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THOMAS CHANTAL (1945- )

Chantal Thomas - crédits : Hermance Triay/ Opale/ Leemage/ Bridgeman

Chantal Thomas

Chantal Thomas est née le 20 janvier 1945 à Lyon. Directrice de recherche au CNRS, spécialiste du xviiie siècle, élue à l’Académie française le 28 janvier 2021, elle est essayiste (La Reine scélérate. Marie-Antoinette dans les pamphlets, 1989 ; Thomas Bernhard, 1990), romancière, auteure de pièces de théâtre et fait de son érudition une promenade élégante et souriante tournée vers le siècle des Lumières, en compagnie des grands libertins, comme Sade – L’Œil de la lettre (1978) – et Casanova – Un voyage libertin (1985) –, et des femmes qui tiennent salon, Mme du Deffand, Mme de Staël… – Un air de liberté. Variations sur l’esprit du xviiie siècle (2014). Chantal Thomas fait des lettrés subversifs du xviiie siècle des passeurs du goût du plaisir et du désir d’écrire.

Un théâtre d’ombres

À travers ses romans – Les Adieux à la reine (prix Femina 2002, adapté au cinéma par Benoît Jacquot en 2012), Le Testament d’Olympe (2010) et L’Échange des princesses (2013), dont elle scénarise le film réalisé par Marc Dugain en 2017 –, on voit se dessiner une prédilection pour la régence de Philippe d’Orléans, le jeune Louis XV à la cour, les derniers jours de Marie-Antoinette à Versailles.

Dans ces romans, Versailles, précisément, fait miroiter les apparences, jouer les illusions et les masques, et briller le faste des cérémonies. Or qu’il s’agisse, dans Les Adieux à la Reine, de la jeune lectrice qui éprouve sur les parquets du château la légèreté de ses pas, ou de la reine Marie-Antoinette, tout aussi gracile, qui marque un goût prononcé pour le théâtre de poupées, ou encore, dans L’Échange des princesses, de l’évocation du double mariage imaginé par le Régent entre, d’une part Louis XV âgé de onze ans avec la très jeune infante d’Espagne, et d’autre part la fille du Régent, Mademoiselle de Montpensier, âgée de douze ans, avec le prince des Asturies, héritier du trône d’Espagne, Chantal Thomas multiplie les exemples de manipulation par des marionnettistes d’enfants-automates.

Car la scène du pouvoir est ailleurs. Elle ressemble bien souvent à un théâtre d’ombres. Chez Sade, l’amour désintéressé du bien public, dans la vision révolutionnaire d’un peuple libre, ne représente qu’une phase dans la lutte immémoriale pour le pouvoir, jusqu’à ce que le rapport de forces se renverse de nouveau. Or, la pensée sadienne est anti-démocratique. Les libertins, serviteurs de l’État, dominent les mécanismes du monde ; le plaisir et le vice appartiennent à la classe fortunée, tandis que les prescriptions morales ne valent que pour les opprimés. Le moteur des actions est le règne de l’amour-propre, la convoitise de la place au-dessus de soi.

Si Sade et Casanova trouvent une forme de salut à travers l’écriture, la lecture et le théâtre, cet amour de la langue trouve un écho dans les valeurs portées par Roland Barthes, dont Chantal Thomas suivit le séminaire et qui fut son directeur de thèse : l’exigence d’une quête intellectuelle, la singularité d’un style, une attention sans faille à l’autre (Pour Roland Barthes, 2015).

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Média

Chantal Thomas - crédits : Hermance Triay/ Opale/ Leemage/ Bridgeman

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