CATALOGNE
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La littérature catalane
La féodalité et ses formes d'expression
Les couches cultivées de la société féodale ont produit et consommé, en Catalogne comme partout ailleurs en Occident, une littérature en langue latine. Elles n'ont utilisé la langue quotidienne, la seule comprise par la grande masse de la population, que lorsqu'elles ont éprouvé le besoin de mettre à la portée de cette masse les idées et les lois qui devaient la gouverner. C'est ainsi que, dès le ixe siècle, il a dû exister une prédication en catalan primitif de l'époque, mais, à cause de son caractère utilitaire, elle n'a jamais été écrite ou, si elle l'a été, elle n'est pas parvenue jusqu'à nous. En fait, le premier texte de ce genre qui nous ait été conservé, les Homilies d'Organyà, est considérablement postérieur, de la fin du xiie siècle ou du début du xiiie. Il a dû y avoir également, depuis des temps très reculés, des traductions en langue vulgaire de certains textes juridiques. Le Forumjudicum, par exemple, fut mis en un catalan assez bien construit vers la première moitié du xiie siècle ; les Usatici, un siècle plus tard. D'ailleurs, dès les origines de la langue, la population a dû chanter des chansons et conter des légendes sur des sujets divers, dans les circonstances les plus variées de la vie de tous les jours ; elle a dû écouter, sur les places et dans les rues, les narrations que composaient et récitaient les jongleurs. Cette littérature orale s'est perdue. Depuis le deuxième tiers du xie siècle toutefois, il existait déjà une littérature savante et profane dans une langue vulgaire qui n'était pas celle qu'on employait dans la vie courante, mais une autre qui jouissait déjà ou devait bientôt jouir d'un très grand prestige : le provençal des troubadours. On suppose que la Chansó de Santa Fe fut écrite par un anonyme catalan de Saint-Michel-de-Cuxa ou de Saint-Martin-du-Canigou, vers 1054-1076. Depuis le milieu du xiie siècle et jusqu'au milieu du xiiie, la production de toute une constellation de poètes catalans a constitué un apport original à la poésie des troubadours. Une grande partie de ces poètes, Guilhem de Berguedà et le roi Alphonse le Chaste par exemple, ont adopté les attitudes et les techniques du trobar leu ; d'autres, tels que Cerverí de Girona, les ont fait alterner avec celles, plus précieuses, du trobar ric. La poésie narrative des auteurs cultivés, celle de Ramón Vidal de Besalú ou celle du Jaufré anonyme, fut également écrite en provençal et selon les règles des troubadours et de l'amour courtois.
Chevaliers et bourgeois
Vers la seconde moitié du xiiie siècle, une nouvelle classe, la bourgeoisie, qui était née à la faveur de la crise de la féodalité et de l'expansion progressive de ce qu'on a appelé la révolution mercantile, acquit une influence qui se fit de plus en plus décisive sur la marche du pays. Elle a remis en question les formes culturelles et linguistiques en vigueur jusqu'alors. Le latin a commencé à perdre du terrain en tant que langue unique de culture dans les milieux dirigeants ; en même temps s'est produite une division que nous pourrions schématiser ainsi : la poésie lyrique, encore très liée à la noblesse, demeure fidèle à l'orthodoxie des troubadours ; la prose, adressée à un public plus vaste, élabore des formes d'expression qui lui sont propres. Ainsi, les théoriciens et les poètes de la fin du xiiie siècle et d'une bonne partie du xive ont écrit dans un provençal plus ou moins correct et ont insisté sur les attitudes et les techniques des troubadours classiques ou, tout au moins, de leurs épigones de l'école de Toulouse. Il faut signaler les vers moraux du curé de Bolquera, ramassés et dramatiques, et quelques recréations savantes sur des thèmes populaires contenues dans le Cançoneret de Ripoll. Les chroniqueurs et les réformateurs religieux qui essaient de trouver des solutions d'urgence aux problèmes posés par les grandes concentrations urbaines et par la nouvelle stratification sociale vivent plus en accord avec leur temps et travaillent avec des idées et des formes plus originales. La chronique de Jacques le Conquérant, par exemple, inspirée par le roi et rédigée par plusieurs subalternes, est une longue confession pleine de couleur ; celle de Bernat Desclot, plus sobre et plus nuancée, est un vrai témoignage sur le règne de Pierre le Grand ; celle de Ramón Muntaner, dynamique et passionnée, trouve parfois un vrai souffle épique ; celle de Pierre le Cérémonieux, dictée par lui et écrite par une équipe de fonctionnaires, constitue une vaste justification des ambitions politiques de ce roi.
Les réformateurs religieux ont mêlé le témoignage personnel et critique à la vision utopique. Arnau de Vilanova écrivait des traités apocalyptiques dans une prose aussi incisive que savoureuse et Ramón Llull ( Raymond Lulle) mettait en jeu toutes les formes dont il disposait pour accomplir son grand dessein : reconstruire le monde tout entier, celui des chrétiens et celui des infidèles, à l'image et à la ressemblance de Dieu.
Le Siècle d'or de la littérature catalane
Des vingt dernières années du xive siècle au début du xvie siècle, la littérature catalane vit une de ses époques les plus complexes et les plus brillantes. On passe, en effet, de conceptions féodales et théocratiques à un rationalisme bourgeois ; on quitte un monde encore tout rempli des influences et des échos de la chevalerie pour arriver aux prémices de la Renaissance ; un idiome encore primitif et, dans le cas des poètes, artificiel, fait place à une langue pleinement établie, élégante et pure.
Quelques auteurs, formés sous le règne de Pierre le Cérémonieux, assurent la survivance de l'idéologie médiévale et de toutes ses ressources expressives : tel est, par exemple, le cas de Francesc Eiximenis, qui écrit une vaste et vivante compilation de tout le savoir chrétien, ou celui de saint Vincent Ferrer, prédicateur passionné et habile.
Des esprits plus jeunes et plus libres, toutefois, remettent en question les traditions qui leur pèsent. Anselm Turmeda, personnage énigmatique, quitte l'habit franciscain, embrasse l'islam – sans peut-être s'y être authentiquement converti – et adopte finalement une attitude de scepticisme corrosif. Bernat Metge, rationaliste et sceptique lui aussi, réussit à donner une forme aux inquiétudes qui étaient déjà dans l'air et, sous l'influence des classiques latins et italiens, de Cicéron et de Pétrarque surtout, pose les assises de l'humanisme catalan. Son ouvrage, Lo Somni, est peut-être le plus significatif de ce mouvement tout entier, car la plupart des humanistes catalans (Antoni Canals, Ferran Valentí, Francesc Alegre, Joan Roís de Corella) se sont bornés à traduire, à recréer ou à imiter les classiques. Petit à petit, toutefois, les humanistes les plus doués ont commencé à délaisser la langue vulgaire pour la latine, plus parfaite et plus prestigieuse : Joan Margarit et Jeroni Pau, au xve siècle et, au xvie, Joan Lluís Vives et Pere Galès ont écrit presque toute leur œuvre en latin.
La poésie lyrique, tout en restant attachée aux procédés des troubadours, tend déjà à italianiser les attitudes et à catalaniser la langue. Andreu Febrer écrit la première traduction au monde de La Divine Comédie. Ausiàs March, dans des vers durs et profonds, nous donne une vision saisissante de l'homme torturé par le doute et l'idée de la mort, il crée une imagerie originale et vigoureuse et emploie un catalan exempt de provençalismes. Les poètes de la seconde moitié du xve siècle ont suivi tour à tour l'influence des troubadours et d'Ausiàs March, celle des Français et celle des Italiens (Bernat Hug de Rocabertí, Pere Torroella...), mais ils ont chanté aussi, avec passion, les grands événements de la politique de l'époque (Francesc Ferrer, Pere Martinez...) ou, avec réalisme et sens critique, les petites misères de la vie de tous les jours (Jaume Gassull, Bernat de Fenollar...). Joan Roís de Corella, le dernier grand poète classique, a mêlé une interprétation personnelle et réaliste de l'amour et des attitudes et des formes révélant déjà un lien avec la Renaissance. La poésie narrative des lettres a en général habilement repris les thèmes arthuriens ou les lieux communs de l'amour courtois (La Faula de Guillem de Torroella), tandis que la poésie populaire, plus libre et plus rationaliste, a produit une suite d'ouvrages satiriques fort intéressants (Disputació d'En Buc e son cavall). L'Espill de Jaume Roig s'insère dans le courant misogyne de l'époque et constitue, en fait, un témoignage coloré sur la vie populaire. La prose narrative, variée mais manquant peut-être un peu de relief, donne, vers le milieu du xve siècle, deux grands romans de chevalerie : Curial e Güelfa, dont nous ne connaissons pas l'auteur, et Tirant lo Blanch de Johanot Martorell. Tous les deux traitent leur sujet d'une manière réaliste mais, tandis que le premier fait siennes certaines ambitions de la noblesse, incorpore des éléments du roman sentimental et prend quelque peu des allures de récit mythique, le second, davantage lié aux inquiétudes de la bourgeoisie, tend à bâtir une vision dynamique et positiviste du monde. Tirant est le premier roman réellement moderne, ainsi que le reconnut, parmi d'autres, Cervantès.
Au cours du xive et du xve siècle, apparaît un nouveau genre, le théâtre ; né de la liturgie chrétienne, il admet petit à petit une thématique profane. Mais nous n'avons sur lui que des documents rares et fragmentaires.
Renaissance et classicisme
Du début du xvie siècle au début du xixe, le développement de nombreux secteurs de la littérature catalane a été paralysé par une carence d'auteurs et de lecteurs due à une série d'événements qui se succèdent et s'enchevêtrent : l'union des terres catalanes et castillanes sous les Rois Catholiques ; le déplacement de la Cour au centre de la Péninsule ; l'émigration d'une bonne partie de la noblesse catalane et, ensuite, son ralliement au dessein impérial de Charles Quint et de Philippe II ; le glissement des intérêts économiques de la Méditerranée vers l'Atlantique ; l'esprit conservateur acquis par la bourgeoisie commerçante ; les guerres contre la Castille, les défaites de 1652 et de 1714 et les exils qui les ont suivies... Cette crise n'a affecté que la minorité dirigeante, mais c'était elle qui disposait des moyens de bâtir une culture ; tandis que cette minorité enregistrait avec une originalité plus ou moins grande et exprimait en latin, en castillan ou, moins souvent, en catalan, les grands mouvements modernes de l'opinion, le peuple continuait seulement à adapter et à élargir la tradition qui s'était constituée au cours des siècles.
En Catalogne, la Renaissance a tenté une synthèse entre des sources médiévales et les nouvelles influences culturelles italiennes. Joan Ferrandis d'Heredia et Pere Serafí, par exemple, ont fait alterner la recréation de thèmes populaires à un idéalisme amoureux inspiré de Pétrarque ou d'Ausiàs March ; Ferrandis a, en outre, composé des pièces de théâtre d'un réalisme très nuancé. L'Espill de la vida religiosa, un roman attribué à Miquel Comalada, combine l'influence de Raymond Lulle avec celle de la Réforme. Entre 1570 et 1580, Joan Pujol et Joan Timoneda ont défendu, sans grande originalité, les idées de la Contre-Réforme et, tout au long du xviie siècle et d'une bonne partie du xviiie, Francesc Vicenç Garcia, Francesc Fontanella, Guillem Roca i Seguí et d'autres ont constitué un mouvement baroque dont l'inspiration est nettement castillane. Vers le milieu du xviiie, un groupe formé par des traducteurs et quelques écrivains, notamment Joan Ramis, a ébauché un classicisme qui, à l'aube du siècle nouveau, grâce au comte d'Ayamans et à l'auteur inconnu de Lo Temple de la Glòria, a assimilé certains éléments romantiques.
À cette époque, les Mémoires du prolixe baron de Maldà donnent le départ à la littérature de mœurs qui devait avoir un tel succès au xixe siècle. Du xvie siècle aux premières années du xixe, les masses populaires ont créé une poésie et une littérature narrative assez rude, mais souvent très vivante et colorée. Les productions les plus intéressantes ne bénéficiaient que d'une diffusion orale et ne furent publiées qu'au xixe siècle ; les œuvres liées à l'actualité, en revanche, étaient imprimées et atteignaient des tirages assez considérables. Le peuple a créé, en outre, un théâtre qui, dans le domaine religieux, restait fidèle aux modèles médiévaux (danses de la mort, Misteri d'Elx, pièces sur la Nativité et sur la Passion, etc.), mais, dans le domaine profane, affermissait le genre du tableau de mœurs et devait, au xixe siècle, adapter aux besoins locaux le théâtre politique né de la Révolution française.
Le XIXe siècle
La révolution industrielle, au début du xixe siècle, a amené en Catalogne comme ailleurs une série de changements économiques et sociaux profonds. La bourgeoisie a d'abord imité les usages aristocratiques et emprunté tour à tour l'expression catalane et la castillane, mais elle a résolu bientôt cette ambiguïté et construit un mouvement de renaixença autochtone qui a touché les couches populaires. La classe ouvrière, en revanche, a maintenu l'unité ancestrale de son expression jusqu'au moment où l'immigration de travailleurs du sud de l'Espagne l'a contrainte à des hésitations constantes ; d'ailleurs, la classe ouvrière catalane n'a pas disposé des moyens nécessaires pour construire un mouvement culturel homogène et original.
Le poème La Pàtria de Bonaventura Carles Aribau a été le premier jalon de la renaixença et, en même temps, du romantisme. Entre 1833 et 1859, le romantisme a présenté en Catalogne, comme partout en Europe, deux versants, l'un conservateur et historique, l'autre libéral et révolutionnaire. Tomàs Aguiló, auteur de délicieuses ballades d'inspiration populaire et de sonnets qui rappellent Pétrarque, est un des poètes les plus purs de cette époque. Vers le milieu du siècle, on essaya cependant de renouveler les sujets et les formes. Marià Aguiló a, par exemple, introduit quelques formes populaires de provenance majorquine, et Josep-Lluís Pons i Gallarza a ravivé le souvenir de certains classiques latins et italiens. Jacint Verdaguer i Santaló produit des poèmes d'un mysticisme frémissant ou d'un ascétisme excessif, des Mémoires ou des livres de voyages écrits dans une prose imagée, deux poèmes épiques, L'Atlantida (L'Atlantide) et Canigo (Canigou), qui essaient de fondre le monde issu du christianisme avec le monde païen de la mythologie classique ou du folklore pyrénéen, et qui constituent le couronnement de son œuvre.
Le roman et le théâtre, les deux genres les plus typiques de la nouvelle société industrielle, admettent un plus grand réalisme. Le tableau de mœurs a donné de petits chefs-d'œuvre : Emili Vilanova laisse un témoignage élégiaque sur le Barcelone populaire, qui était en train de changer.
Dans le domaine dramatique, on a eu des pièces historiques, ou à thèse, ainsi que des comédies, des drames, des comédies de mœurs (Frederic Soler, Josep Feliu i Codina...). Angel Guimerà a produit une œuvre puissante et énergique ; débutant par des tragédies historiques, il a évolué ensuite vers le drame en prose d'une inspiration plus ou moins réaliste, pour aboutir finalement à des pièces quelque peu symbolistes.
Après 1870, le romantisme entre en crise et perd de son importance devant les nouveaux courants naturaliste et positiviste ; il finit par s'éteindre totalement. En fait, la poésie et le théâtre n'ont été affectés qu'à peine par ce renouvellement. Le roman, en revanche, est entré dans une de ses époques les plus brillantes ; elle s'est prolongée jusqu'à la première décennie du xxe siècle. Au départ, le roman naturaliste, qui faisait preuve d'une certaine modération, plaçait ses personnages dans un cadre urbain. C'est ainsi, par exemple, que Narcís Oller, l'écrivain le plus représentatif de cette période, a donné une vision morale de la société et du dynamisme d'une de ses classes, la bourgeoisie. Plus tard, avec Víctor Català (pseudonyme de Caterina Albert) notamment, le roman a pris un ton de plus en plus violent et dramatique et choisi un cadre rural. Au tournant du siècle, une série de faits, notamment la crise politique de l'État espagnol, la perte des dernières colonies, les luttes sociales, la découverte de nouvelles idées et de formes littéraires étrangères, a donné lieu à l'apparition fulgurante d'un mouvement, le « modernisme », qui a combiné l'exaltation nietzschéenne de la volonté et l'individualisme le plus anarchique avec les attitudes automnales et déliquescentes du décadentisme. Santiago Russinyol, parmi d'autres, nous fournit un bon exemple de ce mouvement. Les plus grands noms de l'époque, toutefois, n'ont qu'exceptionnellement pris part à ce mouvement. Joan Maragall, par exemple, a chanté, en adoptant des procédés proches de Goethe ou de Novalis, son expérience d'homme à la recherche d'une destinée personnelle dans un pays défini et contradictoire ; Joan Alcover a transcrit sa douleur d'homme en des vers dramatiques rappelant quelque peu Leopardi ; Miquel Costa i Llobera, plus retenu, a trouvé une forme poétique nettement définie en passant par l'imitation des classiques latins ; Joaquim Ruyra a montré, en des récits très parfaits, une vision idéalisée de la réalité ; Ignasi Iglesias, quant à lui, a écrit des drames sociaux où l'on retrouve l'influence d'Ibsen.
Perspectives du XXe siècle
Vers 1906, la bourgeoisie catalane, déjà remise de quelques-unes des crises de la fin du siècle et décidée à résoudre pour son propre compte le désarroi politique de l'État espagnol, a encouragé une action culturelle ambitieuse qui, en littérature, a promu un intellectualisme cosmopolite : le « noucentisme ». Eugeni d'Ors, qui en a posé les fondements théoriques, a composé des nouvelles pleines de symboles et de références culturelles ; le poète Josep Carner, à mi-chemin entre la confession et l'ironie, a transfiguré la réalité quotidienne moyennant une prodigieuse magie verbale ; Guerau de Liost (pseudonyme de Jaume Bofill) fait preuve d'un lyrisme presque désincarné. Avec ces « noucentistes », commence l'aventure de l'entre-deux-guerres ; aux inquiétudes postsymbolistes s'ajoutent les recherches de la poésie pure ou de l'avant-garde formaliste. Carles Riba et Joan Salvat-Papasseit illustrent chacune de ces deux voies dont J. V. Foix a essayé de faire la synthèse. Josep-Sebiastà Pons et Marià Manent ont finalement dépouillé le poème de toute fioriture, au point d'atteindre une simplicité qui, dans le cas de Manent, est voisine du silence.
Le roman et le théâtre, en revanche, sont restés plus fidèles aux formes du xixe siècle. Malgré la crise du roman naturaliste, Prudenci Bertrana et Joan Puig i Ferrater n'ont pas tout à fait abandonné ses techniques et, quelque peu modernistes au départ, se sont efforcés de les combiner avec des éléments psychologiques. La plupart des auteurs se sont limités au roman psychologique, mettant en scène des personnages bourgeois, avec, souvent, une certaine originalité et une certaine complexité. Llorenç Villalonga bâtit un mythe, plein de résonances rationalistes et élégiaques ; Mercè Rodoreda, plus lyrique et plus ingénue, évolue d'un ton presque épique à des formes qui ne sont pas loin d'atteindre la plus lumineuse fantaisie. Enfin, l'œuvre abondante, à la fois réaliste et moralisante, de Josep Pla, journaliste et narrateur, apporte un témoignage palpitant sur la Catalogne moderne.
La vie du théâtre a été assez vacillante. Joan Puig i Ferrater s'est engagé avec une certaine originalité dans les perspectives ouvertes par Ibsen, et Josep-Maria de Sagarra, important poète, dans celles ouvertes par les modernistes. Mais la plupart des auteurs se sont contentés d'écrire ce qu'on a appelé des comédies bourgeoises et qui n'étaient guère originales.
Vers la fin des années 1930, alors qu'une rupture avec le « noucentrisme » s'amorçait déjà, la défaite des républicains dans la guerre civile a réduit presque toute l'activité créatrice à l'exil ou l'a cantonnée dans la vie privée. Cette rupture fut donc retardée jusqu'après 1950 et ne connut même tout son éclat qu'après 1960. Avant et après la guerre, Joan Oliver, qui signe ses poèmes sous le pseudonyme de Pere Quart, a fait preuve d'un réalisme mordant et montré des intentions morales ; Agustí Bartra, au lyrisme brûlant, a l'ambition de créer des mythes collectifs. Salvador Espriu, la grande figure de l'après-guerre, bâtit une œuvre poétique, narrative et théâtrale qui, avec un style fouillé et chargé de symboles, combine la déformation caricaturale de la réalité avec l'approfondissement des problèmes métaphysiques de l'homme, notamment ceux de la liberté personnelle et collective. Les poètes plus jeunes, tel Gabriel Ferrater, proposent une vision de l'homme et de son conditionnement historique dans des poèmes narratifs. Le roman et le théâtre recherchent, eux aussi, une rupture avec la tradition psychologique précédente. Le roman se livre à toutes sortes de recherches formelles et construit de grandes allégories à portée historique (Manuel de Pedrolo) ou bien il apporte des témoignages objectifs sur la réalité quotidienne (Baltasar Porcel) ; la nouvelle, qui donne dans cette période de vrais chefs-d'œuvre, nuance les éléments réalistes en les combinant à d'autres, de nature poétique et même humoristique (Pere Calders, Jordi Sarsanedas). Le théâtre, finalement, essaie avec une originalité remarquable les expériences de l'absurde (Manuel de Pedrolo, Joan Brossa) et évolue ensuite, surtout grâce aux théoriciens et aux metteurs en scène, vers la pièce épique d'inspiration brechtienne.
La littérature catalane contemporaine
Il est impossible de parler de la littérature catalane actuelle sans faire référence à l'histoire. En 1931, la République est proclamée en Espagne et la Catalogne obtient l'année suivante un statut d'autonomie qui va d'emblée privilégier les domaines de la culture et de l'éducation (sept grandes maisons d'édition catalanes, vingt-sept journaux en catalan, d'innombrables revues. Dans les écoles l'enseignement se fait aussi bien en catalan qu'en castillan). La littérature connaît un nouvel âge d'or. Certains des grands noms d'aujourd'hui commencent à publier dès cette époque, où la culture catalane connaît un climat de normalité. La fin de la guerre civile, en 1939, est pour les Catalans une des périodes les plus sombres de leur histoire. Le statut d'autonomie est abrogé par Franco avant même sa victoire. Au lendemain de l'entrée des troupes franquistes à Barcelone, une ordonnance bannit de la cité l'usage du catalan et lui assigne pour limites le cercle familial. La même ordonnance institue la réquisition de toutes les imprimeries, la confiscation de tout matériel imprimé et l'instauration d'une censure préalable, à quoi s'ajoutent la destruction systématique de tous les livres écrits en catalan et, ce qui est tout un symbole, la destruction des plombs du dictionnaire général de la langue catalane de Pompeu Fabra. Dans le même temps, de très nombreux intellectuels et professeurs, la quasi-totalité de l'intelligentsia catalane, prennent le chemin de l'exil. Ceux qui restent, sauf de très rares exceptions, connaissent l'« exil intérieur » et l'humiliation d'obscures tâches de subsistance. Aux yeux de Madrid, le catalan était promis au destin d'une langue morte. D'autant qu'une immigration massive des régions pauvres du Sud devait, dans son esprit, noyer dans la masse castillanophone ce qui restait de la langue catalane. Prévisions heureusement démenties par l'histoire.
Les années 1940 : la résistance culturelle
De la fin de la guerre à 1950, c'est, après le grand traumatisme, le début d'un long combat pour sauver la langue et la culture catalanes. En 1942, la fondation Bernat Metge, qui éditait, par souscription et à l'usage presque exclusif des universitaires, des traductions de classiques gréco-latins, obtient non sans mal l'autorisation de publier le tome IX des Vies parallèles de Plutarque, premier livre catalan autorisé après la victoire de Franco. L'année suivante, l'éditeur Josep Cruzet obtient la permission d'éditer les œuvres complètes du poète Jacint Verdaguer, à la condition expresse de conserver la graphie de l'époque : façon d'affirmer que le catalan est une langue fossile. Mais le succès fut tel que d'autres auteurs suivent. La victoire des Alliés oblige le régime à lever l'interdit sur le livre catalan, mais la censure veille à ne laisser publier que les auteurs morts avant la guerre et dont les œuvres n'ont rien de subversif, ou ceux, vivants, qui ont accepté le bilinguisme et collaborent aux journaux et revues castillans. En 1946, Cruzet fonde les éditions Selecta, qui ont publié jusqu'à présent plus de cinq cents titres. D'autres maisons d'édition voient le jour : la même année, la Biblioteca literària catalana ; en 1947, les éditions Aymà publient les rares romans contemporains que la censure laisse passer, et l'éditeur Millà reprend sa collection théâtrale, dont il agrandit le format pour ne pas dépasser les trente pages au-delà desquelles les œuvres échappent à la censure locale et doivent être présentées à la censure madrilène. Enfin, en 1949, Josep Pedreira crée les éditions Ossa Menor, consacrées à la poésie. 1947 voit aussi la création du premier prix littéraire, le Joanot Martorell. Mais c'est surtout clandestinement que la résistance culturelle s'organise, avec des revues de poésie qu'on se passe sous le manteau, au péril de sa liberté : Poesia (1944-1945), Ariel (1946-1951), Antologia (1947), Dau al set (1948), etc. Parmi les collaborateurs, on trouve des noms déjà célèbres : Carles Riba, J.-V. Foix, Josep Carner, Joan Oliver, et d'autres qui vont le devenir : Salvador Espriu, Joan Brossa...
La grande figure des lettres catalanes du moment, le guide et le maître à penser de la jeunesse – le « maître ès espérances », dira-t-on de lui – est sans conteste le poète Carles Riba (1893-1959). Déjà considéré avant la guerre comme un des meilleurs (Estances, 1930 ; Tres Suites, 1937), il rentre d'exil en 1943 avec ses Élégies de Bierville (publiées en 1951 par Ossa Menor), à la fois douloureuse prise de conscience de la guerre, de l'exil, et hymne à la liberté. Ce postsymboliste, dont les affinités avec Valéry, Rilke et Saint-John Perse sont évidentes – prédominance de la forme sur le sentiment, musicalité du vers, exaltation du rythme – influença jusqu'à sa mort nombre de jeunes poètes.
Salvador Espriu (1913-1985) publie clandestinement son premier recueil de poèmes, Cementiri de Sinera, tiré à cent exemplaires en 1946. Il avait publié avant la guerre des récits – Israel –, des romans – El Doctor Rip, Laia – et les textes Ariadna al laberintgrotesc, Miratge a Citerea, Letizia i altres proses, qui révèlent déjà des dons extraordinaires chez un si jeune auteur. La guerre lui inspire, en 1939, sa pièce de théâtre Antígona, qui ne sera représentée que vingt ans plus tard. Dans Cementiri de Sinera apparaît pour la première fois Sinera (anagramme d'Arenys-de-Mar, berceau familial) qui atteint dans l'œuvre d'Espriu les dimensions du mythe : la « petite patrie », à travers le chant du poète, exprime un moment historique vécu par toute une communauté, et par là débouche sur l'universel. Les constantes de son œuvre s'en dégagent : obsession de la mort, de la fuite du temps, présence et absence de Dieu, destin individuel transcendé par le combat collectif. Une pièce de théâtre, Primera Història d'Esther – le plus grand succès du théâtre catalan de l'après-guerre – et un long poème, La Pell de brau (1960), confirment avec éclat ces choix thématiques à travers l'assimilation du destin juif sefarad et du sort catalan. Lyrisme, verve satirique et souffle épique, des Cançons d'Ariadna (1949) à Setmana Santa (1972), font de ce poète, plusieurs fois proposé pour le Nobel, « un monde enfermé dans un homme », selon la formule de Victor Hugo.
J.-V. Foix (1894-1987) publie en 1948 Les IrrealsOmegues. Avant la guerre une des figures les plus marquantes de l'avant-guarda, attentif à tous les courants nouveaux d'Europe et d'Amérique, c'est un poète surréaliste avant la lettre : il l'est par l'exploration des possibilités oniriques, par la confusion entre rêve et réalité, mais jamais par l'automatisme. Il déteste le passéisme et se qualifie lui-même de « chercheur en poésie ». Dans Onze Nadals i un cap d'any (1960), Els Lloms transparents (1969), Darrercomunicat (1970), Mots i Maons i a cadascú el seu, le poète poursuit et approfondit sa quête où l'on perçoit aussi l'écho de l'époque douloureuse et un refus de la société actuelle. Poète non engagé, il développe une œuvre anticonformiste qui le fait pourtant participer à la lutte commune.
En 1948, le prix Joanot Martorell couronne le roman El cel no és transparent, de Maria Aurèlia Capmany (1918-1992), qui ne sera jamais publié : une chose est d'obtenir un prix, une autre d'obtenir le visa de la censure. Cela ne décourage pas, loin de là, la jeune romancière, qui a publié depuis une bonne douzaine de romans, de pièces de théâtre et d'essais. Sa prodigieuse culture lui permet de toujours situer ses personnages dans un cadre « vrai », en privilégiant autant que faire se peut les événements historiques. Maria Aurèlia Capmany s'en prend souvent à la bourgeoisie catalane, hypocrite, mesquine et bête. Le ton est détaché, froid, avec souvent une grande dose d'humour. Citons parmi ses meilleurs romans Un Lloc entre els morts (1968), Feliçmentjo soc una dona (1969), QuimQuima (1971), Cartes impertinents (1980).
L'année 1949 voit l'édition de Poesiade Pere Quart. Ce pseudonyme est le nom de combat du poète Joan Oliver (1899-1986) qui, dès son premier livre, Les Decapitacions (1934), mêle le scepticisme et la satire intemporelles à l'histoire la plus récente : un des poèmes raille Hitler, « le salaud total », un autre, Mussolini « au poitrail gonflé ». Réfugié au Chili, il publie Saló de tardor (1947), au ton nostalgique, et, de retour en Catalogne, Terra de naufragis (1956) à l'humour corrosif et froid qui caractérise sa manière. Vacances pagades (1960) et Circumstàncies (1968) font de lui le plus important poète satirique de la Catalogne, un poète de la révolte lyrique, de la critique sociale, et, avec Espriu, un des plus populaires parmi la jeunesse catalane des années soixante.
Nous voyons donc que cette terrible décennie ne fut pas tout à fait le désert stérile dont certains parlent et que, de façon presque souterraine, le renouveau s'annonçait avec les anciens qui produisaient encore, mais aussi avec les nouveaux venus – nous n'avons évoqué que les plus marquants – pleins de promesses, qu'ils tiendront dans la décennie suivante.
Les années 1950 et 1960 : montée de sève
En 1951, le prix Martorell couronne El Carrer estret, roman de Josep Pla (1897-1981). Journaliste et chroniqueur prolifique – ses œuvres complètes publiées entre 1966 et 1980 comprennent trente-sept volumes –, bien que l'un des plus lus parmi les Catalans et assurément l'un des meilleurs prosateurs, par son scepticisme voltairien et son humour sarcastique à la Sterne, Pla est tout le contraire d'un écrivain engagé.
En 1952, le prix est donné à Xavier Benguerel (1905-1990) pour L'Homedins el mirall. Romancier fécond, l'un des meilleurs représentants du « roman psychologique » et auteur à succès, dépassant la chronique historique et pathétique de Els Vençuts (« Les Vaincus », 1969) et l'expérience amère de l'exil dans Llibredelretorn (1977), il donne en 1974 son chef-d'œuvre, Icària, Icària, un étonnant roman sur l'anarchisme catalan des années 1920 en relation avec la folle aventure des utopistes icariens.
En 1954, le prix va à Manuel de Pedrolo (1918-1990), un des romanciers les plus représentatifs de l'après-guerre. Joyce, Faulkner, Dashiell Hammet sont ses maîtres, et son œuvre, riche d'une cinquantaine de titres, va du roman noir, du roman policier au théâtre de l'absurde en passant par l'affabulation politico-fantastique : Totes les bèsties de càrrega (1967) d'atmosphère kafkaïenne, Temps obert (1968), S'han deixat les claussota l'estora, de facture futuriste.
En 1957, Mercé Rodoreda (1909-1983) reçoit le prix Víctor Català pour son recueil de nouvelles Vint-i-dos contes. Romancière, elle donne en 1962 son chef-d'œuvre, Plaça del Diamant, puis El Carrer de les camèlies (1966) et Miralltrencat (1974), où s'affirme le thème majeur de son écriture : la difficulté d'être femme dans un monde qui privilégie les valeurs viriles. En 1979, les Éditions 62 publient l'ensemble de ses nouvelles dans la prestigieuse collection Les Millors Obres de la literatura catalana sous le titre : Tots els contes. Son art très subtil, son lyrisme retenu, son humour en font un des écrivains les plus attachants et les plus singuliers.
D'Agusti Bartrà (1908-1980), qui avait déjà publié pendant la guerre deux livres de poèmes, est publiée en 1954 à Barcelone une anthologie qui rassemble la plupart des poèmes écrits en exil au Mexique, d'où il ne revint qu'en 1971. Poète et romancier, il excelle à mythifier la réalité, avec un lyrisme exacerbé. Citons ses deux poèmes épiques, Màrsias et Màrsias i Adila (1957) dont le premier parut en édition bilingue français-catalan sous le titre Livre de Marsias (trad. Louis Bayle, 1968). En 1972, il publie Rapsòdia de Garí.
En 1957, le prix Martorell est remporté par Joan Sales avec un roman, Incertaglòria, où la guerre est vécue du côté républicain par de jeunes officiers. La censure, opposée à sa publication, dut céder devant le nihil obstat des autorités religieuses catalanes, mais exigea des coupures considérables.
Cette décennie, qui voit s'affirmer de nouveaux talents, est aussi celle où paraît, en 1959, la première revue catalane de l'après-guerre, Serra d'Or, publiée par les moines de l'abbaye de Montserrat et échappant de ce fait à la censure civile. Elle fournit aux intellectuels de tous bords une tribune durable. L'association Omnium cultural pour la promotion de la culture catalane, entièrement financée par des souscriptions et des dons, poursuit efficacement le combat catalan pour la récupération de sa langue et de sa culture.
En 1961 est publiée une œuvre majeure de cette littérature, le roman Bearn du Majorquin Llorenç Villalonga (1898-1980), portrait attachant d'un noble majorquin ruiné, érudit, hédoniste et voltairien qui, après avoir connu les fastes parisiens du second Empire, vit retiré dans son île, un peu à la manière du Guépard de Lampedusa (qui lui est strictement contemporain) et qui est, comme lui, la peinture nostalgique d'un monde disparu.
1961 voit aussi la naissance de la nova cançó catalane avec la constitution du groupe Els Setze Jutges, et surtout l'apparition de Raimon qui chante pour la première fois à Barcelone en 1962. C'est un véritable raz de marée qui déferle sur tout le pays catalan (Raimon est valencien) ; les chanteurs se multiplient et les grands noms de la littérature leur apportent leurs textes : Espriu, Pere Quart, Maria Aurèlia Capmany... Cette chanson contestataire sensibilise le public catalan à ses propres problèmes, au point que le pouvoir central s'en inquiète et fait tout pour étouffer ces voix : la radio et la télévision leur restent fermées et les journaux n'en parlent jamais. Les disques ne reçoivent pas le visa de la censure, et les interdictions de chanter se multiplient. Cette répression tenace, qui durera au-delà de 1970, ne fait qu'affermir l'adhésion du public à la cançó de protesta, qui a constitué un des facteurs les plus déterminants de l'éveil civique de la Catalogne.
En 1963, le prix Sant Jordi – financé par l'Omnium cultural et qui remplace le prix Martorell – est remporté par Pere Calders (1912-1994) avec L'Ombra de l'atzavara, qui décrit la vie des Catalans émigrés au Mexique après la guerre civile, c'est-à-dire sa propre expérience. Mais Calders est avant tout un auteur de nouvelles où l'humour se mêle à la poésie et au surréalisme. Il avait commencé à publier des recueils de contes et de nouvelles dès 1936 : El Primer Arlequí. Tous ses récits furent réunis en un seul volume sous le titre : Tots els contes de PereCalders, paru en 1968.
En 1964 est autorisée la traduction en catalan d'œuvres étrangères. Bien des auteurs pénètrent ainsi pour la première fois en Espagne. Kafka, Camus, Brecht, Sartre, Freud, Gramsci, Lukács... connaissent un énorme succès et influencent les modes de pensée et les façons d'écrire.
La même année paraît un livre très important, Els Altres Catalans, de Francisco Candel (1925-2007), essai sociologique sur ce problème majeur de la Catalogne qu'est l'immigration intérieure. Cette étude fait prendre conscience aux Catalans des problèmes des communautés castillanophones dont ils ne se souciaient pas jusqu'alors et contribuera puissamment à briser la barrière d'incompréhension qui les séparait.
Jordi Sarsanedas (1924-2006) s'était fait connaître comme poète dès 1948 avec A Trenc de sorra. Sa parfaite connaissance de la littérature française – il est licencié ès lettres de l'université de Toulouse – influence son œuvre. Sa nouvelle Contra la nit d'Oboixangó(1952), à l'atmosphère fantastique, attira l'attention de la critique et, l'année suivante, il obtint le prix Víctor Català pour son recueil Mites. En 1969, il publie encore des nouvelles sous le titre : El Balcó.
Toujours dans les années 1960, Baltasar Porcel, un jeune Majorquin (1937-2009), se fait connaître aussi bien comme journaliste que comme romancier. Son œuvre romanesque est surtout centrée sur son île natale ; les personnages hauts en couleur de ce microcosme, où l'insularité exacerbe les passions que la guerre civile portera à son maximum d'intensité, composent une fresque que l'innocent touriste est bien loin d'imaginer : hommes de la mer, contrebandiers, paysans cupides, nobles dégénérés, commerçants xuetes (descendants de Juifs) que la société tient encore à l'écart aujourd'hui... Depuis Solnegre, qui obtint le prix Ciutat Palma de Mallorca en 1960, jusqu'à Cavalls cap a la fosca, prix Prudenci Beltrana 1975, en passant par La Lluna i el cala Llamp(1963), Els Escorpins (1965), Els Argonautes (1968), prix de la critique, Difuntssota els ametllers en flor (1970), prix Josep Pla, Porcel crée un monde dont la violence et le lyrisme sont tempérés par l'humour.
Au cours de cette décennie, le nombre d'œuvres publiées en catalan ne cesse d'augmenter, passant de 196 titres en 1960 à 520 en 1966. Il faut noter, en particulier, puisqu'il n'y a toujours pas d'enseignement officiel du catalan, le succès considérable de tous les outils d'apprentissage de la langue : manuels, vocabulaires, dictionnaires.
La littérature après la mort de Franco
Avec la mort de Franco, en 1975, que suivent la transition (1975-1977), le statut d'autonomie (1979), le rétablissement du Parlement et la Generalitat (1980), l'avènement de la démocratie suscite une explosion sans précédent parmi les lettres catalanes du xxe siècle. Les maisons d'éditions se multiplient : La Magrana (1976), Eumo (1979), Quaderns Crema (1979), Empúries (1983), Columna (1985), La Campana (1985), Bromera (1986). Dès lors, les livres publiés en catalan voient leur nombre croître d'année en année. On passe ainsi de 672 titres en 1975 à 5 806 en 1993.
La prose
À partir de 1978, de nombreux romans écrits au cours des dernières années du franquisme et après se caractérisent par leur perspective historique. C'est le cas notamment de Galceran, l'heroi de la guerranegra (1978), de Jaume Cabré, ou de Cercamon (1982), de Lluís Racionero. Confirmation, continuité et renouvellement de talents sont les maîtres-mots qui vont singulariser le processus littéraire de la décennie 1980-1990. Après les décès de Llorenç Villalonga, en 1980, et de Mercè Rodoreda, en 1983, deux noms s'imposent : Pere Calders et Joan Perucho. Le premier se fait remarquer par sa production prolifique (Tot s'aprofita, 1983 ; Gaeli i l'homedéu, 1986). De son côté, Joan Perucho (1920-2003) intervient dans le roman avec Les Aventures delcavallerKosmos (1981), et La Guerra de Cotxinxina (1986). Notons aussi l'affirmation de narrateurs dont l'éclosion a été tardive. Dans Camí de sirga (1983) Jesús Moncada (1941-2005) a créé un monde fictionnel à partir de l'engloutissement de sa ville natale, Mequinensa. Maria Barbal (née en 1949) a puisé son inspiration dans le monde rural des Pyrénées tout au long du xxe siècle. Sa trilogie a été bien reçue par la critique et les lecteurs : Pedra detartera (1985), Mel i metzines (1990) et Càmfora (1992). Ramon Solsona (né en 1950) s'est imposé grâce à une prose agile et mûrie dans ses trois romans, Figures de calidoscopi (1989), Les Horesdetingudes (1993), D.G. (1998).
D'autres écrivains, apparus au cours des années 1970, confirment leur talent et leur popularité. Quim Monzó publie en 1982 Olivetti, Chaffoteaux et Maury, et, en 1989, La Magnitud de la tragèdia. Baltasar Porcel affiche une pleine maturité littéraire avec Els Dies immortals (1984), Jaume Cabré remporte deux prix prestigieux avec La Teranyina (1984), prix Sant Jordi 1983, et Fra Junoy o l'Agoniadels sons (1984), prix Prudenci Bertrana 1984, sans doute un des romans les plus réussis de cette période. Margarida Aritzeta (née en 1953) remporte le prix Víctor Català 1980 avec Quan la pedra es torna fang a les mans (1981) et le prix Sant Joan 1982 avec Un pebrer a la pell (1983). Isidre Grau, de son côté, est lauréat du prix Ciutat de Palma 1983 avec Vent de memòria et du prix Sant Jordi 1985 avec Els Colors de l'aigua (1986). Pere Gimferrer obtient le prix Ramon Llull 1983 avec Fortuny (1983). Montserrat Roig (1946-1992) publie L'Hora violeta (1980), L'Òperaquotidiana (1985) et El Cant de la joventut (1989). Ferran Torrent se fait connaître avec deux romans à succès : No empenyeu el comissari ! (1984) et Penja els guants (1985). La production d'Olga Xirinacs est constamment couronnée avec Interiorambdifunts (1983), prix Josep Pla 1982, Al meu cap unallosa (1985), prix Sant Jordi 1984, et Zona marítima, prix Ramon Llull 1986. Lluís Racionero (1940-2020), qui a remporté le prix Prudenci Bertrana 1981 avec Cercamon, publie La Forja de l'exili (1985). Parmi les valeurs sûres, il faut également mentionner Jordi Coca (Sota la pols, 2001) ; Jaume Cabré (Les VeusdelPamano, 2004) ; Emili Teixidor (Pa negre, 2004) ; Pep Coll (El Segle de la llum, 1997 ; El SalvatgedelsPirineus, 2005) ; Julià de Jodar qui publie une trilogie, L'Atzar i les ombres (1997-2006). Baltasar Porcel ne cesse de publier (Lola i els peixos morts, 1994 ; Ulisses a altamar, 1997), tout comme Ferran Torrent (Societatlimitada, 2002 ; Judici final, 2006). Quim Monzó, après avoir publié Guadalajara (1996), réunit ses contes dans Vuitanta-sis contes (1999). Joan Francesc Mira entreprend sa trilogie de Valence (ville dont il est originaire) avec Els treballsperduts (1989) et Purgatori (2003), prix Sant Jordi 2002. Robert Saladrigas publie en 1992 El sol de la tarda, couronné par le prix Sant Jordi. Miquel de Palol (né en 1953) produit ses chefs-d'œuvre, ÍgurNebli (1994) et El Troicord (2001).
Les femmes ne sont pas en reste. Maria Mercè Marçal (1952-1998) publie La Passiósegons Renée Vivien (1994), Maria Antònia Oliver (1946-2022) propose Amor de cans (1995), tandis que Carme Riera nous offre Cap al celobert (2000), Margarida Aritzeta, El Llegatdelsfilisteus (2005) et Maria Barbal avec Escrivia cartes al cel (1996), Carrer Bolivia (1999), Bella edat (2003), País íntim (2005), des livres très bien écrits, dont les thèmes traités sont différents : séquestration dans une école, émigration, beauté et anorexie, relation mère-fille et injustice.
Parmi les jeunes auteurs qui viennent grossir le contingent des valeurs sûres, citons : Josep N. Santaeulàlia (né en 1955) ; Vicenç Villatoro (né en 1957) ; Lluís-Anton Baulenas (né en 1958) ; Imma Monsó (née en 1959).
Màrius Serra (né en 1963) est une des valeurs sûres les plus solides et encourageantes de cette génération, avec notamment deux romans qui ont fait l'objet de critiques fort élogieuses (Mon Oncle, 1996 ; Farsa, prix Ramon Llull 2006). Vicenç Pagès (né en 1963) est l'un des écrivains dont l'avenir semble très prometteur. On lui doit des contes (Cercles d'infinitescombinacions, 1990) et des romans (El Món d'Horaci, 1995, et La felicitat no éscompleta, 2003). Joan Lluís Lluís (né en 1963) occupe une place de choix dans les lettres nord-catalanes (Els Ulls de sorra, 1993, El Dia de l'ós, 2004), de même que Joan Daniel Beszonoff (Les Rambles de Saïgon, 1996, Les Amnèsies de Déu, 2005). Maria de la Pau Janer (Palma, 1966) a été primée avec Màrmara (1993 et 1994) et Lola (1999). Jordi Puntí (né en 1967) a vu son œuvre reconnue aussi bien par la critique que par le public (Pell d'armadillo, 1998 ; Animals tristos, 2002). Francesc Serés (né en 1972) est l'auteur d'une trilogie, De fems i de marbres (2000-2002).
Parmi les noms à retenir pour le futur, il faut encore citer Lolita Bosch (née en 1970), Borja Bagunyà (né en 1972), Pere Guixà (1973), et enfin le Majorquin Melcior Comes (né en 1980).
La poésie
Avec l'avènement de la démocratie, la poésie va abandonner son rôle de dénonciation et le côté engagé qui était le sien face aux injustices vécues par la société sous la dictature franquiste. Depuis 1975, la vision qu'ont les poètes de la Catalogne est différente. Joan Vinyoli (1914-1984) publie beaucoup durant cette période, en cultivant le réalisme lyrique (Vent d'aram, 1976 ; Passeig d'aniversari, 1984). Salvador Espriu (1913-1985) clôt sa carrière poétique avec un recueil, Per a la bona gent (1984), qui illustre son combat pour une langue poétique moderne sans emphase. Joan Teixidor (1913-1992) publie vingt-six poèmes autobiographiques au ton élégiaque (Fluvià, 1989).
L'avant-gardisme est représenté par Josep Palau i Fabre (1917-2008) et surtout Joan Brossa (1919-1998), auteur d'une œuvre remarquable (Càntic de càntics, 1972 ; Poesiaescènica, 1973-1983 ; Sumari astral, 1999).
Le réalisme lyrique est cultivé par Miquel Martí i Pol (1929-2003), le Valencien Andrés Estellés (1924-1993) et Joan Ferraté (1924-2003). Martí i Pol est le poète contemporain le plus lu. C'est à partir de 1975 que son cheminement poétique se modifie et que son lyrisme acquiert plus de maturité. Estimada Marta (1978) et L'Àmbit de tots els àmbits (1981) mettent en relief l'érotisme, la foi en l'avenir et une réflexion civique. La sérénité, née de l'expérience, de l'observation du monde environnant, de la connaissance de sa propre personnalité, apparaît dans Primer Llibre de Bloomsbury (1982) et est confirmée dans Els Bells camins (1987). Dans les années 1990, le poète nous offre des recueils empreints de désarroi et de résignation (Un hivernplàcid, 1994 ; Llibre de les solituds, 1997). À partir des années 1970, Vicent Andrés Estellés, peut-être le poète valencien le plus important du xxe siècle, et considéré comme le rénovateur de la lyrique valencienne contemporaine, publie avec beaucoup plus de fréquence (Manual de conformitats, 1977 ; Vaixell de vidre, 1984 ; Sonata d'Isabel, 1990). Joan Ferraté publie Llibre de Daniel en 1976 et Catàleggeneral 1952-1981 (1987).
D'autres poètes se sont distingués par une évidente liberté artistique. Ainsi de Felícia Fuster (1921-2012), dont la voix originale et mûre s'affirme en 1984 avec Una cançó per a ningú i trentadiàlegs ; son langage poétique se caractérise par la méditation, le thème de l'absence, du vide, l'introspection, l'approche de l'histoire contemporaine dans Sorra de temps absent (1998). Dans Postals no escrites(2001), elle utilise la forme du haikú japonais. Jordi Sarsanedas (1924-2006) a beaucoup publié vers la fin de sa vie : L'Enlluernament, al cap del carrer (2001), et Silenci, respostes, variacions (2005), notamment, dans lesquels il admire, d'un regard serein et optimiste, le monde environnant, l'œuvre des hommes et exprime sa joie face à la nature. Le Majorquin Blai Bonet (1926-1998) a cultivé le thème de la solitude et du péché dans El Jove (1987, prix national de la Critique) et celui de la ville dans Nova York (1991, prix Ciutat de Barcelona). Chez Màrius Sempere (1928-2018), le lyrisme prend naissance dans le quotidien pour évoluer vers des réflexions teintées d'ironie (Samsara, 1982 ; Subllum, 2000). On doit à Segimon Serrallonga (1930-2002), entre autres publications, Tornem-hi : no ho diremtot (1980) et Poesiaantiga (1981). Gerard Vergés (1931-2014) est l'auteur d'une œuvre lyrique fort intéressante (L'Ombra rogenca de la lloba, 1981 ; La InsostenibleLleugeresadel vers, 2002). Le Majorquin Bartomeu Fiol (1933-2011) a beaucoup publié. Son œuvre se caractérise par une conception très personnelle de la poésie, toujours à la recherche de la vérité. Les recueils publiés à partir de 1995 mettent en relief son obsession de la mort et de la destruction (La Comuniódelssants o els Morts hocallamtot, 1997 ; Catàleg de matèries, 1998).
Mentionnons à présent des poètes comme Feliu Formosa (1934), dont l'œuvre alliant sobriété et recherche a été fortement influencée par Gabriel Ferrater et Joan Vinyoli (Llibre de viatge, 1978, prix Carles Riba ; Per Puck, 1992 ; Les Nits delllamp, 1996) ; Joan Margarit (1938-2021), dont Llum de pluja (1987) témoigne d'une poésie sobre et sans concession ; Miquel Bauçà (1940-2005), poète innovant et audacieux (Cants jubilosos, 1978 ; Les Mirsiles : colònia de vacances, 1983) ; Narcís Comadira (né en1942), poète-traducteur qui s'est affirmé comme une des voix lyriques les plus en vue, car ses recueils font preuve d'indéniables qualités (La Llibertat i el terror, 1981 ; Usdefruit, 1995), son réalisme verse chaque fois vers le métaphysique. Francesc Parcerisas (né en1944) se singularise par son humanité, sa sensualité et son émotion dans L'Edat d'or (1983) et Triomfdelpresent (1991). Pere Gimferrer (1945) nous offre une poésie kaléidoscopique, travaillant sur une suite de fragments de lectures, d'images de films, de vues réelles plus ou moins transformées, qui se rapprochent du collage (L'Espaidesert, 1977 ; Mascarada, 1996).
Citons à présent, par ordre chronologique de naissance, les poètes notables nés entre 1950 et 1972 : Francesc Prat (1950), dont les recueils ont été couronnés (El Soldat rosa, 1983 ; Larari, 1987). Enric Casassas (1951), qui s'est affirmé tardivement, et dont l'œuvre va de la poésie médiévale au surréalisme (La Cosa aquella, 1982 ; Calç, 1996, prix Carles Riba ; Que dormim, 2002). La féministe Maria-Mercè Marçal (1952-1998) se fait connaître en 1977 avec le recueil Cau de llunes (prix Carles Riba 1977). La Germana, l'estrangera(1985) traite ouvertement de l'amour entre femmes, thème absent jusqu'alors de la poésie catalane. En 1989, elle réunit toute son œuvre poétique dans Llenguaabolida (1973-1988) et y inclut Desglaç. Son lyrisme s'articule autour de l'identité féminine : amour, solitude, manque de communication, passion, maternité, rébellion. Le Minorquin Ponç Pons (né en1956) est considéré comme un des poètes les plus importants des Baléares (Al Marge, 1983 ; El Salobre, 1997, prix Carles Riba). Àlex Susanna (né en1957), auteur de plus de douze recueils poétiques, dont Quadernvalencià, prix Josep Pla 1988 et Les Anellesdelsanys, prix Carles Riba 1990. Le Valencien Enric Sòria (né en1958) s'est distingué avec Compàs d'espera (1993, prix Josep Maria Llompart) et L'Instant etern (1999, prix Carles Riba). Le Majorquin Andreu Vidal (1959-1998) s'est fait connaître avec Xicraini : nit de portes cremades (1977), auquel succéderont Necròpsia (1984, prix Ciutat de Palma), L'Animal que no existeix (1993, prix Carles Riba) et Ad vinum (1999). Carles Duarte (né en1959), dont la poésie a comme thèmes centraux la tendresse, le rêve et l'oubli : Llavis de terra (1993), El Silenci(2001). Xavier Lloveras (1960) met en vers un monde souvent amer dans El Test de Rorsbach (1992). David Castillo (né en1961) a publié entre autres La Muntanyarussa (1993), Game over (1998) et Seguint l'huracà (2000). Jordi Cornudella (né en1962) s'est imposé avec El Germà de Catul i méscoses (1997, qui a reçu le prix de la Critique). Jaume Subirana (né en1963), après avoir remporté le prix Carles Riba en 1988 avec Final de festa (1989), nous a offert En altrescoses (2002). Carles Torner (né en1963) est un poète talentueux. Son œuvre a été couronnée en 1984 (Als Límits de la sal, prix Carles Riba 1984 ; Viuredesprés, prix de la Critique 1998). Vicenç Llorca (né en1965) a publié de nombreux recueils : de La Pèrdua (1987) à Parauladelmón : antologia 1983-2003, (2004). La Majorquine Margalida Pons (née en1966) nous a offert Sis Bronzes d'alba (1986, prix Salvador Espriu), suivi de Les Aus (1988, prix Ciutat de Palma). Un autre Majorquin, Sebastià Alzamora (né en1972) s'est fait connaître avec Rafel (1994, prix Salvador Espriu), où le thème de la mort est abondamment développé et que prolongent Mula morta (2001), El Benestar(2003, prix des Jeux Floraux, Barcelone), où il dénonce le déclin de notre société.
Le théâtre
À partir de 1975, et durant une dizaine d'années, en Catalogne, comme ailleurs, le théâtre indépendant se professionnalise ; des compagnies disparaissent, d'autres voient le jour (Teatre lliure, 1976). Pour le théâtre de texte, la période 1975-1985 marque une véritable traversée du désert. De 1986 à 1998, de nouveaux auteurs font leur apparition. Des textes de Benet i Jornet (1940-2020), Ramon Gomis (né en 1946), Guillem-Jordi Graells (né en 1950) sont joués. Des œuvres de jeunes auteurs (Francesc Pereira, né en 1961 ; Sergi Belbel, né en 1963) sont représentées. On promeut en 1989-1990 trois œuvres de ce dernier jeune universitaire plein de talent : En companyia d'abisme, Elsa Schneider et Òpera. Josep M. Benet i Jornet publie régulièrement. Son œuvre a su s'adapter aux nouvelles formes d'écriture et est devenue le point de référence local pour les jeunes acteurs dramatiques. Parmi ses dernières œuvres, citons Salamandra (2002), La Ventafocs (2004).
Citons aussi les Valenciens Rodolf et Josep Lluís Sirera qui ont écrit ensemble une trilogie, La Desviació de la paràbola (1975-1980) et Cavalls de mar (1988). On doit à Rodolf Sirera Indian Summer (1989) et Maror (1995), notamment.
Parmi les auteurs nés entre 1950 et 1960, citons Joan Casas (né en1950) qui a produit Nus, L'últim dia de la creació, Toni Cabré (né en1957) auteur de L'Efecte 2000,Teoria de catàstrofes, le Majorquin Josep Pere Peyró (né en1959), qui évoque la fragilité des relations humaines (La Plujairlandesa), et Albert Mestres (né en 1960)[La Bufa, Homenatge a Sarajevo].
Chez les auteurs plus jeunes, mentionnons Lluïsa Cunillé (née en1961), auteur de pièces intimes, ambiguës et énigmatiques, avec un dénouement brutal et sans concession (Barcelona, mapa d'ombres ;Apocalipsi) ; Sergi Belbel, qui, après avoir été influencé au début par Beckett, a su trouver sa voie en reproduisant de façon plus réaliste la société dans ses faits et gestes quotidiens (Tàlem, Morir, Mòbil, 2006) ; Jordi Galceran (né en1964)[Dakota, Paraulesencadenades, El mètode de Grönholm], Enric Nolla (né en 1966)[Tractat de blanques, A pas de gel en el desert].
Les nouveaux auteurs mettent en évidence la violence qui habite chacun d'entre nous ; leurs pièces s'appuient notamment sur une certaine américanisation des images et mettent en évidence la marginalité des êtres. Citons Àngels Aymar (La Indiana), Marta Buchaca (née en1979)[L'Olorsota la pell], Ignaci Garcia (Camí de Tombuctú, Influències, L'Altreextrem de l'oceà), Carles Mallol (né en1981)[Finestraa Manhattan], Pau Miró (né en1974)[Una habitació a l'Antàrtida, Bales i ombres, Somriure d'elefant], David Plana (né en1969)[Mala sang, La Dona incompleta], Jordi Prat (né en1975)[Obra vista], Gemma Rodríguez (né en1973)[T'estimaréInfinittt], Mercè Sàrries (né en1966)[En defensadelsmosquitsalbins]et Jordi Silva (né en1973)[Ja en tinctrenta, La Millor Nit de la teva vida].
On peut espérer que la création d'un star-system télévisé (avec des pièces comme Poblenou, Secrets de família, Estació d'enllaç ou Nissaga de poder) incite le public à fréquenter davantage le théâtre et donne du travail à de nombreux auteurs dramatiques pour l'écriture des scénarios. Benet et Belbel sont joués à l'étranger, notamment en France, où leurs œuvres sont traduites.
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Écrit par
- Mathilde BENSOUSSAN : professeur honoraire à l'université de Rennes-II-Haute-Bretagne
- Christian CAMPS : professeur des Universités, professeur à l'université de Montpellier-III-Paul-Valéry, directeur du Centre Du Guesclin à Béziers
- John COROMINAS : professeur à l'université de Chicago
- Marcel DURLIAT : professeur émérite d'histoire de l'art à l'université de Toulouse-Le-Mirail
- Robert FERRAS : agrégé de géographie, docteur ès lettres, professeur des Universités
- Jean MOLAS : docteur ès lettres, professeur aux Estudis universitaris catalans
- Jean-Paul VOLLE : professeur agrégé des Universités, professeur à l'université de Montpellier-III-Paul-Valéry
Classification
Médias
Autres références
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BARCELONE
- Écrit par Robert FERRAS et Jean-Paul VOLLE
- 3 650 mots
- 7 médias
Deuxième ville d’Espagne après Madrid, Barcelone (Barcelona) compte à peine plus de 1,62 million d'habitants en 2009, mais son aire métropolitaine approche 5 millions d'habitants. Sa trajectoire économique depuis le début du xxe siècle souligne son dynamisme et ses capacités d'adaptation...
-
BOHIGAS ORIOL (1925-2021)
- Écrit par Francis RAMBERT
- 571 mots
Né le 20 décembre 1925 à Barcelone, l'architecte Oriol Bohigas s'associe en 1951 avec son compatriote Josep Martorell (le fondateur du groupe R), puis avec l'Anglais David Mackay en 1963 pour former l'agence MBM (Martorell, Bohigas, Mackay) dont la production va, à l'instar du parcours d'un autre...
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CERDAGNE
- Écrit par Gabriel LLOBET
- 229 mots
Ancien comté situé sur le versant sud des Pyrénées orientales, la Cerdagne occupait le large bassin montagnard du Sègre en amont de la Séo d'Urgel et débordait sur celui de la Têt. Son premier comte apparaît au xe siècle. Mais, dès 1117, le pays est réuni au comté de Barcelone...
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COSTA BRAVA
- Écrit par Robert FERRAS
- 344 mots
Littoral de la province de Gérone entre la frontière française et le Tordera qui la sépare du Maresme barcelonais. Ce « finisterre » catalan dit Côte de Gérone ou Costa de Levante est entré dans la catégorie des plages très fréquentées sous le nom de côte brava (sauvage), rocheuse...
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Voir aussi
- ESPAGNOL ART
- ESPAGNOLE PEINTURE
- BASSA FERRER (1285 env.-1348)
- FORMENT DAMIÁN (1475 env.-env. 1540)
- CASCALLS JAME (connu vers 1345-mort apr. 1377)
- SAINT-MICHEL-DE-CUXA ABBATIALE DE
- RIPOLL ABBATIALE DE
- MARTORELL BERNARD (apr. 1427-1452)
- LONJA ou LOGE DE MER
- MAÎTRE DE PEDRET (actif mil. XIIe s.)
- JOHAN PERE (1398-apr. 1458)
- FRANQUISME
- AUTONOMIE ADMINISTRATIVE
- CISTERCIEN ART
- TURMEDA ANSELM (mort en 1423)
- ROÍG DE CORELLA JOAN (1401-1478)
- GUIMERÁ ÁNGEL (1849-1924)
- NOUCENTISME
- ALCOVER JOAN (1854-1926)
- COSTA I LLOBERA MIQUEL (1854-1922)
- CATALANE LITTÉRATURE
- METGE BERNAT (1340?-1413)
- AGUILÓ TOMÁS (1812-1884)
- PEINTURE MURALE
- GIMFERRER PERE (1945- )
- MONCADA JESÚS (1941-2005)
- PERUCHO JOAN (1920-2003)
- BARBAL MARIA (1949- )
- MARÇAL MARIA MERCÈ (1952-1998)
- SERRA MARIUS (1963- )
- PAGÈS VINCENÇ (1963- )
- MARTI I POL MIQUEL (1929-2003)
- BENET I JORNET JOSEP (1940-2020)
- ESPAGNE, économie
- ESPAGNE, géographie
- ESPAGNE, histoire : Moyen Âge, du XIIIe au XVe s.
- ESPAGNE, histoire : XVIIIe et XIXe s.
- ESPAGNOLE ARCHITECTURE
- ESPAGNOLE SCULPTURE
- TEXTILES INDUSTRIES
- CHRONIQUE
- ESPAGNOLE LITTÉRATURE, des origines au XVIIIe s.
- ESPAGNOLE LITTÉRATURE, XIXe, XXe et XXIe s.
- ESPAGNOL THÉÂTRE
- GÉRONE, Espagne
- CIVILE ARCHITECTURE
- ROMANE SCULPTURE
- GOTHIQUE SCULPTURE
- ARCHITECTURE DU XIXe SIÈCLE
- ARCHITECTURE DU XVIIIe SIÈCLE
- GOTHIQUE PEINTURE
- RENAISSANCE ESPAGNOLE ARTS DE LA
- BARTRÀ AGUSTÍ (1908-1982)
- BENGUEREL XAVIER (1905-1990)
- BROSSA JOAN (1919-1998)
- CALDERS PERE (1912-1994)
- CANDEL FRANCISCO (1925-2022)
- CAPMANY MARIA AURÈLIA (1918-1991)
- PLA JOSEP (1897-1981)
- PEDROLO MANUEL DE (1918-1990)
- PORCEL BALTASAR (1937-2009)
- SARSANEDAS JORDI (1924-2006)
- OLIVER JOAN (1899-1986)
- ROMANTISME, littérature
- ROMAINE ARCHITECTURE
- ANTIQUITÉ TARDIVE & HAUT MOYEN ÂGE, architecture
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- RENAISSANCE ARCHITECTURE DE LA
- CATALAN ART
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- MAÎTRE DE CABESTANY (2e moitié du XIIe s.)
- LÉRIDA, Espagne
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- MARTORELL JOHANOT (mort en 1470?)
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