BOURGES CATHÉDRALE DE
La cathédrale Saint-Étienne de Bourges (Cher) est une église gothique construite entre la fin du xiie et la fin du xiiie siècle. Elle s’élève à l’emplacement d’une basilique romane du xie siècle consacrée à saint Étienne, agrandie au xiie siècle et victime d’un incendie à la fin de ce même siècle. Ce monument de 125 mètres de longueur, de 41 mètres de largeur et de 37,15 mètres de hauteur est érigé à l’initiative de l’évêque Henry de Sully à partir de 1195. L’église basse (crypte) est bâtie entre 1195 et 1206. Comme l’indiquent les épures tracées au sol (dessin représentant les projections d'un objet à trois dimensions), elle servit de loge aux tailleurs de pierre pendant la durée du chantier. Cette crypte tient lieu de fondation au chœur supérieur, achevé en 1214. La nef est construite de 1225 à 1250, période durant laquelle sont exécutés les cinq portails puis les tours occidentales. Après l’effondrement de la tour nord (1506), celle-ci est reconstruite de 1508 à 1537.
Le monument offre un plan fluide avec un tracé à cinq vaisseaux. La nef épouse, sans la transition d’un transept, le chevet hémicirculaire à deux déambulatoires agrémentés de cinq chapelles. En élévation, l’étagement des niveaux (grandes arcades, triforium et fenêtres hautes) est identique dans la nef et le bas-côté intérieur, suscitant ainsi l’illusion d’une élévation à cinq niveaux.
Le plan à cinq vaisseaux est emprunté à l’abbatiale de Cluny III et fait ainsi référence – à l’instar de Notre-Dame de Paris – à l’ancienne basilique Saint-Pierre de Rome construite sous l’empereur Constantin. L’absence de transept, en unifiant les espaces de la nef et du chœur, reproduit quant à lui le plan circiforme (reprenant la forme du cirque romain) de l’église Saints-Marcellin-et-Pierre-du-Latran à Rome. La simplicité de ce plan, associé à des supports fluets, favorise la création de perspectives multiples et une luminance homogène que renforce une plastique murale délibérement lisse.
L’ensemble de l’édifice est voûté d’ogives quadripartites dans les bas-côtés et sexpartites dans le haut vaisseau de la nef. Ce dernier parti implique une alternance nuancée des supports, suggérée par une légère variation de leur diamètre. À l’image des cathédrales de Chartres ou de Laon, le vieux rythme binaire est ainsi sauvegardé à l’intérieur de la nef pour ménager les habitudes visuelles des siècles précédents. L’ensemble de ces caractéristiques spatiales, plastiques et rythmiques exalte ainsi la volonté de reproduire l’espace et la fluidité des premières basiliques chrétiennes, tout en affirmant l’expression de la modernité gothique.
L’architecture est par ailleurs dotée d’une parure sculptée du xiie siècle, pour les portails latéraux certainement réemployés de la cathédrale antérieure, tandis que les fragments du jubé, conservés in situ et au musée du Louvre à Paris, ont permis de dater la réalisation des portails occidentaux des années 1230-1240. Enfin, une série de vitraux polychromes du xiiie siècle (dans le chevet) et du xve siècle (commanditée par Jacques Cœur) s’ajoutent à des reliquats de polychromies médiévales, modernes et contemporaines qui favorisent une distinction chromatique des espaces.
La cathédrale Saint-Étienne de Bourges est inscrite sur la liste du patrimoine mondial de l’U.N.E.S.C.O. depuis 1992.
Bibliographie
R. Branner,La Cathédrale de Bourges et sa place dans l’architecture gothique, trad. A. Paillard, Tardy, Paris, 1962.
Y. Christe & L. Brugger, Bourges. La cathédrale, Zodiaque, Saint-Léger-Vauban, 2000.
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Écrit par
- Arnaud TIMBERT : docteur en histoire de l'art, maître de conférences
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