CANYONS SOUS-MARINS
Origine des canyons sous-marins
Compte tenu des problèmes qui subsistent et du nombre d'observations encore insuffisant, l'origine des canyons sous-marins est encore mal connue. On peut néanmoins proposer les explications suivantes.
Le creusement subaérien
Largement évoqué antérieurement, le creusement subaérien serait responsable, d'une part, du creusement des têtes de canyons situées près du rebord de la plate-forme continentale en période régressive, d'autre part, du creusement majeur des canyons méditerranéens pendant la régression messinienne (de 6,5 à 5 Ma). Depuis l'ennoyage pliocène de ces derniers, les formes primitives ont été remodelées par la sédimentation marneuse et l'érosion entretenue par l'orogenèse continentale et la subsidence du bassin.
L'érosion sous-marine
L'immersion marine progressive, par subsidence tectonique, des marges stables débute relativement tôt dans la phase d'étirement (stretching). À la fracturation succèdent la progradation sédimentaire et les processus d'érosion. Il est donc indéniable que tous les canyons des marges stables (hormis ceux de la Méditerranée) ont été creusés sous la mer. Ils n'entaillent souvent que partiellement la couverture sédimentaire et on peut donc en conclure qu'ils se forment tardivement dans des conditions qui restent à préciser. Ils vont subir par la suite des surcreusements, un élargissement du lit et la formation d'un réseau d'affluents.
Nous avons vu que les courants marins sont incapables d'effectuer un tel ouvrage. Il faut donc mettre en cause des déplacements gravitaires parmi lesquels seuls les courants de turbidité de haute densité et les écoulements très fluides sont capables de chasser hors du canyon les dépôts abandonnés par les glissements des versants. Par érosion, ces courants augmentent leur charge (donc leur densité) et, par conséquent, leur vitesse jusqu'au stade d'écoulement permanent contrôlé par la pente, selon la formule dérivée de la formule de Chézy :
où C est une constante, V la vitesse, ρmla densité du courant, ρ celle de l'eau, g la gravité et S la pente.Plusieurs approfondissements subits, correspondant probablement au départ d'un courant de turbidité, ont été observés dans les têtes de canyons. Ces actions répétées peuvent, à elles seules, expliquer l'érosion régressive des têtes de canyons, le creusement des lits et le recul des versants, jusqu'à l'obtention du profil d'équilibre.
Quelques conditions particulières accélèrent parfois le creusement :
– les facilités tectoniques, failles et discontinuités rhéologiques qui ont guidé le cours et activé l'érosion de nombreux canyons ;
– l'abaissement du niveau marin qui, en permettant l'afflux de sédiments dans les têtes de canyons, augmente considérablement la fréquence des courants de turbidité ; notons qu'en période actuelle de haut niveau marin, seuls les canyons qui ont leur tête proche du littoral peuvent être actifs ; les autres sont en sommeil, par exemple le canyon du Rhône qui, en période de bas niveau marin, a édifié un vaste deep-sea fan, actuellement presque totalement privé d'apports turbiditiques ;
– l'orogenèse continentale, qui augmente l'afflux détritique ;
– les fusions des glaciers et de l'inlandsis, qui ont apporté les plus grosses quantités de détritus terrigènes sur les marges, provoquant l'excavation énorme de certaines têtes de canyons, comme celle de Pribilov, dans la mer de Béring, qui mesure 90 kilomètres sur 30 kilomètres ;
– la subsidence des bassins, qui augmente la pente du lit et réactive son érosion ;
– la bio-érosion (souvent évoquée comme une cause non négligeable), qui se présente sous forme de griffures des fonds, de fouissages, de taraudages par le benthos.[...]
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Écrit par
- Maurice GENNESSEAUX : maître de conférences à l'université de Paris-VI-Pierre-et-Marie-Curie
Classification
Médias
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