CARTHAGE
Fondée par les Phéniciens au ixe siècle avant Jésus-Christ selon les uns, au viiie selon les autres, Carthage tira longtemps sa prospérité de ses relations commerciales avec les divers peuples de l'Afrique septentrionale et de la Méditerranée occidentale.
Ses tentatives d'expansion territoriale en Sicile devaient l'entraîner dans de graves conflits, avec les Grecs d'abord, de 480 à 264 avant J.-C., puis avec les Romains, de 264 à 146 avant J.-C. Ces luttes devaient prendre fin avec la destruction complète de la ville et avec l'annexion de son territoire à l'ager publicus de Rome. L'établissement d'une colonie romaine sur le site de Carthage fut l'objet des revendications du parti populaire. La victoire de César allait aboutir à la reconstruction de la ville, en 44 avant J.-C. Carthage redevient, sous Auguste, la cité la plus prospère d'Afrique ; elle rivalise bientôt avec Rome par la splendeur de ses monuments. Cette prospérité cependant ne devait pas survivre aux troubles sociaux et religieux qui marquèrent, au ive siècle après J.-C., l'histoire de l'Afrique romaine. Pillée par les Vandales en 440 et reconstruite par Justinien, Carthage sera finalement anéantie par les Arabes en 698.
Kart Hadasht, la « Ville neuve »
Carthage est située au fond du golfe de Tunis, sur une presqu'île baignée à l'est par la mer, au sud par le lac de Tunis, au nord par la sebkha el-Riana qui formait jadis le fond du golfe d'Utique avant qu'il ne soit comblé par les alluvions de la Medjerda. Des collines disposées en arc de cercle dominent la ville à l'ouest ; sur la plus méridionale se dressait la citadelle de Byrsa, les autres abritaient des nécropoles. Au-delà, vers Sidi bou Saïd et La Marsa, s'étendait une banlieue nommée Megara.
Les origines de la cité
Selon une tradition transmise par Timée et reprise par Justin, Carthage aurait été fondée vers 814 avant J.-C. par Elissa ou Didon, sœur du roi de Tyr, Pygmalion, accompagnée de notables tyriens fuyant leur patrie et de Chypriotes. L'historien juif Josèphe, citant Ménandre, Grec d'Asie qui avait consulté les Archives royales de Tyr, rapporte l'événement à Elissa et le situe entre 825 et 819. Mais il est impossible de démontrer que ces deux récits sont indépendants l'un de l'autre, aussi leur valeur probante demeure-t-elle incertaine. Le monument phénicien le plus ancien trouvé à Carthage est une chapelle votive sise au tophet de Salammbô ; on peut la dater, par la céramique grecque placée dans un dépôt de fondation et accompagnant les offrandes sacrificielles, aux environs de 725 avant J.-C. Les tombes puniques connues ne sont pas antérieures à la fin de ce siècle. Aussi, plusieurs savants (notamment Rhys Carpenter) rejettent la tradition littéraire et s'appuient sur ces documents archéologiques pour dater la fondation de la cité du milieu du viiie siècle. Des sondages profonds réalisés dans la plaine littorale située au pied de Byrsa permettent de démontrer l'existence d'un habitat archaïque datant de la première moitié du viiie siècle avant J.-C.
Nous ne savons pratiquement rien de la Carthage des viiie et viie siècles avant J.-C., si ce n'est qu'elle vivait de cabotage, importait tous les produits fabriqués et avait pour dieu tutélaire Baal Hammon, le El phénicien, assimilé plus tard à Kronos et à Saturne. C'est à lui qu'étaient voués les enfants qu'on brûlait vifs en sacrifice (molek), pour assurer vie et prospérité à la cité, en son tophet de Salammbô. Un siècle et demi après la fondation de la ville, les Carthaginois s'installent à Ibiza (Baléares). Dès le milieu du vie siècle, la ville est gouvernée par des rois appartenant à la famille des Magonides. Alliée aux Étrusques, elle domine la Sicile du Sud-Ouest, prend pied[...]
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Écrit par
- Abdel Majid ENNABLI : maître de recherches à l'Institut national d'archéologie et d'art de Tunisie, conservateur du musée et du site de Carthage
- Liliane ENNABLI : chargée de recherche au C.N.R.S.
- Gilbert-Charles PICARD : professeur à l'université de Paris-IV-Sorbonne
- Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
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