CARICATURE
La caricature en Occident
Les origines
Thomas Wright, qui fut, avec Champfleury, le premier historien de la caricature, donnait à cette dernière une extension très large : « Le monstrueux touche de près au grotesque, et l'un et l'autre rentrent dans le domaine de la caricature, lorsqu'on prend ce mot dans la plus large acception. » Ce point de vue permettait, grâce à une équivoque, de faire remonter l'origine de la caricature à l'Antiquité. On peut supposer que les sociétés, où la recherche des critères de la beauté était proposée comme but aux artistes, contenaient en elles la possibilité de voir naître une antithèse. Les sociétés grecque et romaine semblent avoir réuni les conditions d'une telle éclosion. Elles ont sans doute connu l'une et l'autre la caricature, fût-ce à l'état embryonnaire. La Grèce a eu un caricaturiste, Pauson, dont le nom est cité par Aristophane et Aristote. Une série de « nez » en terre cuite qui figure dans les collections du Louvre témoigne aussi en faveur de la thèse de l'existence de la caricature dans l'Antiquité. Des graffiti retrouvés sur les murs de Pompéi paraissent confirmer ce point de vue.
L'état actuel de nos connaissances et les critères retenus nous permettent de situer l'éclosion de la caricature en tant qu'expression indépendante à la fin du xvie siècle, avec les frères Carrache, Bernin et Arcimboldo.
Dans un style qui n'était guère différent de celui des créations médiévales, l'esprit de satire continuait à se manifester dans le domaine de la politique et de la religion. Il atteignit une violence aiguë dans le conflit qui opposa les catholiques fidèles à Rome aux réformateurs. Pendant cette période, les « charges » du pape et de Luther furent nombreuses. La plus célèbre, L'Âne de Melanchton, reprend une allégorie qu'un Pompéien anonyme dirigeait au Ier siècle contre les premiers chrétiens. Ce rapprochement permet d'affirmer que la satire se définit par rapport à certaines constantes thématiques, alors que la caricature se définit avant tout par rapport à des critères esthétiques.
En Angleterre
Il faudra attendre Hogarth (1697-1764) pour que la synthèse de l'esprit satirique et de la caricature se réalise définitivement. Caricaturiste des mœurs, il attaqua avec virulence les abus de son temps. Harlot's Progress, Rake's Progress, Beer Street, Ginger Lane sont ses œuvres les plus connues. Dans son Analyse du beau (1753), il affirme que le principe de la beauté réside dans la « ligne ondulée ou serpentine baptisée par lui du nom de ligne de beauté » (T. Wright). Thomas Rowlandson (1756-1827) peut être considéré comme le plus grand caricaturiste des mœurs après Hogarth, mais son œuvre est moins véhémente.
La Révolution française, l'Empire permirent à James Gillray (1757-1815) d'exercer sa verve féroce. Ses dessins d'un parti pris sans nuance sont cependant des témoignages importants dans l'histoire de la caricature parce que, pour la première fois, cette dernière y « devient une arme de la conscience nationale » (W. Hofmann). Cette conscience nationale, Gillray la flatta dans une suite de dessins à la gloire de John Bull.
George Cruikshank (1792-1878) s'éloigna de la satire politique. Il abandonna l'allusion aux événements de son temps pour développer l'aspect spatial de la caricature. Il multiplia les déformations et rechercha de nouvelles dimensions. Dans ses dessins, les têtes l'emportent souvent sur les corps, les malformations physiques se heurtent. Les monstres engendrés par son imagination donnent l'impression d'étouffer dans un espace trop étroit.
À partir de 1841, le Punch assure la continuité de la caricature anglaise avec John Leech, John Tenniel, du Maurier et, plus près de nous, David Low, Vicky[...]
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Écrit par
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