l’ensemble qu’elles forment comme cœur industriel du pays. S’installe alors la structure centre-périphérie qui constitue encore aujourd’hui un des traits fondamentaux de la géographie du Canada. Située au centre d’un système de transport de mieux en mieux développé, cette région profite de son importante population, parmi laquelle des artisans spécialisés et des entrepreneurs disposant d’un certain capital. La proximité du marché américain, alors en pleine croissance, est aussi un atout.

      L’industrialisation se fait sur plusieurs fronts, à l’abri des barrières tarifaires mises en place peu après la Confédération. L’Ontario se spécialise dans la machinerie et les autres biens de production. Tirant profit d'une main-d’œuvre abondante et bon marché, le Québec domine pour sa part la fabrication de biens de consommation : textile, vêtements, chaussures. Il tire aussi parti de l’hydroélectricité, pour occuper une place importante dans la production du papier et la première transformation des métaux. L’industrie de l’automobile et la fabrication d’appareils électriques font, quant à elles, la prospérité de l’Ontario. Riches en charbon, les provinces maritimes s’industrialisent également. Des fonderies, des filatures, des raffineries y sont créées. Mais le caractère périphérique de cette région fait que son industrialisation ne s’effectue pas au même rythme que dans le centre du pays.

      Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

      L’activité manufacturière est un moteur important de l’économie canadienne jusque dans les années 1970, où s’amorce un net ralentissement. Seuls quelques secteurs, dont l’aérospatial, concentré à Montréal, échappent à cette tendance. À l’instar de plusieurs autres pays industriels, le Canada voit alors son économie se réorienter vers le secteur des services, où travaillent aujourd’hui quatre Canadiens sur cinq. Toutes les régions du Canada sont concernées, quoique le Centre réussisse mieux sa transition, en s’imposant dans les services aux entreprises, particulièrement sensibles à l’effet d’agglomération. L’accès privilégié aux marchés financiers, à l’information, à une main-d’œuvre abondante et qualifiée a contribué à son essor.

      Villes et métropoles

      Montréal, Canada - crédits : Šarūnas Burdulis/ Flickr ; CC BY-SA 2.0

      Montréal, Canada

      Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

      Au milieu du xixe siècle, à l’aube de la Confédération, le Canada compte dix villes de plus de 10 000 habitants : Montréal, Québec, Toronto, Saint Jean (Nouveau-Brunswick), Halifax, St. John’s, Hamilton, Ottawa, Kingston et London. Chacune accueille son lot d’activités de fabrication, agit comme pôle commercial et exerce son influence sur son arrière-pays. Parmi elles, Montréal se démarque déjà. De fait, elle occupe le premier rang dans la hiérarchie des villes canadiennes jusque dans les années 1960, bénéficiant d’une croissance forte de sa population, laquelle est passée de 268 000 habitants en 1901 à 819 000 en 1931. La « métropole » domine alors les secteurs manufacturier, financier, commercial et du transport du pays. Toronto lui livre toutefois une forte compétition à partir de la fin de la Première Guerre mondiale, profitant d’un dynamisme boursier favorable à la consolidation de ses industries les plus performantes, telles la machinerie, la fabrication des appareils électriques et l’industrie chimique. L’achèvement de la voie maritime du Saint-Laurent, à la fin des années 1950, qui permet aux bateaux de contourner Montréal, minant ainsi sa fonction portuaire, favorise aussi sa rivale qui la devancera bientôt comme centre financier et décisionnel du pays. L’écart entre les populations des deux plus grandes villes du Canada se creuse. Toronto comptait 2,7 millions d’habitants en 2016, Montréal 1,94 million.

      Toronto et Montréal ont fortement souffert du ralentissement de leurs activités manufacturières à partir des années 1970. Mais ces deux villes ont conservé leur place à la tête du système urbain canadien, réussissant leur passage vers une économie de services. Elles dominent la radio-télévision canadienne et, plus largement, les communications du pays, imposant ainsi leur diktat sur le mode de vie des Canadiens : Montréal au Canada français, Toronto au Canada anglais. C’est par leur intermédiaire que les tendances lancées dans les grandes capitales du monde sont adoptées. Par ailleurs, d’autres métropoles, telles Calgary et Edmonton, en Alberta, se sont aussi taillé une place sur le marché des idées. En outre, l’extraction et la transformation des ressources naturelles reviennent en force comme moteur de l’économie canadienne au xxie siècle et elles agissent comme de puissants leviers de croissance démographique et économique. Profitant d’investissements massifs, la population de ces deux métropoles augmente au même rythme que l’emploi. Après n’avoir été que de simples relais, elles développent aujourd’hui leurs propres liens continentaux et intercontinentaux. La ville de Vancouver profite, quant à elle, de sa localisation sur le Pacifique pour se tourner résolument vers l’Asie, dont elle est devenue la porte d’entrée au Canada. Cette ville a connu un essor inégalé, quoiqu’âprement disputé après que des investisseurs chinois ont pris d’assaut son secteur immobilier. Elle se distingue aujourd’hui par son urbanisme audacieux qui intègre habitations à haute densité, services publics de qualité et engagement pour la viabilité. De leur côté, des villes moins populeuses, comme Ottawa et Québec, misent sur leur rôle de « capitale nationale » – Québec, capitale de la province de Québec, s’est aussi arrogé le titre – pour devenir elles aussi des villes « mondiales ».

      Près de 70 p. 100 des Canadiens vivent aujourd’hui dans l’une des trente-cinq régions métropolitaines du pays – on utilise le terme de métropole au Canada pour les villes de plus de 100 000 habitants. Si plusieurs petites villes, notamment celles du Canada atlantique, voient leur population diminuer, les métropoles continuent leur croissance démographique.

      Le rôle structurant des transports

      Transcontinental canadien - crédits : William England/ Getty Images

      Transcontinental canadien

      Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

      Les transports ont joué et jouent encore un rôle crucial dans l’industrialisation et l’urbanisation du pays. C’est autour du Saint-Laurent et de ses multiples affluents qu’ont été jetées les bases du Canada tel qu’on le connaît aujourd’hui. Le réseau hydrographique des Grands Lacs a permis d’intégrer progressivement l’immense territoire qui se situait plus à l’ouest, et d’y établir une série d’avant-postes qui deviendraient des relais pour l’exploitation de ses ressources. Le chemin de fer est venu consolider l’avantage initial de l’axe Saint-Laurent–Grands Lacs, qui jouit de plusieurs milliers de kilomètres de chemin de fer au tournant des années 1880. Le Grand Tronc du Canada (ou Grand Trunk Railway Company of Canada), reliant Montréal et Sarnia (Ontario) à partir de 1860, puis le chemin de fer Intercolonial reliant Montréal aux Maritimes et achevé au milieu des années 1870 comptent parmi les principaux facteurs de l’industrialisation du pays, ouvrant de nouveaux marchés, tout en créant une demande pour le carburant, le fer et l’acier, ainsi que les locomotives et le matériel roulant. La construction du chemin de fer du Canadien Pacifique, de 1881 à 1885, joue le même rôle dix ans plus tard, pour la colonisation des Prairies, la croissance de Winnipeg et de Vancouver. S’y ajoutent au début du xxe siècle de nombreuses lignes secondaires, qui assurent la liaison vers Saskatoon, Prince Albert et Edmonton, ainsi qu’un autre chemin de fer transcontinental, reliant Moncton (Nouveau-Brunswick) à la côte pacifique via Winnipeg, à travers les étendues désertes du nord du pays dans l’espoir d’y favoriser le développement.

      À partir des années 1920, presque tous les centres urbains du Canada sont desservis quotidiennement par un train de passagers. Le réseau ferroviaire est le reflet de la hiérarchie urbaine. Celui des prairies est moins dense que dans le Canada central, reflet de l’opposition entre une économie dominée par l’agriculture et une économie orientée vers l’activité manufacturière. Au-delà des Rocheuses, le rail ne rejoint, hormis Vancouver, que quelques lieux d’extraction. Encore aujourd’hui, le réseau de VIA Rail Canada, la société nationale qui assure le transport des personnes, ne couvre que le sud du pays et ne dessert que ses plus grandes villes. Dans l’Est, Terre-Neuve et l’Île-du-Prince-Édouard ne sont pas desservies.

      L’expansion du réseau routier est rapide après la Seconde Guerre mondiale. Cependant, la route transcanadienne qui, sur 7 821 kilomètres de l’Atlantique au Pacifique, relie les dix provinces du Canada, n’est inaugurée qu’en juillet 1962 et n’est achevée qu’en 1971. Quant aux liaisons aériennes, inexistantes ou presque avant la grande dépression des années 1930, elles se développent au rythme de l’exploitation minière. Les liens nord-sud, vers les centres d’extraction de la périphérie, précèdent le développement des liens est-ouest interurbains et interrégionaux, qui révolutionnent bientôt l’industrie. Un modèle d’organisation régionale structuré par les grands aéroports internationaux de Montréal, Toronto et Vancouver se confirme dans les années 1960. Avec une population somme toute très modeste sur un territoire immense, la desserte des villes qui se situent à l’extérieur des grands corridors inter-métropolitains du sud du pays reste un enjeu de taille.

      Les espaces du tourisme

      Est-ce à dire que, au Canada, hors des métropoles point de salut ? Face aux tendances lourdes de la polarisation métropolitaine, plusieurs régions rurales, villes petites ou moyennes sont en déclin démographique. Les zones les plus éloignées des grands centres sont les plus touchées. Si on comptait par exemple 106 404 habitants pour la Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine en 1996, ils n’étaient plus que 90 700 en 2016 et l’Institut de la statistique du Québec (ISQ) prévoit que cette région de l’est du Québec n’accueillera plus que 82 200 habitants en 2041. La forêt et la mer continueront à générer des emplois, mais de moins en moins. Le secteur des services se maintient mais avec un dynamisme réduit, car il est concentré dans les services traditionnels et les services publics.

      Cependant, même en région périphérique, certaines localités connaissent une croissance, grâce à de nouveaux investissements. La villégiature, et plus largement le tourisme, sont un important moteur de diversification économique. Partout au Canada, la proximité des États-Unis, qui sont de loin la principale source de touristes étrangers – 15 millions sur les 21 millions de touristes internationaux en 2019 –, constitue un atout de premier plan. D’année en année, le nombre de visiteurs étrangers augmente, jusqu’à ce que la pandémie de Covid-19 ne vienne fermer les frontières du pays, en mars 2020.

      Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

      En mal d’industries et de métropoles particulièrement dynamiques, mais riche en paysages, le Canada atlantique s’est ainsi « recyclé » dans le tourisme qui apparaît aussi comme un complément économique pour plusieurs régions de la périphérie québécoise. Dans le sud de l’Ontario, les chutes du Niagara, près desquelles prospère depuis quelques années une industrie vinicole, sont des incontournables. L’attrait des Rocheuses, à la frontière de l’Alberta et de la Colombie-Britannique, ne se dément pas, alors que les espaces vierges du Nord s’ouvrent à l’écotourisme. Une grande partie du territoire offre un accès unique à la nature, faisant du Canada une destination touristique privilégiée aux échelles nord-américaine et européenne. Le réseau des parcs nationaux, dont Banff et Jasper sont devenus des emblèmes, est la clé de voûte de l’économie touristique canadienne.

      Accédez à l'intégralité de nos articles

      • Des contenus variés, complets et fiables
      • Accessible sur tous les écrans
      • Pas de publicité

      Découvrez nos offres

      Déjà abonné ? Se connecter

      Écrit par

      • : professeure émérite, département de géographie, université d'Ottawa, Ontario (Canada)

      Classification

      Médias

      Canada : carte administrative - crédits : Encyclopædia Universalis France

      Canada : carte administrative

      Le flottage - crédits : William England/ Hulton Archive/ Getty Images

      Le flottage

      Forage pétrolier au Canada - crédits : John Chillingworth/ Picture Post/ Getty Images

      Forage pétrolier au Canada

      Autres références

      • PALÉOESQUIMAU

        • Écrit par
        • 68 mots

        Le terme paléoesquimaux désigne toutes les populations préhistoriques établies de la rive sibérienne du détroit de Béring au Groenland, en passant par l'Arctique nord-américain, qui manifestent un mode de vie de type esquimau. Elles ont disparu peu après l'arrivée d'immigrants venus d'...

      Voir aussi