HIMALAYENNE CHAÎNE
Exceptionnelle par son altitude – beaucoup de ses sommets dépassent 8 000 m –, la chaîne himalayenne est également exceptionnelle sur le plan géologique. Elle représente la chaîne de collision type, dont il n'existe actuellement sur le globe aucun autre équivalent. On ne connaît nulle part ailleurs d'entailles d'érosion aussi importantes qui permettent d'étudier dans d'excellentes conditions la partie profonde de charriages eux aussi exceptionnels par leur extension et par leur amplitude. De plus, le contexte global de cette chaîne apparaît plus simple et plus clair que partout ailleurs.
Dans ces conditions, on comprend que, malgré de grandes difficultés d'accès, cette chaîne ait depuis longtemps attiré les géologues de tous pays. Ils accompagnèrent d'abord les expéditions d'alpinistes, puis s'organisèrent peu à peu de façon indépendante. Actuellement, les études géologiques s'y poursuivent activement à une échelle internationale. En particulier du côté tibétain, qui resta longtemps inaccessible, de nombreuses recherches ont été entreprises par les géologues chinois puis par des équipes franco-chinoises dans le cadre d'un programme de coopération scientifique.
La plupart des sommets de plus de 7 000 mètres se trouvent dans la Haute Chaîne, en forme d'arc, qui domine sur 2 000 kilomètres les basses plaines du Gange, au nord du continent indien ; de fait, cette Haute Chaîne appartient encore, géologiquement, à la bordure nord, intensivement déformée, de ce continent.
Cependant, d'autres sommets d'altitudes comparables se trouvent dans un contexte tout à fait différent. Ils sont situés au nord de la suture océanique de l'Indus-Tsang-po, qui marque la limite septentrionale du continent indien. C'est le cas du Karakoram, où se trouve le K2 (Chogori, 8 611 m), et du sud du Tibet, dans ce qu'on appelle parfois le Transhimalaya. L' Himalaya compris au sens large s'étend donc sur plusieurs unités géologiques ; cela nécessite de le replacer dans le cadre général du sud-est de l'Asie.
L'Himalaya et la tectonique des plaques
La collision Inde-Asie
On sait maintenant avec certitude que le continent indien ne s'est accolé à l'Asie qu'à une époque relativement récente, il y a 40 à 45 millions d'années ; on connaît aussi les grandes lignes de l'histoire de ce continent avant qu'il n'entre en collision avec l'Asie.
Il y a 85 millions d'années, l'Inde appartenait encore à un grand continent méridional, le Gondwana, qui comprenait aussi l'Afrique, l'Antarctique et l'Australie ; elle était alors séparée de l'Asie par un océan de 6 000 kilomètres de large, appelé la Néotéthys.
Le continent méridional s'est ensuite disloqué : l'Antarctique, l'Australie et l'Inde se sont séparées de l'Afrique, créant un nouvel océan, qui, en s'agrandissant, formera l'océan Indien actuel.
Après s'être séparée de l'Afrique, vers − 85 Ma, l'Inde s'est déplacée vers le nord à une vitesse de plus de 10 centimètres par an (c'est-à-dire plus de 1 000 km en 10 millions d'années !). L'Asie étant restée à peu près stable en latitude, cela implique que la Néotéthys a diminué de largeur au fur et à mesure que l'Inde a migré vers le nord. Ce rétrécissement n'a été possible que grâce au fonctionnement de plusieurs zones de subduction situées au sud de l'Asie de l'époque. L'une d'elles se situait à sa bordure sud, où se formait une chaîne de type andin actuellement située au Sud-Tibet. Une autre subduction fonctionnait aussi au sud d'un arc volcanique intra-océanique, qui correspond actuellement à ce qu'on appelle l'arc de Kohistān (nord du Pakistan) et du [...]
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Écrit par
- Maurice MATTAUER : professeur à l'université des sciences et techniques du Languedoc, Montpellier
- Jacques-Louis MERCIER : professeur à l'université de Paris-Sud, Orsay
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