DUMOULIN CHARLES (1500-1566)
Né à Paris où son père était avocat au parlement et au Châtelet, Dumoulin étudia à Paris, à Poitiers et à Orléans. Il s'inscrit comme avocat au barreau de Paris, mais, peu doué pour la parole, il préfère rapidement les consultations aux plaidoiries. Avec une vanité qui n'a d'égal que son génie, il se proclame lui-même « le plus habile jurisconsulte de France et de Germanie ». Converti au calvinisme en 1542, lié avec Calvin auprès duquel il trouve quelque temps refuge à Genève, il passe ensuite à la Confession d'Augsbourg et finit peut-être à nouveau catholique. Son Commentaire sur l'édit des petites dates (1552) — cet édit d'Henri II (1550) tente de mettre un terme à certains abus de la chancellerie pontificale en matière de collation de bénéfices ecclésiastiques — , par les violentes attaques qu'il contient contre la papauté et par la diffusion que Dumoulin sait lui assurer, provoque une vive réaction romaine : Dumoulin est sommé de s'expliquer devant la Sorbonne ; le peuple parisien, ameuté, pille sa maison. Dumoulin quitte le royaume, menant pendant quelques années une vie errante en Allemagne et en Suisse. Il enseigne à Strasbourg, à Tübingen, à Dôle, non sans avoir connu quelque temps les prisons du comte de Montbéliard. En 1557, il regagne Paris, obtient le pardon du roi. Mêlé aux conflits des guerres de religion, attaquant les Jésuites, publiant un Conseil sur le fait du Concile de Trente (1564) qui soutient la nullité du concile et développe les raisons qui s'opposent à sa réception en France, il est emprisonné à la Conciergerie, puis libéré sur ordre du roi (juin 1564). Un peu plus tard, un ouvrage sur les Évangiles lui vaut l'anathème du synode national de Paris et la colère des calvinistes, qui font brûler l'ouvrage à Genève. Il meurt peu après à Paris.
Cette vie tourmentée s'accompagne d'une production scientifique considérable sur des sujets divers. Très engagé dans les débats de son temps et excellent juriste, Dumoulin, à côté d'œuvres de polémique religieuse et politique, commente la Coutume de Paris en 1510 et prépare sur certains points sa réforme, qui interviendra en 1580 ; il discute de la vieille condamnation canonique du prêt à intérêt, de la monnaie et des mutations monétaires, réclame l'unification du droit privé en France, multiplie les consultations et les publications de ses cours. Travailleur infatigable, écrivain fécond mais parfois touffu, il tient parmi les juristes du xvie siècle une place de tout premier plan.
Outre les ouvrages mentionnés plus haut, il écrivit : Commentariorum in consuetudines parisienses, pars prima : de feudis (1539) ; Tractatus contractuum et usurarum reditumque pecunia constitutorum (1542) ; Oratio de concordia et unione consuetudinum Franciae ; Commentariorum in consuetudines parisienses, pars secunda ; Le Grand Coutumier, contenant les coutumes générales et particulières du royaume de France et des Gaules avec des annotations (1566).
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Écrit par
- Jean GAUDEMET : professeur à la faculté de droit et des sciences économiques de Paris, directeur d'études à l'École pratique des hautes études
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