CENS ÉLECTORAL
Avant d'en venir au suffrage universel, la plupart des régimes représentatifs parlementaires modernes, à l'exemple de celui de l'Angleterre, ont attaché d'abord le droit de vote à la possession d'une certaine fortune. Leur justification théorique : seuls les citoyens aisés ont l'instruction nécessaire pour participer au gouvernement, seuls ils sont directement intéressés à une saine gestion de l'État dont ils font les frais. Les contributions directes payées par les citoyens étant, en principe, proportionnelles à leurs fortunes, la somme payée annuellement au fisc (dite pour cela cens électoral) servit de critère pour la concession du droit de vote. Les constitutions françaises de l'époque révolutionnaire, prévoyant des élections à plusieurs degrés, établissaient des conditions de fortune différentes pour chacun d'entre eux, conditions généralement mesurées en salaires de journées de travail, et réservaient l'éligibilité aux propriétaires fonciers. La Charte de 1814 simplifia les choses en fixant uniformément le cens électoral à 300 F et celui d'éligibilité à 1 000 F. Sous ce régime, le corps électoral (le pays légal) se trouva réduit à 90 000 individus, tandis que le nombre des éligibles ne dépassait pas 15 000. Après la révolution de juillet 1830, la loi du 19 mai 1831 réduisit à 500 F le cens d'éligibilité et à 200 F celui d'électeur. De plus, elle admettait à l'électorat, au titre de la capacité, et moyennant un « demi-cens » de 100 F, les membres de l'Institut, les officiers des armées de terre et de mer justifiant de certaines conditions de fortune et de domicile. Sous le régime de cette loi qui devait rester en vigueur jusqu'à la révolution de 1848, le nombre des électeurs s'éleva jusqu'à 241 000, par le simple jeu de l'enrichissement de la nation, mais sans porter atteinte au monopole du pouvoir exercé par l'aristocratie de l'argent.
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Écrit par
- Guillaume de BERTHIER DE SAUVIGNY : professeur à l'Institut catholique de Paris
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