CATASTROPHE DE VAISON-LA-ROMAINE
Le 22 septembre 1992, après un épisode de pluies diluviennes, l'Ouvèze, une rivière qui coule des Baronnies jusqu’au Rhône au travers du Vaucluse, dévastait tout sur son passage et en particulier la ville de Vaison-la-Romaine, provoquant de nombreuses victimes et d’importants dégâts matériels.
Le 21 septembre 1992, un front pluvieux se déplaçant vers l’est avait déjà déversé de fortes précipitations sur les départements de l'Hérault, du Gard, de la Lozère et de l'Ardèche. La situation météorologique étant particulièrement favorable au déclenchement d’épisodes méditerranéens intenses, dès 15 h un premier bulletin ALARME (Alerte au risque météorologique exceptionnel) avertissant de fortes précipitations est émis par Météo-France sur le quart sud-est du territoire national. Le soir même, le préfet du Vaucluse relaie l’information et met en place les forces de sécurité et de protection.
Le 22 septembre, les prévisions pour « épisode pluvio-orageux d'une rare violence » sont confirmées. Après une première série d’averses modérées observée pendant la matinée, la vallée de l’Ouvèze est submergée par un second épisode beaucoup plus violent. On enregistre alors un cumul de pluies atteignant 300 mm à Entrechaux et 179 mm à Vaison-la-Romaine, ce qui représente respectivement 39 % et 65 % des précipitations annuelles moyennes enregistrées dans ces stations. Plus de 100 millions de tonnes d’eau sont ainsi déversées sur le bassin de l’Ouvèze en début d’après-midi.
Vers 15 h, à Vaison-la-Romaine, les flots de l’Ouvèze commencent à submerger le lotissement du quartier Théos, situé sur la rive droite, tandis qu’un torrent de boue balaie le camping municipal, emportant tout sur son passage. Dans les minutes qui suivent, au niveau du pont romain, l'eau atteint 17 mètres, soit 15 mètres de plus que son cours normal. Caravanes et véhicules sont emportés et se fracassent contre le pont. Au total, dans le Vaucluse, on comptera soixante-trois communes sinistrées. Les conséquences sont catastrophiques : on recense au moins 42 victimes dont 34 à Vaison-la-Romaine, et des dégâts estimés à plus de 500 millions de francs, soit près de 80 millions d'euros.
Bien que catastrophique, la crue de 1992 est une crue d’automne typique de ces régions. En outre ce n’est apparemment pas la première fois que l’Ouvèze atteint de tels niveaux. Les archives municipales font état d’au moins un cas comparable, observé en 1616, qui n’avait toutefois pas fait de victime, mais lors duquel la rivière avait submergé le pont. Les maisons se trouvaient alors situées dans le haut du village et les bords de la rivière abritaient seulement des jardins. Ce qui a rendu la crue de 1992 si catastrophique est que le bassin de l’Ouvèze en amont de Vaison a été fortement anthropisé : le changement de type de cultures, la pression foncière en faveur de la vigne sur les collines du piémont préalpin, la déprise rurale, l’imperméabilisation des sols associée au bétonnage et la présence de constructions dans le lit même de la rivière ont nettement changé la donne et amplifié les conséquences des crues. Le risque d’inondation était ainsi connu depuis l’Antiquité, mais le désir de développer la commune et le souhait de tirer un bon prix des terrains disponibles ont incité la municipalité à le négliger en rendant constructibles un certain nombre de zones pourtant particulièrement sensibles. La crue de 1992 montre – une fois de plus - la nécessité de mener des études de bassin avant de proposer des aménagements, urbains ou hydrauliques.
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Écrit par
- Jean-Pierre CHALON : ingénieur général des ponts, des eaux et des forêts honoraire
Classification
Média