REED CAROL (1906-1976)
Ancien acteur, secrétaire et conseiller théâtral de l'infatigable romancier Edgar Wallace, Carol Reed débute au cinéma comme assistant de David Lean, puis dirige de 1942 à 1945 l'Army Film Unit. À la tradition quasi légendaire du documentaire britannique, à la fois objectif et soigné, Reed ajoutera d'évidence la vision des films expressionnistes allemands, mais aussi des bandes scandinaves, françaises et plus tard américaines. Les éclairages et la tendance mystique des premières, le « réalisme poétique » des secondes, la vivacité technique des troisièmes trouvent en Graham Greene le littérateur qui permet à Reed d'aborder sa carrière spécifique. Celle-ci se résume en quelques titres : Sous le regard des étoiles (1939) ; Huit Heures de sursis (1947), dont l'invraisemblance est sauvée par deux acteurs que le film révéla (James Mason et Robert Newton) ; Première Désillusion (1948) ; Le Troisième Homme (1949). Il est difficile de savoir quelle est la part d'Orson Welles, interprète principal et pour un temps bénéficiaire de ce salmigondis symbolique, dont l'efficacité fut d'ailleurs certaine et sanctionnée par une pluie de récompenses. L'antinazi convaincu qu'était Reed concocte ici une parabole humanitaire qui s'achève, grâce à un air de cithare destiné à faire le tour du monde, sur un éloge des amitiés perdues présenté d'une façon qui laisse le dernier mot à un criminel de guerre. Le succès du film fut maléfique à son auteur : après une très pesante adaptation de Conrad (Le Banni des îles, 1951), il s'essaya désespérément à retrouver la recette policière du Troisième Homme. Notre Agent à La Havane (1959) ne fait que rassembler le « gratin » de la scène anglaise, dominé par Noël Coward, dans un « cinémascope » où Reed se montre d'une incroyable maladresse. Chose curieuse : de ces dernières mornes productions, la seule à retenir serait la plus hollywoodienne, L'Agonie et l'Extase (1965), biographie très adoucie mais non inexacte de Michel-Ange. L'abdication que représente la carrière de Carol Reed est moins rare qu'on ne croit, mais son obstination à poursuivre un certain genre de situation (l'homme pris entre deux feux) révèle peut-être un drame secret.
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Écrit par
- Gérard LEGRAND : écrivain, philosophe, critique d'art et de cinéma
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Médias
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