CASONA ALEJANDRO RODRIGUEZ ALVAREZ dit ALEJANDRO (1903-1965)
Dramaturge espagnol. Né dans un village des Asturies, il tire son pseudonyme de la maison (casona) de son enfance. Instituteur dans le val d'Aran, il découvre la valeur pédagogique de la poésie et du théâtre. Sous la IIe République, il est directeur du théâtre des Misiones pedagógicas qui, à l'instar de La Barraca, animée par Federico García Lorca, s'adressait au public populaire. En 1934, la Sirena varada (prix Lope de Vega) obtient un triomphe. À partir de 1937, Casona réside en Argentine. Avec Rafael Alberti, Max Aub, Pedro Salinas, il représentera le théâtre espagnol de l'exil. À son retour en Espagne, en 1962, son succès ne se dément pas ; mais, désormais, il reçoit un accueil mitigé, célébré par les uns, durement attaqué par la nouvelle critique.
Alejandro Casona est l'auteur de vingt-quatre pièces de théâtre. Il se situe dans la lignée du drame psychologique de G. Martínez Sierra et Jacinto Benavente. Mystère, lyrisme symbolique, mélange de réalisme et de fantaisie, d'humour et de profondeur : voilà quelques traits de ce théâtre à la fois poétique et tragique, auquel on a reproché son manque de vigueur ou de puissance. S'il a pu jouir en son temps d'une gloire éclatante, le théâtre de Casona connaît aujourd'hui un déclin évident ; on en prend la mesure si on le compare au théâtre, contemporain, de Federico García Lorca.
La Sirena varada (La Sirène enlisée) fut représentée par la Compagnie de Margarita Xirgu. Une jeune fille à l'esprit égaré, réapparaissant alors qu'on la croyait morte, est l'héroïne de cette comédie dramatique qui se déroule dans un manoir perdu au bord de l'océan. « Que nul n'entre ici qui sache la géométrie » : cette inscription à l'entrée du manoir pourrait servir à toutes les mises en scène de Casona, toujours épris de liberté ou d'extravagance. L'héroïne de Nuestra Natacha (1935) est l'ancienne pensionnaire d'une maison de correction. Devenue docteur ès sciences de l'éducation, elle veut appliquer des principes d'éducation qui seront en butte à l'incompréhension et à la routine. Cette pièce d'intention politique suscita de très violentes protestations des milieux réactionnaires et bien-pensants. La Dama del alba, 1944 (La Dame de l'aube) reste l'œuvre la plus représentative de Casona. Ce drame d'amour et de mort est centré sur Angélica, jeune femme que l'on croit noyée, mais qui s'est enfuie avec son amant. Dans la famille en deuil, Adela réussit à se faire admettre et à prendre la place de la disparue. Angélica accepte alors la proposition de la Mort : mourir en effet pour garder intacte sa réputation de femme fidèle et ne pas détruire le bonheur qui se reconstruit après elle. L'atmosphère de légende, les tonalités lyriques et tragiques, la beauté poétique des répliques, la vérité des sentiments, le rythme musical de l'action sont les qualités majeures de ce poème dramatique. Ici encore, l'auteur s'emploie à exorciser les tabous ou les préjugés de la société. La production dramatique d'Alejandro Casona n'évolue guère au cours des années ; elle garde toujours ce caractère d'irréalité, un peu artificiel, admiré en son temps, mal reçu aujourd'hui. Parmi ses pièces les plus célèbres, on retiendra surtout : Prohibido suicidarse en primavera, 1943 (Interdit de se suicider au printemps) ; La Barca sin pescador, 1945 (La Barque sans pêcheur) ; Los árboles mueren de pie, 1949 (Les arbres meurent debout) ; El Caballero de las espuelas de oro, 1964 (Le Gentilhomme aux éperons d'or).
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Écrit par
- Bernard SESÉ : professeur émérite des Universités, membre correspondant de la Real Academia Española
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