CATASTROPHES
Catastrophes, géographie et économie
Nous avons évoqué les liens étroits qui pouvaient se tisser entre les catastrophes, d'une part, et les diverses cultures (perception du risque) et les démocraties (prise de risque), d'autre part. Il existe d'autres disparités.
À l'échelle de la planète, le nombre de victimes imputables aux risques naturels (RN) [hormis les épidémies] est seize fois plus important que celui des victimes des risques industriels (RI). Ce rapport cache une autre réalité : il est de 19 dans les pays en développement (en incluant la Chine et l'Inde), de 0,8 en Europe (27 États) et de 0,7 en Amérique du Nord. Au vu de ces chiffres, on peut imaginer deux liens de causes à effets. Le premier est qu'il se déroule plus de catastrophes naturelles dans les pays du Sud, ce qui est vrai, d'autant plus vrai si l'on considère que l'hémisphère Sud est plutôt océanique et le Nord plutôt continental. Le second pourrait laisser à penser que les pays moins développés, en raison de la structure même de leur économie, seraient moins lourdement frappés par les catastrophes industrielles. La réalité est tout autre et rend encore plus significatif les chiffres du rapport RN/RI : pour les pays du Sud, le nombre cumulé des victimes des sinistres technologiques est trois fois plus important que pour l'Europe et l'Amérique du Nord. Quelles sont les causes de telles disparités ?
Inégalité naturelle, la tectonique des plaques impose que la plupart des séismes et des éruptions volcaniques se produisent aux limites de celles-ci. Il en va de même des cyclones et des typhons qui se déroulent à des latitudes (qui remontent avec le réchauffement climatique) où la température des océans est supérieure à 26 0C et la force de Coriolis (due à la rotation de la Terre) suffisamment importante. Il en va de même pour les invasions de criquets, les moussons, etc. Cependant, chacun de ces fléaux doit être pondéré d'un facteur économique. Par exemple, les deux séismes de même magnitude (7) sur l'échelle de Richter, qui se sont produits l'un en décembre 1988 en Arménie et l'autre en octobre 1989 à San Francisco (cette dernière comptant pourtant une très forte densité de population) n'ont pas fait le même nombre de victimes : respectivement 25 000 et 100. Dans le premier cas, le coût a été estimé à moins d'un million de dollars ; dans le second, des centaines de millions de dollars ont été pris en charge par l'État américain et par les assureurs. Il se trouve que l'on construit en parasismique en Californie, pas en Arménie.
Il en va de même des grandes épidémies, maîtrisées dans l'hémisphère Nord grâce aux progrès des systèmes sanitaires (le sida constituant une exception notable). Ainsi, le choléra est réapparu au Pérou en 1991 et, à présent, selon l'Organisation mondiale de la santé, de 90 à 120 millions de personnes vivent sous sa menace en Amérique du Sud, en Afrique et en Asie. Dans les mêmes zones, le paludisme reste résistant : 500 millions de personnes dans le monde seraient infectées et de 1 à 3 millions en meurent chaque année. La cause de ces épidémies est essentiellement économique : de pauvres conditions sanitaires propices à leur propagation, des vaccins et des thérapies trop onéreux (sida en Afrique) pour les populations.
La démographie est bien évidemment à prendre en compte. Parmi les pays ou régions à forte densité de population (supérieure à 10 hab./km2), le Mexique, le Pérou, l'Éthiopie, l'Inde, le Pakistan, le Bangladesh, les Philippines, Java – pour ne citer que ces exemples – réunissent une faible économie, de fortes concentrations urbaines, de mauvaises conditions de travail, des risques industriels mal maîtrisés et une exposition à plusieurs types de risques naturels. De plus, certains d'entre[...]
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Écrit par
- Yves GAUTIER
: docteur en sciences de la Terre, concepteur de la collection
La Science au présent à la demande et sous la direction d'Encyclopædia Universalis, rédacteur en chef de 1997 à 2015
Classification
Médias
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