- 1. Les États caspiens au centre des enjeux énergétiques
- 2. Le désenclavement de la Caspienne en matière d'énergie
- 3. La nouvelle Route de la soie : un programme transcontinental ambitieux
- 4. La Turquie, l'acteur principal du deuxième cercle
- 5. Les États-Unis et l'Union européenne : deux acteurs majeurs du troisième cercle
- 6. L'intérêt grandissant de la Chine pour le bassin caspien
- 7. Un rapprochement russo-iranien sur fond d'isolement international de l'Iran
- 8. Différentes approches de l'intégration postsoviétique
- 9. Bibliographie
CASPIENNE, géopolitique
Un rapprochement russo-iranien sur fond d'isolement international de l'Iran
Le démembrement de l'URSS et la distance créée avec la Russie par les indépendances de l'Azerbaïdjan et du Turkménistan ont changé la donne régionale pour l'Iran. Soulagé du recul géographique russe, Téhéran pourrait se rapprocher à nouveau de la zone qui faisait partie jadis de sa sphère d'influence et pour laquelle il représentait un pôle d'attraction ethnoculturel.
Au début des années 1990, la Russie était inquiète de la propagation des idées islamistes et de l'exportation de la révolution iranienne sur les territoires de ses anciens satellites, voire de ses sujets musulmans. Or le militantisme chiite n'a pas trouvé d'audience dans des sociétés dotées d'un niveau relativement élevé de laïcisation. En même temps, l'Iran était en quête de partenaires pour contrebalancer ses relations tendues avec la plupart de ses voisins. La rivalité régionale avec la Turquie date de plusieurs siècles. La mémoire de la guerre avec l'Irak (1980-1988) est encore fraîche. Compte tenu du bras de fer du régime iranien avec l'Occident, une implication de l'Azerbaïdjan dans l'éventuelle déstabilisation de l'Azerbaïdjan iranien, orchestrée par les États-Unis, reste possible. En 1992-1993, l'Azerbaïdjan a lancé plusieurs appels pour la réunification des deux Azerbaïdjans ; de nos jours, ce risque s'est éloigné, car les Azéris iraniens occupent des positions dominantes dans la société. L'Iran conteste toujours à l'Azerbaïdjan la propriété de quelques gisements en mer Caspienne. De plus, il reproche à Bakou son étroite coopération avec les États-Unis et l'OTAN, à proximité immédiate de ses frontières. Tout cela a poussé Téhéran à mener une politique plutôt pro-arménienne et à soutenir l'opposition azerbaïdjanaise. À l'est, le territoire de l'Afghanistan se trouve sous contrôle total des Occidentaux, hostiles à l'Iran. En cultivant ses relations avec la Russie, ce dernier a su garder une quasi-neutralité lors de la guerre en Tchétchénie. Il a également reconnu les droits spécifiques de la Russie dans son étranger proche. Ainsi, pour briser son isolement international lié à la reprise de son programme nucléaire, l'Iran espère pouvoir compter sur Moscou, mais aussi sur Pékin, avec qui il n'a pas d'antagonismes majeurs.
En dépit de l'embargo occidental, la Russie a déployé une coopération économique d'envergure avec l'Iran : construction de centrales thermiques, d'une usine métallurgique à Ispahan, de la centrale nucléaire de Bouchehr (2010) ; acquisition de parts dans le secteur gazier national ; signature de contrats de plusieurs milliards de dollars dans le domaine militaire ; vente d'équipements et de technologies. Malgré cela, la coopération bilatérale reste modeste : en 2009, les échanges commerciaux ne représentaient que 3 milliards de dollars. D'un côté, Moscou ne souhaite pas provoquer les États-Unis, de l'autre, les avis sur un rapprochement russo-iranien sont partagés au sein même de l'élite politique russe. Pour les uns, la coopération avec l'Iran et les pays arabes permettrait à la Russie de redevenir une grande puissance. Pour les autres, vu que l'Iran ne tombera jamais dans l'orbite russe, rien ne sert de mettre en péril les relations avec l'Occident. Ainsi, la coopération russo-iranienne reste circonstancielle et conditionnée par un contexte international particulier et par une opposition commune à l'Occident. En cas de normalisation des relations irano-occidentales, la Russie pourrait être facilement remplacée et ses atouts ne pèseraient pas lourd.
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Écrit par
- Garik GALSTYAN : maître de conférences en civilisation russe et soviétique, université de Lille-III (U.F.R. des langues étrangères appliquées)
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