CARTE POSTALE
L'âge d'or de la carte postale illustrée
Au moment de l'Exposition universelle de 1900, des millions d'exemplaires de cartes vues et de cartes fantaisies ont été fabriquées et vendues. L'histoire de la carte postale va de pair, comme celle de l'affiche, avec les développements techniques de l'impression en nombre et de la photographie. La phototypie en particulier, qui permet la réalisation de tirages importants et bon marché, a remplacé très vite la lithographie, la similigravure, l'estampage et le coloriage, dit au patron. Des ateliers se spécialisent, se transforment et s'organisent pour répondre à la demande grandissante du public. C'est ainsi que, en 1905, les maisons Bergeret et Humblot de Nancy, qui ont fusionné avec la maison Helminger pour devenir les Imprimeries réunies, fabriquent à elles seules 90 millions de cartes postales par an, soit un cinquième de la production française de l'époque. La même année, lors du carnaval de Paris, un char était consacré à la carte postale illustrée, signe évident de sa popularité. « Collectionnez les cartes postales », conseillait le ministre des P.T.T. au tout début du siècle, et un numéro spécial du Figaro, consacré en octobre 1904 à la carte postale illustrée, en donnait la définition suivante : « L'infini kaléidoscope où peuvent se refléter autant d'aspects qu'en présentent, qu'en présentèrent et qu'en présenteront la nature et l'humanité. »
Ce « trésor de rien du tout », comme l'écrivait Paul Eluard, a en effet, dans le premier quart du xxe siècle, exploré tous les sujets. Les frères Neurdein, qui sont photographes éditeurs à Paris et de plus concessionnaires pendant plus de dix ans de l'exploitation des clichés photographiques du service des Monuments historiques, seront les spécialistes de la carte vue de monuments. Les clichés, réalisés par Atget et Melville qui travaillèrent au recensement des monuments et lieux historiques de la capitale, seront édités en cartes postales. Pour l'homme de la rue, la carte postale rend compte du réel, et le photographe reporter véhicule à travers le petit rectangle de carton blanc la chronique d'une époque. Ainsi les vues de la série Paris vécu, éditée en 1900 : stations d'omnibus, marchands de coco, mendiants à la sortie des églises, aveugle sur le pont des Arts, sortie de métro, soupe populaire, sont aujourd'hui pour l'historien, le sociologue ou l'ethnologue une source de première importance. Témoin privilégié de son temps, la carte postale parle de l'affaire Dreyfus, de la bande à Bonnot, d'une course automobile, des luttes de la classe ouvrière, des colonies, de la vie militaire et des faits de guerre. En studio, le photographe refait l'histoire à sa façon, telle cette série sur la vie de Jeanne d'Arc, fait poser des couples d'amoureux ou immortalise le visage des célébrités. C'est le début du star-système. Souvenirs de vacances, vœux de bonheur, poissons d'avril : des créateurs anonymes déploient des trésors d'invention et d'imagination, et le public achète.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Maïten BOUISSET : critique d'art
Classification
Autres références
-
PHILATÉLIE
- Écrit par Jacques HANOUNE
- 7 046 mots
- 1 média
...(P.A.P.). Analogues aux « entiers postaux » classiques, ils s'en distinguent par une très grande variété de présentation ou d'emploi. Il s'agit de cartes postales ou d'enveloppes, préaffranchies par des vignettes imprimées sans désignation de valeur et donc à validité illimitée. On distingue... -
PHOTOGRAPHIE AFRICAINE
- Écrit par Vincent GODEAU et André MAGNIN
- 4 849 mots
- 2 médias
Si la musique, la danse, la littérature, le théâtre, le cinéma et les arts plastiques africains sont depuis longtemps reconnus, ce n'est qu'en 1993, grâce à la consécration internationale du Malien Seydou Keïta, que l'Occident découvrit la photographie africaine. Pourtant, celle-ci...