HIMALAYENNE CHAÎNE
La structure de la chaîne
Le style de la déformation
La déformation de la chaîne himalayenne est caractérisée, pour l'essentiel, par l'existence de grands chevauchements qui cisaillent toute la croûte continentale. Ceux-ci font parfois remonter en surface le manteau supérieur, et leurs flèches dépassent couramment 100 kilomètres. Le style de la déformation associée varie considérablement.
Dans les parties profondes, la déformation est ductile, contemporaine d'un métamorphisme qui atteint le faciès amphibolite (avec du grenat, du disthène et de la sillimanite). Les roches sont alors transformées sur plusieurs kilomètres d'épaisseur en micaschistes et en gneiss, typiques de la Haute Chaîne. Ceux-ci sont caractérisés par une foliation et par une linéation d'allongement (direction d'étirement du matériau). Dans les sédiments sus-jacents moins métamorphisés, la foliation passe à une schistosité. Par contre, vers le bas, il arrive souvent que les roches les plus métamorphiques aient fondu ; il se forme alors des granites clairs, particuliers, appelés leucogranites, qui se présentent en gros massifs (par exemple au Makālu, 8 470 m, ou au Manāslu, 8 125 m), ou bien apparaissent en filons généralement déformés par étirement (« boudinage »).
Dans les parties plus superficielles, les séries sédimentaires sont plissées avec une intensité qui dépend de leur situation dans la chaîne et avec un style qui varie avec la nature des roches. Les plis les plus simples se trouvent au pied et en avant de la Haute Chaîne, dans les Siwāliks, et dans leur prolongement au Pakistan. Là, les sédiments cénozoïques continentaux (comme ceux de couleur rouge de la région de Murree au Pakistan) qui ont été formés par suite de l'érosion de la chaîne en formation, sont affectés par des grands plis visibles sur des photographies prises par des satellites ; ces plis sont jeunes (moins de 10 millions d'années) et ils continuent à se former. On retrouve des séries plissées, toujours bien visibles sur des photographies spatiales, au nord de la Haute Chaîne, au Tibet et au Ladakh, mais le plissement est beaucoup plus intense (une schistosité est souvent présente) et plus complexe. Il affecte des séries allant du Paléozoïque inférieur à l'Éocène ; il est probablement polyphasé.
Entre ces deux régions plissées, la partie métamorphique de la chaîne est caractérisée par une absence apparente de plissement ; en fait, celui-ci a un style très particulier, et il est masqué par le développement de la foliation ; seuls des plis tardifs, tels ceux de l'Annapurna, déversés vers le nord, sont bien visibles.
Les grands chevauchements
La carte de la figure et les coupes de la figure 7 montrent la géométrie d'ensemble de ces chevauchements. Si certains fonctionnent encore actuellement, la plupart, plus ou moins anciens, sont « fossiles ». Sur la coupe transversale du Népal, on peut assez bien préciser leurs époques de formation ; ils sont d'autant plus jeunes qu'ils sont plus méridionaux. Cela correspond à la progression de la chaîne vers le sud après la collision. La plupart des grands chevauchements ont reçu une dénomination internationale que nous conservons ici (en anglais, chevauchement : thrust).
Le Main Boundary Thrust (M.B.T.), situé au front de la chaîne, est considéré comme un grand chevauchement actif ; il se manifeste périodiquement par des tremblements de terres catastrophiques, accompagnés par des ruptures de surface en faille inverse. Il a provoqué le plissement des dépôts récents des Siwāliks. On considère qu'il se prolonge à grande profondeur, où, en raison de la température, la déformation devient ductile, et, par conséquent, son fonctionnement devient asismique.
Le Main Central Thrust (M.C.T.) qui apparaît au cœur même de la chaîne est sans conteste le plus beau chevauchement[...]
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Écrit par
- Maurice MATTAUER : professeur à l'université des sciences et techniques du Languedoc, Montpellier
- Jacques-Louis MERCIER : professeur à l'université de Paris-Sud, Orsay
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