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CAULERPA TAXIFOLIA

L' algue verte tropicale Caulerpa taxifolia est apparue en Méditerranée en 1984, au pied du Musée océanographique de Monaco où elle était cultivée dans ses aquariums. Observée sur un mètre carré cette année-là, elle s'est développée sur un hectare en 1989. Elle s'est ensuite répandue très rapidement le long des côtes françaises, italiennes, croates, espagnoles (Baléares) et tunisiennes. Durant les années 1990, Caulerpa taxifolia a fait l'objet d'une attention soutenue de la part des médias qui ont suivi son expansion et relayé la vive polémique entre les scientifiques méditerranéens et les chercheurs monégasques concernant son origine : déversement accidentel, mettant en cause le Musée océanographique de Monaco, ou variante morphologique de Caulerpa mexicana provenant de la mer Rouge via le canal de Suez. Des analyses génétiques ont montré en 1998 que la souche cultivée dans les aquariums et celle qui a été trouvée en Méditerranée sont parfaitement identiques, alors qu'elles se différencient des souches des mers tropicales. Ainsi, l'origine de Caulerpa taxifolia a pu être reconstituée : elle a été récoltée par des aquariologistes au début des années 1960 dans une baie tempérée de la côte ouest de l'Australie (vers Brisbane) ; par les échanges effectuées entre les gestionnaires d'aquariums publics, elle a ensuite été cultivée en France, à Nancy, puis à Monaco au début des années 1980.

Bien que les campagnes soutenues d'informations pour ne pas disséminer l'algue (qui se développe par simple bouturage, reproduction dite végétative) avec les ancres et le matériel de pêche aient ralenti la dissémination lointaine, la dynamique d'invasion a été régulière de 1984 à 2004. À partir de cette date, les premiers signes de stabilisation, voire de régression locale, ont été enregistrés. Cette tendance s'est confirmée depuis lors. L'algue a disparu de certains lieux (port de Saint-Cyprien dans les Pyrénées-Orientales, ports de Cagnes-sur-Mer et de Théoule dans les Alpes-Maritimes) et a sévèrement régressé dans les zones les plus envahies (rade d'Agay, rade de Villefranche-sur-Mer, Cap Martin...). Les surfaces concernées ont été réduites de 70 à 80 p. 100 sur les côtes françaises par rapport à 2004. Des constats similaires ont été effectués en Espagne (Baléares), en Italie et en Croatie.

La cause de cette régression généralisée reste méconnue. Quatre hypothèses ont été formulées : succession d'hivers longs, dégénérescence génétique (comme aucune algue femelle n'a été introduite, le mode de reproduction se fait uniquement par bouturage), appauvrissement des sols envahis, bactéries symbiotiques défaillantes ou pathogènes. Elles n'ont pas encore pu être vérifiées. Dans ces conditions, il convient donc de rester très prudent sur tout pronostic d'évolution d'autant plus que cette algue persiste encore avec des densités élevées dans certaines zones et que de nouvelles colonisations ont été constatées durant l'été 2011.

Par ailleurs, deux autres espèces d'algues du genre Caulerpa originaires des régions tempérées du sud de l'Australie, ont également été introduites en Méditerranée et poursuivent leur invasion : Caulerpa racemosa, observée depuis 1990, présente une progression fulgurante (reproductions sexuée et végétative), touchant en 2011 tous les pays du pourtour méditerranéen ; Caulerpa taxifolia variété distichophylla, se distinguant de Caulerpa taxifolia par des feuilles plus fines et plus ramifiées, est apparue en 2006 dans le port d'Iskenderun, au sud de la Turquie, puis a été observée à Chypre, en Syrie et en Sicile.

Toutes ces Caulerpa envahissantes sont capables de s'étendre, de la surface jusqu'à 60 mètres de profondeur, sur tout support (sable, vase, roche). Par[...]

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Écrit par

  • : professeur au laboratoire Environnement marin littoral, université de Nice-Sophia-Antipolis

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