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SNOILSKY CARL (1841-1903)

Il y a d'abord, chez cet aristocrate suédois qui parcourut l'Europe en qualité de diplomate, un rêve de beauté formelle impeccable, un peu sèche et froide peut-être, qui fait irrésistiblement penser aux parnassiens français, avec lesquels il était d'ailleurs personnellement lié. Les sonnets qu'il cisèle avec un art souverain, sur des modèles italiens, espagnols ou français, comptent parmi les purs chefs-d'œuvre de forme que possède la littérature suédoise. Il s'y ajoute une élégance souveraine qui cache admirablement la virtuosité.

Mais cela n'eût pu suffire à sa gloire. Si Orkidéer (1862) et surtout Images suédoises (Svenska Bilder, 1871) sont passées à la postérité, c'est pour une raison différente : cet épicurien délicat, chantre de la joie de vivre en beauté et d'une volupté mesurée, ce raffiné qu'aurait pu guetter l'afféterie était aussi, en dépit d'une personnalité distante qui autoriserait toutes les méprises, un ami sincère du petit peuple, un partisan convaincu du libéralisme et des enseignements de la Révolution française. En sorte que, lorsqu'il cherche dans le passé de la Suède les grandes « images » qu'il tient pour susceptibles d'exalter ses compatriotes, ce n'est pas d'abord chez les grands hommes, rois ou poètes qu'il les trouve, mais chez le paysan Jerker, symbole vivant et durable de bon sens, de respect d'autrui et d'amour de la liberté non au niveau des grands principes, mais à la mesure de chacun de ses actes. En sorte que cet esthète racé dont l'œuvre aurait pu accuser fortement sa date survit par la chaleur et la sympathie qui l'éclairent.

— Régis BOYER

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Écrit par

  • : professeur émérite (langues, littératures et civilisation scandinaves) à l'université de Paris-IV-Sorbonne

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