CHANGE L'intégration monétaire européenne
À la recherche de la stabilité des changes
Face à la détérioration du système de Bretton Woods, des initiatives sont prises pour constituer une zone de stabilité des changes en Europe. La première – le plan Werner – est très ambitieuse, puisque le Conseil de la Communauté européenne ratifie, en 1971, un plan pour la réalisation, en 1980, de l'union économique et monétaire, un programme qui sera abandonné quelques années après. Les deux suivantes – le serpent monétaire et le Système monétaire européen – sont en retrait, même si c'est dans ce contexte qu'est créée l'unité de compte européenne (European Currency Unit, E.C.U.), qui peut être considérée comme le précurseur de l'euro. Elles se limitent à la recherche de la stabilité des changes alors qu'existent encore dans la plupart des pays des mesures de contrôle des mouvements de capitaux.
Le plan Werner
Le rapport Werner, présenté le 8 octobre 1970, tient compte à la fois de la thèse économique et de la thèse monétaire, en posant comme affirmation du principe de faire progresser parallèlement l'intégration monétaire et la convergence des politiques économiques. Walter Hallstein qualifie à ce propos le rapport de « compromis entre les deux tendances, avec un léger penchant vers la thèse économiste ». Il définit ainsi la notion d'union monétaire : « Une union monétaire implique à l'intérieur la convertibilité totale et irréversible des monnaies, l'élimination des marges de fluctuation des cours de change, la fixation irrévocable des rapports de parité et la libération totale des mouvements de capitaux. » Et d'ajouter : « L'union économique et monétaire permettra de réaliser une zone à l'intérieur de laquelle les biens et les services, les personnes et les capitaux circuleront librement et sans distorsions de concurrence, sans pour autant engendrer des déséquilibres structurels ou régionaux. »
Le rapport Werner prend également en compte l'indispensable transfert de compétences du national vers le communautaire, grâce à l'initiative institutionnelle de la mise en place d'un système communautaire des banques centrales. Un rôle de plus en plus important est prévu pour le Comité des gouverneurs des banques centrales en matière de coordination de la politique monétaire et du crédit. Il doit en particulier définir en ce domaine les orientations générales de la Communauté. Il doit pouvoir adresser des avis et des recommandations aux banques centrales des pays membres et donner des avis au Conseil et à la Commission.
Le rapport Werner prévoit, en fonction d'un « horizon temporel », que l'U.E.M. soit réalisée progressivement, par étapes :
– La première étape (1970-1971) devrait voir s'accélérer l'intégration des marchés financiers, notamment par l'accroissement des mouvements de capitaux. En conséquence de quoi, obligation est faite aux États d'adopter des mesures d'harmonisation fiscale. En ce qui concerne la coordination des politiques économiques, il est proposé de mettre en place un système d'indicateurs d'alerte, afin de rendre plus efficace la coordination des politiques conjoncturelles. De plus, les grandes orientations à moyen terme en matière de politique budgétaire doivent être définies en commun.
– La deuxième étape (1972-1975), jugée « décisive », doit être « principalement consacrée à assurer la convergence des évolutions économiques des pays membres et à amorcer la formation d'un ensemble monétaire individualisé ». Pour ce faire, les lignes directrices de la politique économique globale sont définies en commun, en fixant spécifiquement les orientations de la politique conjoncturelle et budgétaire. Au niveau monétaire, il est prévu une limitation à 1 p. 100 des écarts de cours entre les monnaies des pays membres. Au terme[...]
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Écrit par
- Christian BORDES : professeur à l'université Paris-I-Panthéon-Sorbonne
Classification
Médias
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