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CHAVEZ CESAR (1927-1993)

Cesar Chavez - crédits : MPI/ Archive Photos/ Getty Images

Cesar Chavez

Quiconque a vécu aux États-Unis dans les années 1960 ne peut avoir oublié Cesar Chavez, ce petit homme trapu, ni très beau ni très séduisant, orateur médiocre, mais qui avait l'apparence d'un juste, à la fois bon et déterminé. Il dirigeait alors le boycottage des raisins de table de Californie afin d'obtenir des salaires décents pour les ouvriers agricoles qui en faisaient la cueillette.

Il naît en 1927 à Yuma, dans l'Arizona, dans la petite ferme de son père, lui-même immigré du Mexique. Ruiné par la dépression des années trente, celui-ci part en Californie où il tente de vivre, bien mal, comme saisonnier : Steinbeck l'a décrit mieux que personne dans Les Raisins de la colère. Rebelle dans l'âme, il essaie d'organiser, sans guère de succès, ces milliers d'hommes qu'il côtoie pour obtenir des conditions de travail décentes. L'enfant n'oubliera pas : il fera comme son père. Ouvrier agricole, il milite de 1952 à 1962 dans une organisation d'entraide, la Community Service Organization, dont il devient le directeur en 1958.

Il se rend compte que les grands propriétaires resteront inébranlables sur la question des salaires, inférieurs aux taux minimaux, et des conditions de travail, épouvantables, à moins qu'ils ne trouvent devant eux une organisation capable de formuler les revendications de ces travailleurs (souvent immigrants illégaux), d'imaginer des modes d'action originaux et de leur donner un écho national : il faut un syndicat. En 1962, il saute le pas et fonde la National Farm Workers Association (devenue United Farm Workers en 1966, à l'adhésion à l'A.F.L.-C.I.O.), qui regroupe d'abord les cueilleurs de raisin. Grèves et manifestations se succèdent. Le déclic et l'heure de gloire surviennent en 1968 lorsque, à la suite d'une grève de la faim d'un mois, Robert Kennedy, alors en pleine campagne électorale, va le voir et lui fait accepter (devant les caméras) une tranche de pain. Dès lors, le boycottage jusqu'ici inconnu prend une importance nationale : 17 millions de personnes, dit-on, refusent de manger du raisin californien. Les plus gros producteurs cèdent et signent une convention collective.

Les travailleurs agricoles s'organisent peu à peu. Mais tout va conspirer pour anéantir ces conquêtes : la personnalité quelque peu rigide de Chavez, la désaffection à l'égard du syndicalisme, la mécanisation croissante qui supprime des emplois, avec des immigrés qui se reconvertissent alors dans les services (restauration, santé et confection), et la contre-offensive des producteurs qui s'adressent au syndicat le plus corrompu des États-Unis, celui des camionneurs (teamsters) pour torpiller le syndicalisme intègre de Chavez. À sa mort, l'United Farm Workers ne comptait plus que le cinquième des adhérents de la belle époque, Chavez était fort discuté au sein du syndicat qu'il avait fondé et l'agri-business californien a repris suffisamment de superbe pour revenir à ses pratiques anciennes à l'égard des saisonniers.

— Marie-France TOINET

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Écrit par

  • : directeur de recherche au Centre d'études et de recherches internationales de la Fondation nationale des sciences politiques

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Média

Cesar Chavez - crédits : MPI/ Archive Photos/ Getty Images

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