CANCER ET ENVIRONNEMENT
Présence de facteurs cancérigènes dans l'environnement
De nombreux facteurs environnementaux sont considérés être à l'origine des cancers. Citons les virus oncogènes, pour 10 % des cas (leucémies, lymphomes, sarcomes, cancers du col de l'utérus, cancers primitifs du foie, etc.) ; les radiations ionisantes (radioactivité naturelle et artificielle) ou non ionisantes (ultraviolets solaires), à l'origine d'environ 10 % des cancers (cancers du corps tyroïde, leucémies, lymphomes, mélanomes, etc.). Citons de nombreux produits chimiques. Ceux-ci peuvent contaminer l'organisme par voie respiratoire en étant présents dans l'air extérieur (HAP), l'air des lieux d'habitation ou encore professionnels (benzène, métaux lourds, amiante, biocides, etc.) et être à l'origine de nombreux cancers associés ou non au tabagisme (cancers des bronches, du rein, de la vessie, leucémies et lymphomes, etc.). Ils peuvent le faire aussi par voie alimentaire – contaminants liés à l'agriculture (pesticides, nitrates) ou à d'autres sources (dioxines, métaux lourds) ; additifs liés à l'industrie agroalimentaire (colorants azoïques, conservateurs alimentaires nitrités, etc.) –, à l'origine de nombreux cancers, cancers digestifs, sarcomes, lymphomes, etc.). Depuis la Seconde Guerre mondiale, l'environnement a été contaminé par 80 000 à 100 000 molécules chimiques dont seulement moins de 5 000 ont fait l'objet d'études de toxicité et, parmi elles, moins de mille pour leur effet cancérigène, et encore moins pour leur effet mutagène. Or, chaque année, la liste s'allonge des molécules chimiques considérées comme certainement ou « possiblement » cancérigènes par les organismes internationaux, tels que le CIRC ou l'Environmental Protection Agency américaine. On est donc actuellement en présence d'une pollution chimique diffuse, multiforme et génératrice d'effet « cocktails », car les différentes molécules peuvent conjuguer leurs effets cancérigènes. À tel point qu'une étude épidémiologique négative ne signifie pas l'absence de risque, puisque les témoins de référence peuvent eux-mêmes être contaminés.
En conclusion, les arguments et tenseurs scientifiques précédents permettent de concevoir un nouveau paradigme, celui de l'origine environnementale de la plupart des cancers non liés au tabagisme, et plus particulièrement, le rôle de la pollution physico-chimique dans leur genèse. Par conséquent si, dans le domaine de la santé publique, il convient de renforcer la lutte contre le tabagisme, il convient tout autant de lutter contre la pollution sous toutes ses formes par des mesures de prévention et de précaution ciblées, et pour cela articuler étroitement le plan cancer avec le plan santé-environnement tel que l'a proposé la France. C'est aussi l'objectif que se sont fixé les signataires de l'appel de Paris. Cet appel a été lancé le 7 mai 2004, lors du colloque international de l'UNESCO Relayant l'inquiétude exprimée déjà par l'OMS, il a été soutenu par plus de quatre cents scientifiques internationaux dont plusieurs Prix Nobel. Donc le programme européen Reach (Registration, evaluation, autorisation of chemicals), qui vise à réguler de façon plus stricte la mise sur le marché des substances chimiques et à renforcer les dossiers d'homologation sur le plan toxicologique, doit être conforté et non affaibli.
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Écrit par
- Dominique BELPOMME : professeur de cancérologie à l'université de Paris-V, cancérologue à l'hôpital européen Georges-Pompidou, président de l'A.R.T.A.C.
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Médias