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GAULLE CHARLES DE (1890-1970)

Le renouveau

Trois tâches s'imposent d'emblée : rebâtir l'État, rétablir la monnaie, et trouver une issue à la guerre d'Algérie. Celle-ci le sollicite d'abord. Dès le 4 juin, il est sur le Forum d'Alger – où a jailli la source de son nouveau pouvoir. A-t-il vraiment un projet algérien ? Ce qui est clair, c'est qu'il a d'abord considéré l'affaire algérienne comme un explosif susceptible de faire sauter les barrages qui faisaient obstacle à son retour au pouvoir et à la restauration de l'État. Ensuite, qu'il n'y a guère d'autres perspectives, dans le monde de la fin des années cinquante, que l'émancipation des colonies sous leurs diverses formes. Mais enfin l'Algérie fait légalement partie de la République, et les hommes qui y détiennent le pouvoir, dotés de moyens militaires considérables et appuyés sur une population très déterminée, se refusent à toute autre solution qu'à son « intégration », c'est-à-dire à une confirmation de son caractère français, les indigènes, traités en « Français à part entière », disposant désormais de tous les droits politiques.

Manifestation de partisans de l’Algérie française à Alger, 1958 - crédits : Meagher/ Hulton Archive/ Getty Images

Manifestation de partisans de l’Algérie française à Alger, 1958

La première préoccupation de de Gaulle est de garder les mains libres vis-à-vis de tous, déclarant aux insurgés de mai « Je vous ai compris ! » non sans saluer le « courage » des combattants des djebels. Il ne peut heurter de front les tenants de l'« Algérie française » qui l'ont ramené au pouvoir mais voit bien que l'« intégration », c'est l'algérianisation rapide de la France. D'un voyage en Algérie à l'autre, il met au point sa stratégie : obtenir la victoire militaire (la France ne saurait être vaincue par des guérilleros) pour faire ensuite la paix sur la base de l'« autodétermination » des Algériens – auxquels il offre, le 16 septembre 1959, le choix entre la sécession qui risquerait d'être le chaos, la « francisation » et l'association, c'est-à-dire « le gouvernement des Algériens par les Algériens, appuyé sur l'aide de la France et en union étroite avec elle ». La réalisation de ce plan n'ira pas sans convulsions : car civils et militaires d'Alger voient dans ce processus une liquidation de l'« Algérie française » pour le maintien de laquelle ils se sont soulevés en 1958 et ont fait appel à de Gaulle.

Le 18 janvier 1960, puis le 22 avril 1961, Alger s'insurge, d'abord dans le style populaire, en dressant des barricades, puis dans le style militaire du « putsch », en opposant à de Gaulle un « quarteron » de généraux en retraite soutenus (ou manipulés) par l'« O.A.S. » (Organisation armée secrète). Chaque fois, le président de la République, revêtu de son uniforme, paraît à la télévision et en quelques phrases foudroie les insurgés avec une autorité saisissante. Les pourparlers avec le F.L.N. algérien, ouverts en 1961 à Évian, aboutiront aux accords du 18 mars 1962, qui reconnaissent aux Algériens le droit à l'autodétermination – et à la minorité européenne la possibilité théorique de poursuivre ses activités dans le nouvel État. Mais la campagne terroriste déclenchée par l'O.A.S. ayant ruiné les quelques chances de coexistence, les accords d'Évian font vite figure de procédure de liquidation des positions et intérêts français en Algérie, à ceci près que pendant plusieurs années encore le pétrole algérien demeure payable en francs, et que les espaces sahariens restent disponibles pour les essais nucléaires français. De Gaulle a obtenu ce qu'il souhaitait : l'indépendance de la France par rapport à l'Algérie. C'est à un pays délivré de ce « fardeau » et libre de ses actes qu'il va pouvoir rendre son « rang » dans le monde.

La politique étrangère du général de Gaulle est[...]

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Charles de Gaulle et son épouse à Londres, 1941 - crédits : Fred Ramage/ Hulton Archive/ Getty Image

Charles de Gaulle et son épouse à Londres, 1941

Maurice Gamelin, 1939 - crédits : Central Press/ Hulton Archive/ Getty Images

Maurice Gamelin, 1939

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