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PANAMÁ CANAL DE

Construction et exploitation du canal

Dès le xvie siècle, les Espagnols, conscients de l'intérêt d'un canal percé dans l'isthme de l'Amérique centrale, envisagent deux tracés, l'un au Panamá, l'autre au Nicaragua. Le choix du Panamá s'impose avec la construction d'une ligne de chemin de fer dans le pays au milieu du xixe siècle. Le tracé du canal longera celui de la voie ferrée.

La première tentative de percer un canal voit le jour en 1881, lorsque le gouvernement colombien (Panamá est une province colombienne) octroie une concession à la Compagnie universelle du canal interocéanique. Cette compagnie privée, dirigée par le diplomate français Ferdinand de Lesseps, auréolé de son triomphe dû au percement du canal de Suez (1869), est financée par un emprunt lancé auprès de dizaines de milliers de petits épargnants français (sur 104 345 porteurs, 80 839 n'ont acquis qu'une à cinq actions). Lesseps opte pour un canal à niveau, sans écluse, malgré les oppositions de l'ingénieur Adolphe Godin de Lépinay, qui connaît bien la topographie du Panamá. Ce dernier propose d'utiliser les flots torrentiels des rios Chagres et Grande pour construire deux barrages à Gatún et à Miraflores et former deux lacs artificiels, puis de relier les lacs entre eux, en coupant à travers la ligne de partage des eaux et de joindre, ainsi, les deux océans par une série d'écluses. Si Lesseps fait appel à des ingénieurs compétents, il ne prévoit pas de projet d'ensemble. Les machines utilisées pour percer le canal sont trop légères ou inadaptées à la dureté du terrain. Le pays est recouvert d'une jungle tropicale, il connaît des pluies diluviennes, de fortes chaleurs et une humidité constante. Par ailleurs, le tracé du canal traverse des marais côtiers mais aussi les sommets de la ligne de partage des eaux. Les maladies tropicales entraînent la mort de nombreux ouvriers.

Les progrès sont lents et extrêmement coûteux. Par souci d'économie, le projet d'un canal à niveau est abandonné au profit d'un canal à écluses mais, craignant d'investir à perte, les épargnants français se détournent du projet. Aucun des nouveaux emprunts lancés n'est couvert, et la compagnie est déclarée en faillite puis dissoute en février 1889, à la suite du plus grand scandale financier et politique de la IIIe République. Afin de continuer les travaux, la Compagnie nouvelle du canal de Panamá est constituée en 1894 mais la confiance est ruinée, et la société, après avoir offert de céder au gouvernement américain la propriété du canal et tous les droits y afférents, cesse définitivement toute activité en 1898. En 1902, le Congrès des États-Unis, convaincu que le canal est indispensable pour faire passer rapidement la flotte américaine d'un océan à l'autre, autorise le rachat de la Compagnie nouvelle et le percement d'un canal, à la condition qu'un traité soit négocié avec la Colombie, alors souveraine de la province du Panamá. Mais les négociations sont interrompues et, après avoir soutenu implicitement la sécession du Panamá, qui déclare son indépendance le 4 novembre 1903, les États-Unis signent, avec le nouvel État qu'ils s'empressent de reconnaître, le traité Hay-Bunau-Varilla (18 novembre 1903). Celui-ci répond aux exigences du Congrès d'obtenir, notamment, la concession à perpétuité du canal et de la zone adjacente (sur une largeur de dix miles) appelée la Zone du canal (Canal Zone, C.Z.). En échange, les États-Unis versent une indemnité de 10 millions de dollars.

À l'été de 1904, les États-Unis commencent les travaux le long du tracé initial du canal, mais les ingénieurs ne savent pas comment maîtriser les flots torrentiels du río Chagres qui risque de déborder et d'inonder toute voie d'eau construite sur son trajet. En 1906,[...]

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Écrit par

  • : juriste
  • : professeur émérite de géographie, université d'État de San Francisco
  • : professeur de science politique, Massachusetts Institute of Technology, Cambridge, États-Unis
  • : National Museum of American History, Washington
  • Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

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Canal de Panamá, 1 - crédits : Will & Deni McIntyre/ The Image Bank/ Getty Images

Canal de Panamá, 1

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