FREINET CÉLESTIN (1896-1966)
Célestin Freinet, instituteur, est certainement l'un des plus grands pédagogues français du xxe siècle. Son nom, qui est aussi celui de son mouvement, le « mouvement Freinet », est connu dans des dizaines de pays, en Europe bien sûr, mais aussi en Amérique centrale, en Amérique latine, en Afrique, au Moyen et en Extrême-Orient. Freinet ayant été lui-même créateur de coopératives agricoles et enseignantes, on retrouve un certain nombre de « compagnons » de Freinet, ou de membres du mouvement, à l'origine ou parmi les fondateurs de nombreuses structures coopératives nationales. Nous avons pu ainsi voir des écoles ou des groupes s'en réclamant, en France, au Mexique, au Brésil, au Japon. Ce qui est particulièrement marquant, c'est que le mouvement Freinet dépasse les frontières dès les années 1930, pour acquérir une renommée mondiale à partir des années 1950.
Célestin Freinet n'est ni séparable de sa femme, Élise Lagier Freinet, tout autant institutrice qu'artiste, dont l'apport à la question de l'expression libre fut décisif, ni des cinq cents compagnons du début des années 1930, des milliers des années 1950, et des dizaines de milliers qui en furent, et « en sont » encore aujourd'hui. Il y a parmi ces enseignants de véritables experts des « pédagogies actives », et nous insisterons d'emblée sur le fait qu'elles ont de surcroît gagné, depuis l'école, progressivement, le terrain de l'animation, de l'éducation, du travail social, en réseaux et noyaux d'influence qui demeurent vivants et exemplaires. Nous avons là une pédagogie à visages multiples.
Itinéraire d'un franc-tireur
Célestin Freinet est né en 1896 à Gars, dans les Alpes-Maritimes. Il fait ses études à Grasse, à l'École primaire supérieure, puis à l'École normale de Nice, pour devenir instituteur. Il épouse Élise Lagier en 1926.
Cette région alpine et sauvage dont l'imaginaire ne le quitta jamais, le fit instituteur, communiste « critique », militant avant la lettre des droits de l'enfant et de la différence, acteur engagé de l'école et de la politique éducative française.
La campagne de Maurras et de la droite contre Freinet, alors qu'il est en poste à Saint-Paul-de-Vence, parvient à l'évincer de l'Éducation nationale pour des raisons politiques : c'est « l'affaire de Saint-Paul », qui dure de 1932 à 1933. En 1935, il fonde et construit à Vence, avec de nombreux soutiens – amis, intellectuels, paysans locaux, immigrés et réfugiés –, son école, « Le Pioulier » .
Le 16 mars 1940, en raison de son appartenance au Parti communiste, il est placé en détention dans le camp de d'internement administratif de Saint-Maximin. Libéré en octobre 1941 et placé en résidence surveillée, il participera à l'organisation de la résistance, et deviendra dirigeant du maquis de La Vallouise, jusqu'à la libération de Gap, en 1944. Reconnu par la Résistance, il sera aux côtés de Langevin et Wallon, et de leur Plan de rénovation de l'école, mais là encore en gardant une distance critique.
Nous avons à faire avec Freinet et son mouvement à une véritable refondation de l'école, remise fondamentalement en contact avec la vie et la réalité. Le savoir n'est pas né à l'école. Il vient de la vie quotidienne et de l'intelligence sociale.
Le Pioulier, acquise par l'État, est devenue école publique expérimentale, dirigée par Madeleine Freinet, la fille des Freinet, et Jacques Bens, son mari, et sera inscrit au patrimoine du xxe siècle des Alpes-Maritimes, en 1995.
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Écrit par
- Jacques PAIN : professeur des Universités en sciences de l'éducation à l'université de Paris-X-Nanterre
Classification
Média
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