FONTANA CARLO (1634-1714)
Dans la Rome de la fin du xviie et du début du xviiie siècle, Carlo Fontana occupe une place qui n'est pas sans rappeler celle d'un Jules Hardouin-Mansart en France ; c'est l'autorité suprême en matière de monuments, le chef d'un atelier important, celui entre les mains de qui toutes les affaires passent.
Né, comme son homonyme Domenico dans le Nord, près de Côme, il s'établit lui aussi à Rome vers l'âge de vingt ans. Il y fera toute sa carrière et y mourra chargé d'honneurs. La Rome où il arrive est celle où règne Bernin, et c'est dans l'atelier du maître que Fontana se forme et exécute ses premiers travaux. Mais, alors que Bernin pense toujours l'architecture en termes d'effets dramatiques, Fontana l'aborde dans une perspective qui est d'abord scénographique. On s'en rend parfaitement compte en examinant le projet de 1694 par lequel il devait achever la place Saint-Pierre. Bernin voulait ménager une entrée directe sur la place de sorte que l'on se trouvât brusquement enveloppé par le déploiement des colonnes. Le projet de Fontana, au contraire, prévoit une entrée donnant sur une première place, ouverte entre l'extrémité des deux bras de la colonnade. Le recul ainsi ménagé permet d'embrasser du regard l'ordonnance successive des espaces, mais nie la suggestion de mouvement qui était le ressort du schéma voulu par Bernin. Le style ainsi défini par Fontana va connaître une grande diffusion, grâce à l'importance de son atelier, et des architectes comme Juvarra à Turin ou Vaccarini à Catane s'en inspirent directement dans leurs compositions urbaines.
Homme de science et technicien accompli, Fontana a laissé des traités et des textes théoriques en grand nombre : sur l'histoire de Saint-Pierre, sur les inondations du Tibre, etc. Ses constructions proprement dites, sans être négligeables, restent des œuvres secondaires. La plus notable est l'église San Marcello al Corso, à Rome, avec son élégante façade incurvée aux claires articulations (1682-1683). Après l'époque de Bernin et de Pierre de Cortone, c'est un style de détente qu'il propose, dans un esprit qui s'accorde à celui que son contemporain Maratta fait triompher dans la peinture.
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Écrit par
- Georges BRUNEL : ancien élève de l'École normale supérieure, agrégé de lettres, conservateur des objets d'art des églises de la Ville de Paris
Classification
Média