CANDOMBLÉ
Le culte
Le terme « candomblé » (étymologie probable : « lieu de la danse ») apparaît au xixe siècle à propos des quilombos, regroupements d'esclaves fugitifs, ce qui manifeste le rôle de ce culte dans l'émancipation des Noirs. L'espace sacré est le terreiro, qui doit s'adapter au terrain où il est implanté, mais tous ceux de la nation iorubá ont des caractéristiques communes : d'abord l'existence d'au moins deux Exús, le premier dans une petite maison près de la porte d'entrée, le second enterré sous le seuil. Cette dualité typiquement africaine se retrouve dans l'opposition des deux parties du candomblé : l'ilé-orixá (la maison des divinités) – avec des locaux différenciés : temple, couvent et lieu d'habitation – et l'ilé-sain (maison des morts). Elle répond au double culte des orixá et des ancêtres en Afrique. D'autres lieux sont considérés comme sacrés, mais seulement en tant que prolongeant le terreiro, tels que les sources. L'univers est divisé en deux régions qui à l'origine se compénétraient et que le créateur sépara à la suite d'une transgression : l'ayé, la terre des phénomènes sensibles et des créatures, et l'orum, l'au-delà, le séjour des esprits (orixá compris). Tous les rites ont pour fonction d'assurer la communication entre eux, par la distribution de la force sacrée présente dans tous les êtres, l'axé. Au commencement, le Dieu créateur, Olorún, était le vide cosmique, indifférencié, qui en lui-même engendra le mouvement. Du mouvement de l'air se formèrent les eaux et la première matière amorphe, d'où fut constitué l'être primordial, Exú : d'un côté, le binôme eau-air, domaine d'Oxalá, principe masculin ; de l'autre, le binôme eau-terre, domaine d'Odudua, principe féminin. De ce premier couple divin surgirent les orixá.
Sauf Olorún, toutes les divinités sont indifféremment appelées orixá (orisha), le panthéon étant généralement réduit à seize grandes entités. En plus d'Exú, médiateur de tous les échanges, sorte de Mercure africain, dont le rôle est bénéfique ou maléfique selon les cas, nous trouvons Oxalá, Iemanjá, Ogun, Oxossi, Logunedê, Osaim, Iroko, Nanã, Omulu, Oxumaré, Xangô, Iansã, Obá, Euá et Ifá. Certains ne s'incarnent pas, tel Ifá, qui s'exprime à travers l'oracle des búzios (coquillages). Chaque personne a une origine divine et la partie qu'elle tient de celle-ci est située dans la tête (ori), siège de l'individualité et point de jonction avec le collectif. Tous les rites de passage s'appuient sur le culte de la tête. Les orixá sont hérités des ancêtres. Le « maître de la tête » et, après lui, toutes les divinités qui s'expriment dans l'odu déterminent le destin de chaque individu. L'oracle (Ifá) dira quel dieu doit être servi si l'on veut réaliser le processus d'intégration qui consiste à transformer l'autre en soi-même. À ces rites s'ajoutent le culte des ancêtres, celui des anciens desservants du temple (axéxé) et celui des eguns, qui est entouré de mystère.
On rencontre quatre types de sacerdoce : celui du babalorixá (père de saint) ou ialorixá (mère de saint), qui préside au culte des orixá ; ceux du babalaô (culte d'Ifá) et du babalosaim (culte d'Osaim, la « maîtresse des feuilles », de qui émane la force magique qui vivifie les hommes et les dieux selon Frobenius) ; enfin, celui du babaogê, qui préside au culte des eguns (ou des morts). Le culte ne comporte pas de représentations anthropomorphes ; c'est la pierre consacrée qui est l'orixá lui-même et que l'on vénère. La puissance des dieux vient des sacrifices et des nourritures qui leur sont offerts (toute la savoureuse cuisine bahianaise est « nourriture de saint[...]
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Écrit par
- Jean-Marie REMY : professeur et traducteur
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