CAPÉTIENS (987-1498)
La mise en place d'un État moderne (1314-1498)
Plus que du changement de branche dynastique en 1328, c'est de la mort de Philippe le Bel que datent aussi bien les signes manifestes de crise de la monarchie que les efforts d'adaptation du gouvernement royal à la gestion d'un État moderne. Alimenter régulièrement les finances par la levée d'impôts permanents, organiser le gouvernement et l'administration (notamment, en matière de justice, par la consolidation du Parlement), défendre le royaume grâce à une armée régulière, associer l'élite sociale du pays à l'action de la Couronne, surtout en période de difficultés, tel fut le programme de plus en plus conscient et systématique des rois capétiens et de leurs conseillers.
Mais ils se heurtèrent à une triple série de difficultés. La crise économique du xive siècle et les conséquences de la Grande Peste affaiblirent le potentiel matériel et démographique du royaume. Les luttes sociales (réaction seigneuriale, jacquerie, émeutes urbaines) entravèrent l'établissement de l'absolutisme royal. La guerre réveillée avec l'Angleterre prit la forme d'un duel engageant l'existence de la dynastie et l'indépendance de la couronne de France.
Ce n'est que dans la seconde moitié du xve siècle que la dynastie put surmonter ces épreuves : liquider à son profit la guerre de Cent Ans, vaincre les dernières résistances intérieures, favoriser la reprise économique et démographique et même, en se lançant dans l'aventure des guerres d'Italie, pénétrer du même coup dans le monde de la Renaissance.
L'action de la monarchie
Le premier problème qui se pose de façon urgente aux Capétiens après 1314, c'est celui de trouver de l'argent pour subvenir à un train royal de plus en plus fastueux, pour rémunérer fonctionnaires et soldats, de plus en plus nombreux. Entre 1332 et 1344, les recettes royales augmentent de 158 000 livres et les dépenses de 440 000 livres. Pour faire face à cet accroissement, pour financer la guerre, les Capétiens du bas Moyen Âge cherchent à remplacer l'impôt féodal extraordinaire par un impôt permanent. C'est ce que Philippe V cherche à obtenir dès 1321 d'une assemblée de barons, prélats et représentants des villes. Ces efforts se heurtèrent à la résistance opiniâtre des trois « ordres » de la société et de leurs représentants aux assemblées. De nombreux essais échouèrent entre 1315 et 1356, par exemple celui de la gabelle sur le sel, instituée en 1341, abolie à la demande des états de Paris (pour la langue d'oïl) et de Toulouse (pour la langue d'oc) en 1346. Cependant, la Chambre des comptes était organisée par l'ordonnance de Vivier-en-Brie (1320). La guerre de Cent Ans fournit à la royauté l'occasion décisive d'établir l'impôt. Ce fut fait entre 1356 et 1370 : impôts « directs » (le fouage et la taille) et « indirects » (les aides, parmi lesquelles la gabelle sur le sel reprise en 1355-1356, définitive à partir de 1383).
Ce processus ne s'accomplit cependant pas sans difficultés ni sans abandons, même de la part de la monarchie. Charles V abolit sur son lit de mort (16 sept. 1380) tous les fouages, qui ne furent rétablis qu'en 1388. En 1417, Jean sans Peur supprima également les aides dans les pays de langue d'oïl, à l'exception de ses domaines ; Charles VII les rétablit en 1436. La levée de ces impôts entraîna la création de nouveaux fonctionnaires et de nouvelles institutions : les « élus » chargés de lever les aides, les greniers à sel pour la gabelle (89 entre 1355 et 1422, 139 sous Charles VII), les « généraux » chargés d'organiser les aides et de surveiller les élus (4 à la fin du règne de Charles VII, à Tours, Montpellier, Paris et Rouen), la Chambre ou Cour des aides organisée à la fin du [...]
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Écrit par
- Jacques LE GOFF : directeur d'études à l'École pratique des hautes études
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