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CARNAVAL

Tendances contemporaines

Phénomène récent et étonnant, les carnavals afro-américains ont suscité un renouveau des carnavals européens, voire une complète renaissance, en particulier dans l'Europe du Nord, où le protestantisme les avait complètement éliminés. Autre tendance récente notable, l'organisation de fêtes et de parades urbaines pour des fins des plus diverses – intégration sociale de communautés différentes, promotion touristique et commerciale, développement des spectacles de rue professionnels –, est beaucoup plus débattue du fait de ses prétentions à l'appellation de carnaval, et de la confusion des genres qui peut s'ensuivre.

Tropicalisation des carnavals européens

Alors qu'il existait une tradition du carnaval d'hiver autour du cycle des douze jours (entre Noël et l'Épiphanie), notamment en Scanie, les sorties de masques du douzième jour, et les fêtes de Carême en Suède, la conversion des pays scandinaves au protestantisme entraîna la disparition de ces carnavals entre le xvie et le xviie siècle. Mais au début des années 1980 réapparaissent dans le nord de l'Europe, en Scandinavie et aux Pays-Bas, des carnavals de printemps ou d'été qui s'inspirent des écoles de samba de Rio, du frevo de Recife, des steels-bands de Trinidad. La fin du xxe siècle connaît ainsi une floraison d'écoles de samba aux Pays-Bas et en Scandinavie, sans compter les pays d'Europe de l'Est.

L'utilisation du terme carnaval en dehors de la période hivernale n'est donc pas issue de la tradition, mais elle est influencée par les carnavals tropicaux, qui servent de modèles pour fêter l'arrivée du soleil et de l'été. Ainsi, à Aalborg et Copenhague au Danemark, à Göteborg en Suède, des carnavals surgissent autour de la période de Pentecôte, pour célébrer la fête du Soleil et l'arrivée prochaine de l'été. La fin de l'été est aussi bien célébrée que son début, avec les carnavals de Stockholm et Norrköping en Suède, ainsi que dans d'autres villes en Finlande et en Norvège.

L'autre « carnaval d'été », celui de Notting Hill à Londres, se déroule le dernier week-end du mois d'août, lors du bank-holiday dans le quartier londonien de Portobello. Il a été entièrement créé à la fin des années 1960 par la communauté antillaise catholique venue de Trinidad. Comme les Noirs brésiliens des ranchos de Rio au siècle précédent, la communauté caribéenne a peu à peu conquis la rue et l'espace carnavalesque, avec ses mas, bandes aux costumes géants somptueux et magiques, ses steels-bands et ses sound-systems. Ce carnaval est devenu l'un des plus importants carnavals européens par la participation et la fréquentation populaire, toute appartenance « ethnique » confondue.

Celui de Tenerife, capitale des îles Canaries, est le plus grand carnaval d'Espagne, un carnaval étonnant, époustouflant par son rythme, sa diversité, sa conjugaison réussie des traditions des carnavals anciens de la péninsule Ibérique, comme le spectaculaire « enterrement de la sardine » et l'apport de nouveautés latino-américaines sous l'influence d'émigrés canariens, revenus au pays dans les années 1960, après un passage en Amérique du Sud.

Parades et défilés multiculturels

Après la décennie de 1980, qui a vu arriver en Europe, Scandinavie, Pays-Bas, Allemagne (à Berlin) une tropicalisation de carnavals calqués sur les écoles de samba ou les steel bands et les mas de Trinidad (grands groupes avec des costumes et marionnettes géantes créées par de talentueux artistes plasticiens comme Peter Minshall) et surtout Notting Hill, la décennie des années 1990 voit surgir un nouveau concept multisocioculturel qui essaie de conjuguer à la fois la démonstration des diversités culturelles, l'appropriation (ou l'intégration) de la cité, le temps[...]

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Écrit par

  • : présidente de Carnaval sans frontières, ancien expert-consultant auprès de l'U.N.E.S.CO. pour les carnavals, D.R. en histoire (université de Nice), D.E.S.S. en psychologie sociale et clinique (université de Nice)

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Carnaval de Venise - crédits : Salih Külcü/ Panther Media/ Age Fotostock

Carnaval de Venise

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