CENS
Le mot « cens » a désigné au Moyen Âge deux types de redevances distincts. D'une part, le cens est la redevance que devait annuellement un serf ou tout autre non-libre comme marque de sa dépendance envers son seigneur : c'est le « chevage » ou « chef cens » (cens par tête) des serfs, ou le cens en argent et en cire de ceux qui se sont « recommandés » à une église. Cette signification du mot disparut avec la quasi-extinction du servage dès la fin du Moyen Âge. D'autre part — et c'est cette signification qui prévaudra jusqu'à la Révolution —, le cens est une redevance fixe due au seigneur par son tenancier pour la maison et les terres, ou « censive », qu'il tient de lui. D'abord mixte, en nature ou en argent, le cens fut progressivement transformé par les seigneurs à court de numéraire en redevance fixe en argent ; mais le pouvoir d'achat de la monnaie ayant baissé considérablement et régulièrement à partir du xiiie siècle, le cens ne fut bientôt que d'un maigre rapport pour le seigneur. Cependant, étant la redevance recognitive de l'existence du droit éminent du seigneur, le cens fut toujours jalousement perçu, parce que dans son sillage se trouvaient des droits substantiels sur les héritages (le « relief », l'« échoîte ») et sur les transactions (« lods et ventes »). C'est pourquoi le cens, irrachetable, fut la plus généralisée des redevances seigneuriales jusqu'en 1793. Des « censiers », ou « terriers », tenus à jour enregistraient les sommes dues par chaque censitaire, qui devait en outre faire acte de « reconnaissance » lors de son entrée en jouissance, puis à dates fixes. La suspension effective du cens, universellement réclamée en 1789, est due autant au caractère humiliant de cette institution qu'à son poids proprement économique.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Françoise MOYEN : licenciée en histoire
Classification