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CARTÉSIANISME

Le cartésianisme désigne d'abord la philosophie de René Descartes (1596-1650) avant de s'appliquer et de s'étendre à ses successeurs immédiats et, au-delà, aux philosophes qui se réclament de lui, même si le contenu et le style de leurs doctrines diffèrent sensiblement de ce qui caractérise sa pensée, ou du cartésianisme original.

Une pensée inaugurale

Quoique de taille relativement modeste, l'œuvre de Descartes s'étend à de très nombreux sujets. Elle a exercé une influence considérable sur la philosophie moderne et contemporaine dont elle est indiscutablement à l'origine, toutes tendances confondues. Car, à la différence des philosophies de ces trois derniers siècles, la philosophie cartésienne s'est engagée simultanément dans la voie de la philosophie première ou métaphysique et dans celle de la science, et même de presque toutes les sciences connues au temps de Descartes : mathématiques, physique, médecine (anatomie, physiologie). Le cartésianisme peut même se confondre d'abord et primordialement avec l'esprit scientifique : chez lui, la recherche de la certitude et de l'exactitude dans tous les domaines de la connaissance va de pair avec le rejet des manières de pensée historiques, comme le commentaire et l'interprétation indéfinis des œuvres philosophiques passées, ou trop exclusivement spéculatives, comme celles des philosophes qui croient encore pouvoir « dire » la vérité, sans devoir faire des expériences ni apporter des preuves de ce qu'ils avancent.

La première grande idée de la philosophie cartésienne, consignée dans les Règles pour la direction de l'esprit (1684 et 1701), un ouvrage inachevé et retrouvé après la mort de son auteur, est celle de la méthode : avant toute étude d'un domaine ou d'un problème particulier, il faut se donner une méthode qui trace la voie à suivre et délimite le cadre dans lequel doit s'effectuer la recherche. La méthode tient dans ces « règles pour la direction de l'esprit » que Descartes ramènera à un petit nombre de préceptes lorsqu'il exposera son vaste projet dans le Discours de la méthode (1637). Le philosophe a attendu de pouvoir présenter au public les échantillons ou les applications de cette méthode pour en exposer les grandes lignes dans cet ouvrage, qui n'était à ses yeux qu'une Préface aux trois traités ou essais qui l'accompagnaient : la Géométrie, la Dioptrique, les Météores.

La veine proprement scientifique qui marque l'œuvre de Descartes ne cessera jusqu'à la fin d'alimenter sa pensée, même si celle-ci s'est également attachée à poser et résoudre des questions d'ordre métaphysique en s'efforçant d'y observer la même rigueur que dans les autres sciences, et d'atteindre à une certitude au moins égale à celle des mathématiques. Il démontrera dans les Méditations métaphysiques (1640 en latin, 1641 en français), l'une des plus grandes œuvres de toute la philosophie, que la connaissance par le moi, considéré comme chose qui pense, de sa propre existence (Cogito, sum : « je pense, je suis ») est la plus certaine de toutes les connaissances humaines, que l'âme ou l'esprit est réellement distinct du corps et que l'existence de Dieu peut être certainement déduite de l'idée d'infini que l'esprit en a en lui.

Dans les années qui suivent, Descartes va s'appliquer davantage à l'étude de l'homme, c'est-à-dire de l'union de l'âme et du corps, et de leur interaction. Ce qui l'amène à développer des considérations morales en même temps qu'il approfondit l'étude des passions exposée dans Les Passions de l'âme (1649), le dernier ouvrage qu'il publie quelques mois seulement avant d'aller mourir en Suède. C'est alors que commence le cartésianisme,[...]

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