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BOYER CHARLES (1899-1978)

Seul acteur à avoir su incarner une mythologie française à Hollywood, Charles Boyer a promené une nonchalance amusée tout au long de ses multiples apparitions à l'écran. Séducteur accrédité, il a choisi (en août 1978) une mort qui lui confère à jamais une aura romantique.

Charles Boyer est né à Figeac, dans le Lot. Attiré très jeune par les métiers du spectacle, il doit se ranger au souhait de sa famille de le voir suivre des études secondaires, voire supérieures. « Monté » à Paris pour préparer une licence de philosophie, il suit parallèlement les cours du Conservatoire. Très vite, grâce aux conseils de Lucien Guitry, il mène une intéressante carrière théâtrale, interprète des pièces de P. Benoit, Sacha Guitry. C'est la rencontre avec le dramaturge Henry Bernstein qui va lui permettre d'imposer, dans des mélodrames mondains, un personnage charmeur, élégant, à la voix étonnamment modulée.

En 1920, Marcel L'Herbier lui confie un rôle de jeune marin dans L'Homme du large. Le cinéma muet ne le tente guère. La conjoncture va lui être favorable : à la fin des années 1920, on examine les ressources du cinéma parlant et, à Hollywood, on commence à réaliser des versions françaises de succès américains.

Découvert par les États-Unis, où il se fixe après son mariage, en 1934, avec la comédienne Pat Anderson, Charles Boyer va s'imposer définitivement à Hollywood. Red-Headed Woman (1932), de Jack Conway, lui donne au côté de Jean Harlow un rôle de chauffeur gigolo, archétype du séducteur latin ! Très vite, ses prestations aux côtés des grandes stars des années 1930 vont devenir plus importantes : Mondes privés (1935) avec Claudette Colbert, Le Jardin d'Allah (1936), avec Marlene Dietrich, Maria Walewska (1937), au côté de Garbo, et surtout Mayerling (1936), avec Danielle Darrieux, film qui créera son mythe romantique. Curieusement, il va même reprendre le rôle de Pépé le Moko, immortalisé par Jean Gabin, dans Casbah (1938), le remake américain de John Cromwell. Le public refuse cet exotisme de bande dessinée et lui préfère le mauvais garçon charmeur qu'il a incarné dans Liliom de Fritz Lang, en 1934.

<it>Hantise</it>, de George Cukor - crédits : Metro-Goldwyn-Mayer Inc./ Collection privée

Hantise, de George Cukor

C'est surtout George Cukor qui va déceler les réelles possibilités de l'acteur en lui offrant un contre-emploi dans Hantise, en 1944. Charles Boyer y incarne le Mal, lui que Hollywood s'ingéniait à considérer comme le « very charming Frenchman ». Sans jamais se départir de son apparente réserve, jouant de sa réputation de gentleman, il conduit graduellement sa victime, interprétée par Ingrid Bergman, à la folie.

Il jouera encore de son physique rassurant pour reprendre en 1951 le rôle de Pierre Larquey dans le remake américain du Corbeau (The Thirteenth Letter), sous la direction d'Otto Preminger. Refusant tout manichéisme dans ce rôle de « médecin d'ombres », il exprime l'ambiguïté Bien-Mal avec jubilation. D'une carrière somme toute inégale, on peut retenir La Folle Ingénue (1945) de Lubitsch, avec Jennifer Jones, Confidential Agent (1945) d'Herman Shumlin, Back Street (1941), avec Margaret Sullavan, son émouvante interprétation du comte Muffat, dans Nana, le roman de Zola très librement adapté par Christian-Jaque, où l'acteur traduit presque cliniquement les ravages de la passion. Sa rentrée française s'était faite deux ans plus tôt, en 1953, dans Madame de..., avec Danielle Darrieux. Là encore, Charles Boyer pénètre avec beaucoup de finesse l'univers baroque de Max Ophüls. A-t-il rencontré alors le directeur d'acteur le plus proche de ses préoccupations secrètes ? Il retrouvera cette affinité avec un metteur en scène en 1973, dans le Stavisky d'Alain Resnais. Il semble, dans ce film, réfléchir sur le sens de sa carrière et donne encore à son personnage de baron élégant une fêlure très douloureuse. [...]

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Médias

<it>Hantise</it>, de George Cukor - crédits : Metro-Goldwyn-Mayer Inc./ Collection privée

Hantise, de George Cukor

<it>The Thirteenth Letter</it> - crédits : Hulton Archive/ Moviepix/ Getty Images

The Thirteenth Letter

<it>Confidential Agent</it>, d'Herman Shumlin - crédits : Warner Brothers, Inc./ Collection privée

Confidential Agent, d'Herman Shumlin