CRUZ-DIEZ CARLOS (1923-2019)
Héritier des théories scientifiques de la couleur et de l'art abstrait géométrique de la première moitié du xxe siècle, le Vénézuelien Carlos Cruz-Diez est l'une des figures historiques de l'art cinétique international. Il acquit la nationalité française en 2008.
Né le 17 août 1923, Carlos Cruz-Diez se forme à l'école des Beaux-Arts de Caracas de 1940 à 1945, obtient le diplôme de professeur et commence à enseigner l'histoire des arts appliqués en 1953. Il effectue plusieurs voyages à Barcelone en 1955, puis à Paris, et retourne à Caracas en 1957 où il ouvre un centre d'arts visuels pour le graphisme et le design industriel. L’artiste se proclame « descendant direct de l'impressionnisme, du cubisme, du fauvisme et du constructivisme ». Mais ses Physichromies– présentées à la galerie Denise René qui joua un rôle clé dans la promotion de l’art cinétique – révèlent dès 1959 l'influence des théoriciens de la couleur du xixe siècle et du pointillisme, comme le savant américain Ogden N. Rood, connu des néo-impressionnistes, qui avait déjà assimilé la juxtaposition de petits points de couleurs pures au tracé de « lignes colorées très fines, parallèles entre elles, en alternant les teintes », et aboutissant à « de véritables mélanges de lumières colorées ». De fait, les Physichromies, tableaux coloristes dont la toile est entièrement ou partiellement recouverte de lamelles métalliques polychromées, modifient la perception du spectateur selon le point de vue adopté, incitant ce dernier, autrefois passif devant l'œuvre à contempler, à se déplacer devant le tableau pour observer le jeu de « couleurs virtuelles » provoqué par son propre mouvement et par l'évolution de la lumière ambiante.
En 1961, alors qu'il vit principalement à Paris, Cruz-Diez participe à l'exposition Le Mouvement, au Stedelijk Museum d'Amsterdam, puis à Humlebaek et à Stockholm. Organisée par Pontus Hulten, l'exposition réunit soixante-douze artistes, depuis les pionniers jusqu'aux contemporains. Cruz-Diez réalise en 1964 les Chromointerférences, superposant les trames de lignes parallèles qui, selon le mouvement du spectateur, induisent de nouvelles variations chromatiques. Il participe à l'exposition Mouvement 2 (galerie Denise René, Paris, 1964) et compte parmi la centaine d'artistes de l'importante exposition itinérante The Responsive Eye, dont la première étape a lieu au Museum of Modern Art de New York en 1965.
Pénétré, comme nombre de ses contemporains, par la question de la synthèse des arts, il crée les Chromosaturationsen 1965, habitacle artificiel coloré destiné à accueillir le spectateur et mettre en évidence « la réalité autonome » de la couleur dans l'espace et dans le temps. Étendant ses recherches au domaine public, il installe au carrefour de l'Odéon une chromosaturation (L'Art dans la rue, 1969) et réalise de nombreux projets d'intégration architecturale au Venezuela (Environnement chromatique, hall de l'aéroport international Simón-Bolívar, Maiquetia, 1974 ; Physichromie Orange, Valencia, 2002), en Suisse (Environnement chromatique, siège de l'Union des banques suisses, Zurich, 1975-1979), en France (Physichromie, passerelle de la gare de Saint-Quentin-en-Yvelines, 1980), au Portugal (induction du jaune, Santo Tirso, 2001) et en Corée (Spirale d'induction chromatique, Korean Folk Village, 2002). Il publie un recueil de textes théoriques intitulé Réflexion sur la couleur (1989). Le Museum of Fine Arts de Houston présente, en 2011, Carlos Cruz-Diez. Color in Space and Time, une rétrospective de son œuvre.
Carlos Cruz-Diez meurt à Paris, le 27 juillet 2019.
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Écrit par
- Cécile GODEFROY : enseignante, chercheuse associée, historienne de l'art
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