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DEL PONTE CARLA (1947- )

Carla Del Ponte est une magistrate et une diplomate suisse de langue italienne qui a été procureure générale auprès du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) de septembre 1999 à décembre 2007, et pendant quatre années, de 1999 à 2003, auprès du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR). Elle a été membre de la Commission d’enquête internationale de l’ONU sur la Syrie de 2012 à 2017. « Jamais je n'aurais imaginé que le travail d'un procureur international serait à ce point aussi différent de celui d'un procureur national, tant les pressions et les tentatives d'ingérence des politiques furent nombreuses. » Par cette confidence livrée à l'issue de son mandat, Carla Del Ponte n’a pas hésité à lever un coin du voile sur la vie sous haute surveillance qu'elle a menée pendant plus de huit ans.

À ce poste clé au sein des deux premières instances pénales internationales (créées par le Conseil de sécurité des Nations unies en 1993 et 1994) depuis les Tribunaux militaires de Nuremberg et de Tōkyō, cette Suissesse diplômée de droit international en 1972 s'est forgée au fil des années une réputation de femme d'acier. Son rôle est déterminant dans les procès de Slobodan Milošević, le tout premier chef d'État traduit devant la justice internationale, ou dans celui de Jean Kambanda, l'ex-Premier ministre du gouvernement intérimaire du Rwanda condamné en appel à l'emprisonnement à vie pour génocide.

Née en 1947 près de Lugano, dans le canton suisse du Tessin, Carla Del Ponte est une magistrate qui parle haut et fort, y compris dans son propre pays. Jadis, elle y a recherché les comptes secrets de la mafia sicilienne cachés dans les banques helvétiques et fait cause commune avec le célèbre juge italien Giovanni Falcone. En 1988, tous deux échappent à un attentat à Palerme. Falcone meurt en 1992 dans un nouvel attentat à l'explosif commandité par la mafia. Del Ponte vit dès lors sous protection policière. Après avoir été pendant dix ans procureure du Tessin, elle est nommée en 1994 procureure générale de la Confédération helvétique et devient la première et la seule femme jamais promue à cette fonction. Elle se donne pour priorité de lutter dans le monde contre la grande criminalité et le crime organisé qui profitent du secret bancaire suisse pour blanchir l'argent sale de la drogue et de la corruption. Le Mexicain Raul Salinas, le Russe Boris Eltsine, la Pakistanaise Benazir Bhutto et le cartel colombien de Cali font partie de ses principales cibles. Tout en dénonçant la complaisance des banquiers suisses, elle réclame la modification de la législation afin de contraindre les banques à collaborer avec la justice. La Suisse s'y résoudra après son départ et ne figurera désormais plus sur les listes noires des instances policières internationales.

Carla Del Ponte a bien sûr accumulé contre elle des reproches et des haines tenaces. « Carlita la peste » pour la mafia italienne, « la nouvelle gestapo » pour les nationalistes serbes, l'empêcheuse de tourner en rond pour les diplomaties occidentales qui ont été visiblement embarrassées par certaines de ses inculpations. En 2003, son mandat au TPIR ne sera pas renouvelé, elle est évincée de son poste sous la pression du gouvernement rwandais et de Washington, opposés à ce qu'elle engage des poursuites autres que celles visant les responsables du génocide des Tutsi au printemps de 1994. Or Del Ponte estimait de son devoir de faire également la lumière sur les crimes de guerre contre les génocidaires en fuite, perpétrés par les membres de l'armée du Front patriotique rwandais qui avait mis fin au génocide.

Aux deux Tribunaux pénaux internationaux, elle ne cesse de rappeler les gouvernements à leur obligation de coopérer avec une justice internationale qui ne dispose[...]

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