CHAMBRE ÉTOILÉE
Cour de justice anglaise sous les Tudors et les premiers Stuarts. À l'origine, on trouve l'exercice, par le Conseil du roi, d'une justice retenue, rendue dans une salle du palais au plafond constellé d'étoiles. Aux conseillers ont pu être adjoints des experts, et Henri VII, en 1487, a ainsi établi une cour chargée de poursuivre les coupables d'infractions à la paix publique, et particulièrement les grands du royaume qui échappent aux juridictions communes. Au cours du xvie siècle, l'évolution conduit à l'instauration d'une véritable cour de justice régulière, appliquant les dispositions de la common law et apportant son appui aux autres tribunaux lorsque leurs sentences sont bafouées ; cette cour est alors amenée à juger aussi les cas de fraude, de faux et de parjure que les cours ordinaires sont incapables d'évoquer.
La Chambre étoilée (Star Chamber) est un instrument de pouvoir absolu entre les mains du roi et lui permet d'obtenir rapidement satisfaction dans les cas de désobéissance, de rébellion ou de contestation des lois et arrêts ; elle peut aussi, peut-être dès Édouard VI, à coup sûr sous Élisabeth Ire, être saisie par des particuliers qui, ayant engagé ailleurs des procès civils, essaient d'accélérer la décision en présentant leurs adversaires comme des menaces pour l'ordre. Elle prononce des peines variées, à l'exclusion de la peine de mort, et condamne souvent à des amendes, à des châtiments corporels accompagnés de l'exposition au pilori, voire à la mutilation des oreilles. Sous les premiers Stuarts, elle conserve ses prérogatives traditionnelles, mais son rôle est en fait accru : les prétentions autoritaires de la monarchie multiplient les tentations de désobéissance, par exemple à propos du paiement d'impôts extraordinaires ; l'intolérance religieuse pousse la hiérarchie anglicane à accuser de sédition les non-conformistes, et très particulièrement les auteurs de libelles et d'écrits hérétiques ou anti-épiscopaux, et des poursuites pour rébellion sont même parfois engagées contre des paroissiens insuffisamment soumis aux prescriptions de la pratique religieuse. La cour, composée en majorité de magistrats professionnels, dont les présidents des autres grandes cours royales, et présidée par le chancelier de l'Échiquier, est ouverte à d'autres participants et on y voit siéger, à l'époque du thorough system de Charles Ier, plusieurs évêques, dont Laud, qui sont en même temps les ministres ou les conseillers du roi.
Répondant au besoin d'une justice expéditive, la Chambre étoilée s'attire de croissantes inimitiés : celle des puritains, que révolte la condamnation, en 1636, au supplice de l'essorillement de Prynne, Burton et Bastwick, auteurs de « libelles séditieux » ; celle de notables, qui réprouvent la sévérité de condamnations à des peines corporelles que les tribunaux ordinaires n'auraient pas osé prononcer contre des membres de la gentry ; celle de riches, outrés par les efforts de la cour pour appliquer les arrêts contre les enclosures ou contre l'installation d'aristocrates nouveaux à Londres ou par la punition des fraudeurs d'un fisc usurpateur.
Passant de plus en plus pour l'instrument d'une autorité despotique, la Chambre étoilée devient un des symboles de l'arbitraire ; elle partage ce discrédit avec les cours identiques qui ont été créées dans le cadre des conseils du Nord, du Pays de Galles et dans le duché de Lancaster. En juillet 1641, le Parlement vote l'abolition de toutes ces instances judiciaires à compter du 1er août suivant. La Restauration n'osera pas revenir sur cette suppression, malgré les avantages très réels que présentait, pour le gouvernement et pour de nombreux particuliers, la Chambre étoilée.
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Écrit par
- Roland MARX : professeur à l'université de Paris-III-Sorbonne nouvelle
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