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POZZI CATHERINE (1882-1934)

La souffrance et la maladie furent le destin de Catherine Pozzi. Elle en eut conscience: « Je suis un des points singuliers par où la souffrance de la planète rayonne. » Rarement, autant que dans cette œuvre brève, la ferveur poétique atteignit une telle intensité. Une « vie noire », c’est ainsi qu’elle qualifia « son étrange vocation à la nuit ».

Catherine Pozzi est née le 13 juillet 1882 à Paris, dans une famille de la haute bourgeoisie. Son père, le professeur Samuel Pozzi, chirurgien et premier titulaire en France d’une chaire de gynécologie, est sénateur de la Dordogne et poète parnassien à ses heures. De nombreuses personnalités fréquentent le salon familial : Leconte de Lisle, Sarah Bernhardt, José-Maria de Heredia, le comte Robert de Montesquiou, Paul Bourget, Maurice Barrès… Le mariage de ses parents allant à vau-l’eau, Catherine Pozzi subit le contrecoup d’une famille désunie

Enfant, elle apprend l’allemand et l’anglais, le grec et le latin, ainsi que diverses disciplines scientifiques. À l’âge de dix ans, elle commence à tenir un journal (Journal de jeunesse, 1893-1906). En 1908, elle épouse un ami de sa famille, Édouard Bourdet, auteur de pièces de boulevard. Ils divorceront en 1920. En 1909 naît leur fils, Claude Bourdet. Vers 1910, Catherine Pozzi est atteinte par la tuberculose, une maladie dont elle mourra. Éprouvée par les frasques de son mari, elle prend ses distances. Dans son Journal1913-1934, elle écrit à la date du 26 avril 1924 : « Au vrai, cela m’ennuie d’écrire. Ces cahiers d’un journal, sans faits et sans histoire, ne se remplissent que parce que je n’ai pas d’amie et plus de confesseur. Ce qu’ils contiennent est moins littérature que parole adressée à la sympathie… de qui ? De rien, de nul, je le sais bien… » Pour s’accomplir, Catherine Pozzi va se lancer, de manière désordonnée, dans l’étude de la philosophie, des religions, des mathématiques, des sciences.

En 1918, à trente-sept ans, Catherine Pozzi passe la première partie du baccalauréat. Le 13 juin 1918,  son père est assassiné par un ancien patient. En 1920, la rencontre avec Paul Valéry marque un tournant dans sa vie. Leur liaison passionnée, tourmentée, se prolongea près de huit ans. Valéry, marié, père de famille, peu argenté, amateur de mondanités, l’aima d’un amour exaspéré. Si leur relation donna lieu à une importante correspondance, la plupart de ces lettres furent détruites, selon le souhait de Catherine Pozzi.

À partir de 1926, elle écrit des poèmes qui retrouvent la ferveur de certains mystiques et l’élan amoureux de la poésie lyrique de la Renaissance. Elle entretient aussi un échange épistolaire avec Jean Paulhan, rédacteur en chef de la Nouvelle Revue française. Cette correspondance se poursuivra, de façon régulière, jusqu’à la mort de Catherine Pozzi. Beaucoup d’amis lui seront fidèles : Rilke, Pierre Jean Jouve, Julien Benda, Jean Guéhenno, Colette, Anna de Noailles, Jacques et Raïssa Maritain, Louis Massignon, Charles Du Bos, Ernst Robert Curtius… Agnès, nouvelle autobiographique, est publiée le 1er février 1927. L’auteur se dissimulait sous les initiales « C.K. » Le texte s’adresse à un amant idéal : « Je vous donnerai toutes les lettres dès que je vous rencontrerai, quand vous existerez vraiment. […] Ah, ma vie est changée depuis que j’ai eu l’idée de vous écrire. J’ai un ami, maintenant ; j’ai mon ami, le mien, celui à qui j’appartiendrai quand je serai une femme. Je l’ai tout de suite, je peux lui parler. Il ne peut pas répondre, mais cela ne fait rien ». 

Minée par la tuberculose, l’usage de la morphine et du laudanum, Catherine Pozzi meurt le 3 décembre 1934, à l’âge de cinquante-deux ans, six ans après sa rupture avec Paul Valéry. En 1935 sont publiés les six poèmes qu’elle considérait comme son testament littéraire : [...]

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Écrit par

  • : professeur émérite des Universités, membre correspondant de la Real Academia Española

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  • VALÉRY PAUL (1871-1945)

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    ...limitation tout à coup avérée de son être déterminé. Plus secrètement, aussi, les « Fragments » gardent traces de la rencontre, en 1920, de l'écrivain Catherine Pozzi, en qui Valéry, par une passion qui fut aussi de vive intelligence, eut le sentiment de pouvoir découvrir sa Pareille. Par l'espoir entrouvert...