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CHANGE Les régimes de change

Unions monétaires

Une littérature économique assez ancienne, commençant avec les écrits de Robert Mundell dans les années 1960, a défini les conditions d'appartenance à un groupe de pays ayant la même monnaie, groupe dit « zone monétaire optimale ». Les critères retenus sont les suivants :

– Une forte mobilité des facteurs de production et plus particulièrement du facteur travail. Si un des pays de l'union monétaire souffre d'un choc défavorable spécifique (ou asymétrique), lorsqu'il y a monnaie unique, il ne peut, d'après cette théorie, stabiliser son taux de chômage que si la main-d'œuvre peut s'expatrier vers les pays de la zone monétaire où l'activité est plus forte.

– Une diversification internationale semblable parmi les pays membres de l'union. Une diversification productive différente implique la présence de chocs, spécifiques à telle ou telle production ou industrie, que ne connaissent pas les autres pays. Ce critère pose problème, puisque l'unification monétaire elle-même peut pousser à la spécialisation des différents pays. À l'intérieur d'une zone monétaire où le risque de change a disparu, il est probablement optimal de spécialiser les régions, pour profiter des avantages comparatifs, des rendements d'échelle croissants. L'unification monétaire aboutirait alors à l'apparition de chocs spécifiques aux pays – dits chocs asymétriques – qui sont paradoxalement, comme on va le voir, une des raisons majeures pour ne pas constituer d'union monétaire.

– Une intégration financière forte. S'il existe des déséquilibres entre l'offre et la demande d'épargne, et si les capitaux ne circulaient pas facilement entre les pays, des modifications des taux de change seraient nécessaires. On peut penser que l'unification monétaire, faisant disparaître le risque de change, accroît la mobilité internationale du capital et permet donc une allocation plus efficace de l'épargne, ce qui est un de ses objets.

Les chocs asymétriques ou les asymétries structurelles rendent donc les unions monétaires difficiles à mettre en place, puisque la politique monétaire commune ne peut pas compenser les chocs spécifiques aux pays. En conséquence, il est important de ne pas constituer d'union monétaire entre des pays qui présentent systématiquement des aléas dissemblables, ou qui sont structurellement trop différents de par leur spécialisation productive, le fonctionnement de leur marché du travail ou leur niveau de développement.

Même entre des pays raisonnablement similaires, comme ceux de la zone euro, on voit apparaître des chocs asymétriques ou des différences structurelles. La nature des négociations salariales n'est pas la même en France ou en Allemagne, la taille de l'industrie et des services diffère, la structure géographique des exportations n'est pas la même.

L'écart d'inflation entre les pays de la zone est le signe de l'existence de ces asymétries.

La première solution proposée par Mundell (la mobilité de la main-d'œuvre, qui est forte par exemple aux États-Unis) n'est pas acceptable partout, dans la zone euro en particulier. Les chômeurs ne vont pas se déplacer massivement d'un pays européen à l'autre au gré des écarts conjoncturels. La seule manière de rendre une union monétaire viable est alors le fédéralisme fiscal, c'est-à-dire l'existence de transferts publics automatiques ou organisés entre les pays. Aux États-Unis, lorsqu'un État subit un recul cyclique, puisque la plupart des impôts et les transferts sociaux sont fédéraux, cet État profite d'une baisse des impôts qu'il paie (par exemple, les impôts indirects ou les impôts directs payés par les résidents de l'État sont plus faibles), d'une hausse des transferts qu'il reçoit (par exemple, les prestations chômage reçues par les résidents[...]

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Écrit par

  • : directeur des études économiques, Caisse des dépôts et consignations

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Médias

Interventions de change - crédits : Encyclopædia Universalis France

Interventions de change

Taux du change euro-dollar - crédits : Encyclopædia Universalis France

Taux du change euro-dollar

États-Unis - zone euro : taux court et croissance - crédits : Encyclopædia Universalis France

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