CATHERINE Ire (1684-1727) impératrice de Russie (1725-1727)
Quand les Russes mettent Marienbourg à sac en 1702, Marthe Skavronskaïa fait partie du butin. Les témoignages postérieurs auront beau jeu, connaissant l'origine modeste de l'impératrice, de dénigrer sa taille « petite et ramassée », son teint « fort basané », son maintien « sans air ni grâce ». Il faut croire pourtant qu'elle ne manquait pas de charme, à en juger par sa biographie : orpheline d'un paysan livonien, elle entre au service d'un pasteur luthérien, puis épouse un dragon suédois. Le général Cheremetiev, qui commande à Marienbourg, en fait sa maîtresse, mais la vend ensuite à Menchikov. Enfin, Pierre le Grand, en 1703, l'enlève à son fidèle serviteur et ami. Elle partage la vie du souverain, elle le suit à la guerre et ne recule ni devant les orgies, ni devant la vie des camps. Quand, en 1711, lors de la campagne menée sur le Prout contre les Turcs, Pierre Ier risque l'encerclement et la captivité, c'est elle qui ranime son courage et lui communique son sang-froid. Avec un beau mépris de l'opinion, il l'épouse en 1712 et la fait couronner impératrice en 1724.
Elle n'est pas pour autant désignée pour lui succéder et, lorsque Pierre meurt intestat en 1725, le trône doit revenir, en vertu des règles traditionnelles, au futur Pierre II, petit-fils du tsar défunt et fils d'Alexis Petrovitch. Mais le souverain légitime est soutenu par l'ancienne noblesse et par le clergé ; son avènement signifierait sans doute l'abolition des grandes réformes, et à coup sûr la fin des privilèges dont jouissent les anciens fidèles de Pierre Ier. Ceux-ci n'hésitent pas : guidés par Pierre Tolstoï, ils s'assurent le concours des régiments de la garde, Semenovski et Preobrajenski, et proclament Catherine impératrice. Cette révolution de palais inaugure une longue suite d'intrigues, de complots et de coups d'État qui jalonnent jusqu'en 1741 la période dite des favoris.
Bien que complètement illettrée, Catherine a suffisamment d'énergie et d'intelligence pour continuer l'œuvre de son mari. Elle fonde l'Académie des sciences dont Pierre avait préparé les statuts. Elle laisse la direction des affaires aux favoris de ce dernier : Osterman dirige les affaires extérieures, à l'intérieur règne Menchikov, dont le pouvoir devient exorbitant, au point d'obtenir que sa fille Marie soit fiancée au prince Pierre, que Catherine désigne comme successeur au trône. Un Conseil suprême secret instauré en 1726 vient cependant limiter ses pouvoirs ; ce Conseil a une compétence universelle, puisqu'il connaît de toutes les affaires et promulgue les lois ; il réduit à peu de chose les attributions du Synode et du Sénat. Mais la mort de Catherine en 1727 laisse Menchikov au faîte d'un pouvoir retrouvé, comme mentor du nouveau tsar Pierre II.
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Écrit par
- Pierre KOVALEWSKY : docteur ès lettres, chargé de conférences à l'université de Paris-III, doyen de l'Institut Saint-Denis, Paris
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