CROISSY CHARLES COLBERT marquis de (1625 env.-1696)
Frère du « grand Colbert », Charles Colbert fit ses études au collège de Clermont et à la faculté de droit d'Orléans. Après avoir exercé les charges d'intendant des armées de Catalogne, Provence et Naples, il achète une charge de conseiller au parlement de Metz. Cela lui donnera une compétence particulière pour les affaires d'Allemagne, d'autant plus qu'en 1656, il est nommé intendant d'Alsace, province nouvellement rattachée au royaume. Charles Colbert y apprend l'allemand et remplit ses premières missions diplomatiques dans l'Empire (Francfort, Vienne, Dantzig) et à Rome. Président à mortier du parlement de Metz en 1662-1663, maître des requêtes, conseiller d'État, intendant dans diverses généralités et aux armées, président à mortier au parlement de Paris, il franchit rapidement, grâce à son frère aîné, tous les échelons de la carrière administrative.
Son mariage avec Françoise Béraud, fille unique d'un conseiller d'État grand audiencier de France, sieur de Croissy-en-Brie, lui apporta une fortune considérable, un château, une terre, un nom.
Le traité d'Aix-la-Chapelle (1668) marque le début de sa carrière diplomatique puisqu'il y porte le titre d'ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire. En poste à Londres pour détacher la Hollande de l'Angleterre, il ne rentre que pour présider la délégation française aux conférences de Nimègue (1675-1678). Le roi lui accorde de larges pouvoirs pour mener toutes ces difficiles négociations. Envoyé à Munich pour consolider l'alliance entre la France et la Bavière, il est nommé à son retour secrétaire d'État aux Affaires étrangères, à la suite de la disgrâce de Pomponne. De 1680 à 1696, il siège au Conseil d'en haut, qui comprend alors deux membres de la famille Colbert et deux de la famille Le Tellier jusqu'en 1683 où Croissy, après la mort de son aîné, devient le chef de la famille. S'il n'avait été qu'une créature de son frère, il n'aurait pu, face à Louvois, se maintenir à un poste aussi considérable. Il faut lui attribuer pendant cette période la spécialisation de plus en plus grande du secrétariat d'État aux Affaires étrangères. On a souvent crédité Louvois de la responsabilité de la politique des réunions ; rien n'est plus faux. Tous les ministres approuvent cette politique royale que Croissy a préparée en Alsace. Louvois exécutait la politique militaire, Croissy rassurait les princes allemands et maintenait les alliances dans l'Empire. La révocation de l'édit de Nantes et la révolution de 1688 en Angleterre ruinèrent le système diplomatique de Croissy et acheminèrent l'Europe vers la guerre de la Ligue d'Augsbourg. Il réussit encore à transmettre sa charge à son fils Torcy.
Croissy, s'il fut le second des Colbert, fut cependant un grand ministre, avec sa personnalité propre. Saint-Simon déclare que « ses qualités étaient gâtées par l'humeur et la brutalité naturelle de sa famille », ce qui est confirmé par E. Spanheim dans sa Relation de la cour de France en 1690 (Paris, 1900). Louis XIV appréciait ce style fort peu diplomatique, surtout vis-à-vis des impériaux, qu'il voulait abaisser. Sa bibliothèque parisienne est surtout un instrument de travail. Ses goûts sont ceux d'un citadin et d'un officier du roi, qui tire ses revenus de traitements et de pensions et qui place ses capitaux dans des fonds d'État.
Malgré une fausse généalogie qui faisait descendre les Colbert d'un ancêtre écossais mort en 1300, Croissy, quoique anobli, est demeuré un robin et un bourgeois.
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Écrit par
- Jean-Marie CONSTANT : maître assistant à l'université de Paris-IV
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